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Coup d'envoi de la réforme de l'adoption à l'Assemblée nationale

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Augmenter le nombre des adoptions - actuellement de 5 000 par an, dont 4 000 d'enfants étrangers - et simplifier les démarches des 25 000 foyers agréés en attente d'un enfant : c'est l'ambition de la proposition de loi portant réforme de l'adoption votée en première lecture par l'Assemblée nationale le14 avril. Initié par le député UMP de la Loire, Yves Nicolin, également président du Conseil supérieur de l'adoption, et la députée UMP des Alpes-Maritimes, Michèle Tabarot, qui avait aussi conduit un groupe d'étude sur l'adoption, ce texte s'inscrit clairement dans la continuité des propositions de réforme présentées en juin par le gouvernement (1) et reprises à son compte par Philippe Douste-Blazy. Ce dernier a d'ailleurs indiqué, lors des débats, son intention de faire paraître rapidement, une fois la loi définitivement votée, les décrets d'application. Il souhaite de plus lancer « dans les prochains mois une réflexion sur les modalités d'adoption des plus fragiles ». Plus de 35 % des pupilles de l'Etat ne sont en effet pas adoptés en France, en raison de leur âge -supérieur à 8-10 ans -, d'une maladie ou d'un handicap, a expliqué le ministre des Solidarités, de la Santé et de la Famille.

L'harmonisation de la procédure d'agrément

Alors que les taux d'agrément varient selon les départements de 66 à 98 % en raison de pratiques très hétérogènes dans l'instruction des dossiers, la proposition de loi cherche d'abord à clarifier et à harmoniser la procédure d'agrément.

Sans toucher au délai de neuf mois fixé pour la délivrance ou non de l'agrément, la proposition de loi en modifie le point de départ. Cette période commencera à courir à compter du jour de la confirmation de la demande, et non plus à partir de la date de dépôt de la demande. Aujourd'hui, en pratique, les candidats font une demande d'agrément auprès du conseil général, lequel organise ensuite une réunion d'information. A l'issue de celle-ci, les candidats doivent confirmer leur demande. Ce n'est qu'à la réception de cette confirmation que le conseil général peut commencer son instruction alors que le délai a déjà commencé à courir depuis la demande.

Autre modification : l'agrément devra être délivré par un arrêté dont la forme et le contenu seront définis par décret. Ce modèle-type vise à répondre à l'incompréhension des autorités étrangères confrontées à des agréments dont la forme est très variable selon les départements.

Le texte ouvre, par ailleurs, la possibilité de délivrer un agrément pour l'accueil d'un ou de plusieurs enfants simultanément, cela pour permettre d'adopter une fratrie sans être obligé d'obtenir un agrément au titre de chaque enfant.

De plus, l'agrément devrait, à l'avenir, comporter en annexe une notice décrivant le projet d'adoption afin que les demandeurs puissent expliquer ce qu'ils estiment important dans leur projet personnel. Ce document, dont la forme et le contenu devraient être précisés par décret, aura notamment pour vocation d'informer les autorités des pays d'origine pour que le choix de l'enfant destiné à la famille soit le plus proche possible de la volonté des futurs parents. Cette notice pourra être révisée par le président du conseil général à la demande du candidat de l'adoption pour tenir compte de son cheminement.

Une clarification sur la caducité de l'agrément est par ailleurs apportée :celle-ci devrait intervenir à compter de l'arrivée au foyer d'au moins un enfant français ou étranger ou de plusieurs simultanément. Point sur lequel la loi est, pour l'heure, silencieuse.

Enfin, les conseils généraux devraient proposer aux candidats des réunions pendant la période d'agrément, au cours desquelles ils recevront une information complémentaire à celle, plus générale, délivrée avant la confirmation de la demande d'agrément en vue d'adoption. Ces réunions seront distinctes des entretiens menés dans le cadre de la procédure d'agrément.

L'accompagnement de l'enfant adopté par les services sociaux

La proposition de loi renforce la démarche de suivi de l'enfant adopté. Sous réserve de quelques aménagements (2), le mineur placé en vue d'adoption ou adopté bénéficiera, comme actuellement, d'un accompagnement par le service de l'aide sociale à l'enfance ou par les organismes autorisés et habilités pour l'adoption à compter de son arrivée au foyer et jusqu'au prononcé de l'adoption plénière en France ou jusqu'à la transcription du jugement étranger. Mais, à l'avenir, cet accompagnement devra - et non plus pourra - être prolongé à la demande des intéressés, poursuit le texte. En effet, les services assurant ce suivi n'ont qu'une simple faculté de le prolonger si la demande leur en est faite. Ce dispositif s'accommodant mal avec l'exigence développée par certains Etats d'origine qui imposent aujourd'hui une période plus longue d'accompagnement de l'enfant, le texte vise à transformer cette faculté en obligation.

Le texte supprime, par ailleurs, dans l'article 350 du code civil, qui permet au juge de déclarer adoptables des enfants abandonnés, la clause restrictive « sauf le cas de grande détresse des parents » (3). Pour la députée UMP des Hautes-Alpes, Henriette Martinez, à l'origine de cet amendement très discuté, « il ne s'agit pas de condamner les parents » mais de remettre en cause la priorité accordée par le droit français à « l'autorité parentale sur le droit de l'enfant à se construire et à trouver un équilibre affectif, intellectuel et physique au sein d'une vraie famille. » Environ 2 000 enfants seraient concernés chaque année.

La création d'une Agence française de l'adoption

La proposition de loi vise également à réformer le dispositif de l'adoption internationale avec la création d'une Agence française de l'adoption, dont l'objectif sera de mieux accompagner les familles dans leurs démarches d'adoption à l'étranger. Cette dernière aura deux missions : conseiller, informer et aider à la constitution des dossiers d'adoption de mineurs étrangers de moins de 15 ans, et, dans certains pays, grâce à un correspondant placé aux côtés du consul, accompagner les familles dans leurs démarches sur place, le consulat gardant son rôle habituel de délivrance des visas. A la demande du ministre des Affaires étrangères, l'agence suspendra ou cessera son activité si les procédures d'adoption ne peuvent plus être menées à bien compte tenu de la situation intérieure du pays concerné.

Cette agence n'aura pas pour vocation de se substituer aux organismes autorisés pour l'adoption mais de permettre aux familles qui ne passent pas par ces derniers de voir leur demande mieux accompagnée et d'avoir accès aux pays qui refusent les démarches individuelles. Elle aidera aussi les familles à respecter leurs engagements en matière de suivi des enfants arrivés en France. Créée sous forme d'un groupement d'intérêt public, elle constituera une troisième voie pour l'adoption des enfants étrangers.

Cette agence reprendra une partie des compétences actuelles de gestion de la mission de l'adoption internationale (4). En outre, elle s'appuiera dans chaque département sur au minimum un correspondant désigné par les conseils généraux.

Autres mesures

La proposition de loi étend au salarié titulaire d'un agrément et prenant un congé non rémunéré pour se rendre à l'étranger ou en outre-mer en vue de l'adoption d'un enfant la possibilité de faire une demande en dommages et intérêts si l'employeur ne respecte pas ce droit à congé.

Enfin, le texte reprend une disposition de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005, censurée par le Conseil constitutionnel (5)  : la revalorisation de la prime d'adoption de la prestation d'accueil du jeune enfant. Mais renvoie à un décret le soin d'en fixer le montant.

Notes

(1)  Voir ASH n° 2364 du 18-06-04.

(2)  Deux changements sont apportés : l'adoptant n'aura plus à demander cet accompagnement ou à donner son accord et la durée minimum de l'accompagnement à compter de l'arrivée au foyer fixée à six mois au minimum disparaît.

(3)  En vertu de l'article 350 du code civil, « l'enfant recueilli par un particulier, un établissement ou un service de l'aide sociale à l'enfance, dont les parents se sont manifestement désintéressés pendant l'année qui précède l'introduction de la demande en déclaration d'abandon, est déclaré abandonné par le tribunal de grande instance sauf le cas de grande détresse des parents ».

(4)  L'autre partie de ses compétences, plus étatique, le sera par l'Autorité centrale pour l'adoption internationale prévue par la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, qui constitue un conseil de réflexion et d'observation sur l'application de cette convention et sur l'adoption internationale en général.

(5)  Voir ASH n° 2387 du 24-12-04.

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