Le décret définissant l'organisation générale et administrative de la nouvelle Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité des chances (HALDE) est paru. Ce texte, qui détermine également le fonctionnement financier et comptable de l'instance et détaille les procédures applicables devant l'instance, était attendu car sa publication conditionnait l'entrée en fonction de l'autorité, créée pour mémoire par la loi du 30 décembre 2004 (1). Jacques Chirac a indiqué, le 9 mars, qu'il l'installerait « dans les prochaines semaines ».
Le décret précise notamment le champ des compétences du président de la HALDE. C'est Louis Schweitzer, jusque-là président-directeur général de Renault qui a été nommé pour assurer cette fonction. Il aura autorité pour signer tous les actes relatifs à l'activité de la nouvelle instance. Il sera, en outre, habilité à conclure des conventions avec toute personne publique ou privée, française ou étrangère, « et notamment avec des organismes ou services qui, dotés de compétences complémentaires de celles de la haute autorité, peuvent lui apporter leur concours ». Signalons à cet égard que la Commission nationale consultative des droits de l'Homme propose, dans un avis relatif à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme, la xénophobie et les discriminations rendu le 25 février, « d'institutionnaliser des synergies entre elle-même, le Haut Conseil à l'intégration et la HALDE » (2). Louis Schweitzer aura encore qualité pour liquider et ordonnancer les recettes et les dépenses du budget de la haute autorité, passer au nom de celle-ci tous contrats, conventions et marchés ou encore recruter, gérer le personnel et fixer ses rémunérations.
Il sera entouré d'un collège de dix personnalités. Ont été nommés Nicole Notat, ancienne secrétaire générale de la CFDT, Cathy Kopp, actuelle directrice des ressources humaines du groupe Accor, Alain Bauer, président de l'Observatoire national de la délinquance, Marie-Thérèse Boisseau, ancienne secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, Claude-Valentin Marie, ancien directeur du Groupe d'études et de lutte contre les discriminations, Fadela Amara, présidente du mouvement « Ni putes, ni soumises », Amar Dib, administrateur du Fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations, Marc Gentilini, ancien président de la Croix-Rouge, Jean-Michel Belorgey, conseiller d'Etat et ancien président de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, et Bernard Challe, magistrat (3).
Réunis à la demande du président ou à celle de la moitié des membres du collège, ils délibéreront ensemble sur toutes les questions relatives à l'exercice des pouvoirs et des missions de la HALDE, et notamment sur la suite à donner aux réclamations portées devant elle (actions en justice, observations devant les tribunaux, vérifications sur place, avis et recommandations...). Ils fixeront par ailleurs son règlement intérieur et délibéreront également, entre autres, sur les conditions générales de recrutement, d'emploi et de rémunération du personnel de l'instance, son budget annuel ou encore l'acceptation ou le refus des dons et legs. C'est également le collège qui désignera les 18 membres du « comité consultatif » associé aux travaux de la haute autorité. Leur mandat sera d'une durée de trois ans et renouvelable une fois. Le comité désignera en son sein un président et sera convoqué par ce dernier selon un ordre du jour fixé conjointement avec le président de la haute autorité. Ses modalités de fonctionnement seront précisées par le règlement intérieur de la HALDE.
Un directeur général, chargé de préparer les délibérations du collège -auxquelles il assiste - et d'en assurer l'exécution, figure également dans l'organigramme de la nouvelle instance. Le décret prévoit encore que des fonctionnaires, des magistrats ou des militaires peuvent être détachés ou mis à disposition auprès de la haute autorité dans les conditions prévues par leur statut respectif mais aussi que l'instance peut recruter des agents non titulaires de droit public par contrat, employés à temps complet pour une durée n'excédant pas 70 % d'un service à temps complet. Le texte ouvre également pour la HALDE la possibilité de disposer de délégués régionaux.
La HALDE a compétence, pour mémoire, pour connaître de « toutes les discriminations, directes ou indirectes, prohibées par la loi ou par un engagement international auquel la France est partie » (4). Concrètement, toute personne physique ou morale qui saisit l'instance doit lui faire connaître par écrit, en apportant toutes précisions utiles, les faits qu'elle estime constitutifs d'une discrimination. Le décret détaille les suites qui peuvent être données à une saisine : enregistrement et traitement - ou non - de la réclamation, recours aux travaux d'experts, demande d'explication auprès des personnes mises en cause, vérifications sur place, recours à un médiateur, mise en demeure et, en cas d'obstruction, saisine du juge des référés, information des personnes intéressées des démarches accomplies...
Nous reviendrons sur la nouvelle instance et ses moyens d'action dans un prochain numéro.
(1) Voir ASH n° 2387 du 24-12-04.
(2) Avis disponible sur le site
(3) Nicole Notat a été nommée par l'Elysée, tandis que Cathy Kopp et Alain Bauer l'ont été par Matignon, Marie-Thérèse Boisseau et Claude-Valentin Marie par le président du Sénat, Christian Poncelet, Fadela Amara et Amar Dib par son homologue de l'Assemblée nationale, Jean-Louis Debré, Marc Gentilini par le président du Conseil économique et social, Jean-Michel Belorgey par le vice-président du Conseil d'Etat et Bernard Challe par le premier président de la Cour de cassation.
(4) Soit, actuellement, celles fondées sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion, un handicap, l'âge ou bien encore l'orientation sexuelle.