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Le CERC dresse un état des lieux de la « sécurité de l'emploi »

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L'instabilité de l'emploi a nettement progressé au cours de la période allant de 1983 à 2002 : « pour 100 salariés présents en début d'année dans un établissement, on enregistrait, dans les déclarations de mouvement de main-d'œuvre, environ 23 sorties en 1983 et 37 en 2002 ». Tel est le constat que fait le Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC) dans son cinquième rapport, qu'il devait rendre public le 24 février (1). Mettant en perspective cette évolution avec celle d'autres pays européens (Allemagne, Espagne, Belgique, Italie, Pays-Bas notamment), cette étude pointe les difficultés de la France, confrontée à de profondes transformations économiques, à assurer la « sécurité des emplois » des salariés. Et éclaire les débats sur les réformes en cours ou proposées.

Repenser l'organisation de la formation professionnelle continue

Premier constat : si les entreprises consacrent à la formation professionnelle continue des efforts financiers allant, en moyenne, bien au-delà des obligations légales, cet effort est très inégalement réparti selon les catégories de salariés. Il est ainsi plus important pour les plus qualifiés et baisse sensiblement à partir d'un certain âge (environ 50 ans) au motif que les salariés âgés auraient « moins de temps pour rentabiliser cet investissement ». Il se concentre également sur la fraction la plus stable des salariés, ceux que les entreprises ont intérêt à conserver et pour lesquels « un savoir-faire spécifique à l'entreprise est important et coûteux à développer ». Alors que les salariés peu qualifiés, qui bénéficient beaucoup plus résiduellement de cet effort de formation, subissent « de plein fouet l'instabilité » .

Afin de corriger cette tendance à la « dualisation de la main-d'œuvre », les auteurs préconisent de « repenser l'organisation de la formation professionnelle continue entre l'Etat ou les collectivités territoriales, les partenaires sociaux et les entreprises ». Ils déplorent notamment que l'essentiel des dépenses de formation s'inscrive dans le plan de formation de l'entreprise, lequel « n'est pas négocié et reste de la responsabilité unique du chef d'entreprise ». Mais ils estiment que la mise en place du contrat de professionnalisation, institué par la loi « Fillon » du 4 mai 2004 en remplacement des anciens contrats d'insertion en alternance (2) ainsi que la valorisation des acquis de l'expérience au travers d'une qualification reconnue constituent très certainement «  un sérieux progrès pour assurer les parcours professionnels ». L'étude est plus réservée sur l'impact du droit individuel à la formation (DIF), également prévu par la loi du 4 mai 2004 (3). Regrettant que ce nouveau droit « ne permette d'accéder qu'à des modules limités », elle considère qu'il est « peu probable que [sa] mise en place réduise sensiblement l'instabilité de l'emploi pour les salariés qui y sont le plus soumis ».

Améliorer la protection sociale des salariés

Les auteurs précisent ensuite les conséquences de cette instabilité de l'emploi sur la protection sociale des salariés. Tout en reconnaissant que l'ouverture des droits à la protection sociale de base est « assez facile, en France, qu'il s'agisse de l'assurance maladie ou de la validation des trimestres pour les droits à pension », ils déplorent que les salariés les plus instables, notamment ceux en contrat à durée déterminée, soient «  souvent exclus des assurances complémentaires (de droit ou en raison des délais minima de présence dans l'entreprise qui sont requis)  ».

Concernant les réformes successives de l'assurance chômage, leur analyse est tout aussi critique. Selon eux, elles ont «  plutôt renforcé les inégalités face à l'indemnisation en préservant les droits des personnes ayant une longue durée d'activité salariale et en réduisant les droits des plus instables ».

Aussi estiment-ils qu'une réflexion approfondie devrait être menée pour adapter « l'ensemble de la protection sociale à l'évolution de la nature de nos sociétés », marquée notamment par une « instabilité croissante de l'emploi et des carrières professionnelles ».

Diversifier les contrats de travail

Le CERC considère, au-delà, que la mise en place d'un contrat unique à durée indéterminée, notamment suggérée par le rapport Cahuc-Kramarz (4), aurait « peu de chances de réduire l'instabilité de l'emploi », à tout le moins pour certains cas de recours licites aux contrats à durée déterminée (remplacement d'un salarié malade, surcroît temporaire d'activité...). Quant à la proposition des organisations patronales, reprise dans le cadre du rapport de la commission de Virville (5), d'élargir les possibilités de recours au CDD, notamment en créant un « contrat de mission » d'une durée comprise entre 18 mois et cinq ans pour la réalisation d'un projet déterminé, les auteurs la jugent de nature à « améliorer la flexibilité des entreprises » tout en préservant la sécurité des salariés. A condition toutefois que ce contrat ne « soit destiné qu'à des cadres ou des experts » et que les conditions de sa mise en œuvre soient renvoyées à un accord collectif de branche.

T.R.

Notes

(1)  La sécurité de l'emploi face aux défis des transformations économiques - CERC - Rapport n° 5 - Prochainement disponible sur www.ladocfrancaise.gouv.fr.

(2)  Voir ASH n° 2361 du 28-05-04.

(3)  Voir ASH n° 2359 du 14-05-04.

(4)  Voir ASH n° 2386 du 17-12-04.

(5)  Voir ASH n° 2343 du 23-01-04.

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