« S'il doit y avoir un processus d'égalisation des chances, celui-ci doit s'exercer le plus tôt possible, dès les premiers âges de la vie. » Si cette conviction fait l'unanimité parmi les personnes qui se sont intéressées aux situations de handicap, elle s'accompagne d'un constat paradoxal : alors que l'intégration à l'école fait l'objet de débats et de combats, l'accueil dans les équipements pour la petite enfance est très peu évoqué. On a pu encore le vérifier à l'occasion des discussions qui ont entouré le vote de la loi du 11 février 2005. D'où l'intérêt du travail commandé sur ce thème par la caisse nationale des allocations familiales à une équipe de chercheurs de l'université de Paris-V, coordonnée par Eric Plaisance (1).
Au plan statistique, la pêche est maigre et permet seulement de cerner le public potentiel : 20 000 enfants de 0 à 6 ans, dont 6 000 de 0 à 3 ans, bénéficient de l'allocation d'éducation spéciale. Il est vrai que, pour les enfants d'âge préscolaire, il n'existe ni obligation de la collectivité, ni droit à l'accueil. Les textes se contentent d' « encourager à l'accueil », mais celui-ci, « trop rare », reste « soumis à la bonne volonté ». La CNAF va plus loin en subordonnant désormais ses aides à l'investissement à la prise en compte des enfants handicapés.
Parmi les recommandations formulées figure, bien sûr, un développement de la connaissance et de la recherche. Mais l'équipe préconise d'abord de définir quelques principes d'action « sous l'égide du droit » . Droit à un accueil de droit commun pour les enfants, droit à un accueil « le plus proche possible » et continu pour les parents.
Pour faciliter l'accès aux structures, elle propose le lancement, au niveau départemental, d'un programme incitatif de type Handiscol', qui pourrait s'appeler Handi-accueil. Il aurait vocation à développer les centres d'action médico-sociale précoce, encore insuffisants, et à favoriser l'accueil dans les crèches et haltes-garderies ordinaires. Cela, dans une logique de projet individuel. Il aurait aussi vocation à faire le lien en amont avec les services hospitaliers de néonatalogie, en aval avec les écoles maternelles.
Complément indispensable à une incitation à l'accueil : le soutien et l'accompagnement des équipes, avec l'intervention de professionnels expérimentés ou de médiateurs, du temps pour la concertation en interne et pour la coordination entre établissements travaillant en réseau. A quoi s'ajoute l'indispensable formation aux situations de handicap, ou mieux à l'accueil de la diversité, pour l'ensemble des métiers de la petite enfance, assistantes maternelles incluses. Une formation intercatégorielle de préférence et qui pourrait déjà se trouver auprès des associations, de parents notamment.
Des actions devraient enfin être menées en direction desdits parents, notamment « pour pallier ou au moins atténuer les inégalités flagrantes d'information et de possibilités de choix » selon le milieu social (2). Le guichet unique des futures maisons départementales du handicap devrait simplifier les démarches, une cellule téléphonique d'écoute et d'information pourrait compléter son action, notamment lors de l'annonce du handicap.
(1) « Petite enfance et handicap - La prise en charge des enfants handicapés dans les équipements collectifs de la petite enfance » - Dossier d'étude n° 66 - Mars 2005 - Disp. sur
(2) Sur ces inégalités, voir les résultats de l'enquête HID - ASH n° 2280 du 11-10-02.