La Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH) a, en mars 2004, émis de sévères critiques sur les conditions de détention en France (1). La chancellerie y répond point par point, dans une note récemment publiée (2), balayant certaines des préconisations formulées par la commission. Il en est ainsi de la proposition d'instaurer le droit de grève et d'association pour les détenus ou encore de celle de supprimer les quartiers disciplinaires et les fouilles générales des établissements pénitentiaires.
De même, si le gouvernement souscrit aux principes énoncés par la CNCDH selon lesquels « la personne incarcérée est et demeure une personne humaine », qui conserve en détention l'intégralité de ses droits fondamentaux, il juge que la reconnaissance effective de ces principes n'impose pas une réforme législative. Exit donc l'idée d'une loi pénitentiaire.
L'une des revendications de l'instance de créer un contrôle extérieur sur les prisons est aussi rejetée par le ministère. Lequel opte plutôt pour un renforcement des prérogatives de la Commission nationale de déontologie de la sécurité, qui exerce déjà des missions de contrôle de l'administration pénitentiaire.
Egalement écartée la proposition d'instaurer des médiateurs spécialisés en prison, la chancellerie préférant s'appuyer sur les délégués du médiateur de la République. Une expérimentation de ce dispositif pendant 18 mois est d'ailleurs en place, rappelle-t-elle (3).
Sur d'autres points, Dominique Perben se montre toutefois plus réceptif. Ainsi, sur l'amélioration des conditions de l'isolement, souhaitée par l'instance, il indique qu'une réforme est en cours afin d'introduire, par décret, la procédure contradictoire dans la phase de placement et de renouvellement de l'isolement. Le texte devrait également définir « clairement le régime de détention à l'isolement et notamment les droits du détenu, les modalités d'accès aux activités en commun et l'organisation de ses relations avec l'extérieur ».
En ce qui concerne la prise en charge des malades mentaux, la question de la création d'aménagements de peines spécifiques pour tenir compte notamment de leur incapacité éventuelle à formuler la demande auprès du magistrat compétent serait également examinée par le gouvernement.
Au plan du maintien des liens familiaux, la mise en place des unités expérimentales de visite familiale implantées dans trois sites se poursuit, insiste l'administration. « L'avenir de ce dispositif sera décidé en fonction du résultat de l'évaluation menée dans chaque site après dix-huit mois de fonctionnement. »
D'autres évolutions sont aussi évoquées, comme celle permettant à un détenu, grâce au déplacement d'un greffier du tribunal de grande instance, de conclure un pacte civil de solidarité. L'administration pénitentiaire envisage, de plus, de revoir, par décret, le régime des communications téléphoniques dans le souci de l'uniformiser tout en veillant à garantir la sécurité des établissements. En matière d'emploi, le ministère, sans retenir l'idée d'un contrat de travail, réfléchit à une forme spécifique de relation de travail du type d'un « engagement de travail », qui n'aurait pas la valeur juridique d'un contrat de travail et relèverait du droit public. L'administration pénitentiaire souhaiterait également que « le travail pénitentiaire s'inscrive dans un système aidé, en expertisant ce qui existe dans le secteur de l'insertion par l'activité économique et qui pourrait être aménagé en détention, en supprimant les cotisations à la charge de l'employeur ». Enfin, la possibilité de créer pour les détenus travailleurs un revenu de remplacement lorsqu'ils ne trouvent pas d'emploi immédiatement après leur sortie de prison serait examinée.
(1) Voir ASH n° 2352 du 26-03-04.
(2) Disponible sur le site
(3) Voir ASH n° 2374 du 24-09-04.