(Loi à paraître)
Près de 30 ans après la loi d'orientation en faveur des personnes handicapées du 30 juin 1975, les parlementaires ont définitivement adopté le 3 février la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Un texte qui aura fait l'objet de 2 ans et demi de débats depuis l'annonce en 2002 par le président de la République de la priorité qu'il accordait à ce chantier et dont l'adoption a été saluée par ce dernier, le 8 février. Le chef de l'Etat a, en effet, souligné la « nouvelle philosophie » àl'œuvre dans cette loi, appelé à la mobilisation de tous et donné « rendez-vous dans un an pour faire le point sur la mise en œuvre des engagements ».
Retour sur ces dernier mois. Présenté en janvier 2004 en conseil des ministres par Marie-Thérèse Boisseau, alors secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, le projet de loi retenait trois grands axes : garantir aux personnes handicapées le libre choix de leur projet de vie grâce à la compensation des conséquences de leur handicap et à un revenu d'existence favorisant une vie autonome digne, permettre une participation de ces publicsà la vie sociale par l'organisation de la cité autour d'un principe d'accessibilité généralisé et placer les intéressés au centre des dispositifs qui les concernent, notamment par la mise en place de maisons départementales des personnes handicapées (1).
Reprenant la réforme au milieu du gué - à la suite du remaniement ministériel de mars 2004 et après une première lecture au Sénat -, la nouvelle secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, Marie-Anne Montchamp, a tenu à y insuffler sa marque en créant 12 groupes de travail pour améliorer le texte au cours des débats (2). Et celui-ci a en effet connu desévolutions avec la promesse du gouvernement de supprimer les barrières d'âge dans l'accès au droit àcompensation instauré par la loi, ou avec l'introduction de dispositions concernant l'organisation institutionnelle à la suite des réflexions menées par la mission Briet-Jamet sur la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie ou sur les maisons départementales des personnes handicapées (3).
Reste que, s'il comporte des avancées notables, ce texte touffu de 101 articles demeure, selon le milieu associatif, quelque peu timide sur certains points (voir encadré). Sa mise enœuvre est par ailleurs largement subordonnée àl'adoption d'environ 80 décrets. Sur ce point, la loi pose d'ailleurs le principe de la publication des textes réglementaires d'application dans les 6 mois suivant sa parution au Journal officiel, après avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées (art. 101 de la loi). La secrétaire d'Etat aux personnes handicapées a assuré que « 90 % devraientêtre publiés à l'été ».
Au-delà, la loi introduit pour la première fois dans le code de l'action sociale et des familles une définition du handicap inspirée de la classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé, établie par l'Organisation mondiale de la santé. Constitue un handicap« toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou de plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santéinvalidant » (code de l'action sociale et des familles[CASF], art. L. 114 nouveau).
Tour d'horizon des principales dispositions de la loi sur lesquelles nous reviendrons plus en détail dans le cadre de dossiers spécifiques.
La loi votée le 3 février réaffirme, en premier lieu, le droit à compensation « des conséquences de son handicap quels que soient l'origine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie » accordé à toute personne handicapée- droit déjà énoncé dans le cadre de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 et dans celle relative aux droits des malades du 4 mars 2002 (4) - et en définit le contenu (CASF, art. L. 114-1-1 nouveau).
Elle précise ensuite que les besoins de compensation seront inscrits dans un plan - le plan personnalisé de compensation - élaboré en prenant en considération les besoins et les aspirations de la personne handicapée. Lesquels sont exprimés dans un projet de vie formulé par elle ou, à défaut, avec ou pour elle, par son représentant légal.
Pour concrétiser ce droit, la loi instaure, corrélativement, une prestation de compensation (CASF, art. L. 245-1 à L. 245-10 nouveaux). Prestation qui doit, selon la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, être mise en place au 1er janvier 2006. Pour les personnes les plus lourdement handicapées, elle doit même, selon Marie-Anne Montchamp et Jacques Chirac, entrer en vigueur « avant la fin du premier semestre de cette année ».
« Avec la création du droit à compensation, la politique pour les personnes handicapées quitte définitivement le champ de l'assistance pour entrer pleinement dans celui de la sécurité sociale », a estimé, le 8 février, le président de la République.
Ainsi, toute personne handicapée résidant de façon stable et régulière en France a droit àune prestation de compensation si :
elle a dépassé l'âge d'ouverture du droit à l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (20 ans) - qui remplace l'allocation d'éducation spéciale ;
son âge est inférieur àune limite fixée par décret - qui devrait être de 60 ans ;
son handicap répond à des critères définis par décret prenant en compte la nature et l'importance des besoins de compensation au regard de son projet de vie.
L'octroi de la prestation de compensation est donc, entre autres, subordonné à une condition d'âge. D'ores et déjà, toutefois, des exceptions à la limite d'âge supérieure sont prévues par la loi, àcertaines conditions, pour les personnes de plus de 60 ans.
En outre, pour répondre aux critiques dont le dispositif aété l'objet, le gouvernement a fait introduire dans la loi le principe selon lequel, dans les 3 ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi, la prestation de compensation sera étendue aux enfants handicapés (art.13 de la loi). Une promesse que la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées entend tenir dès le 1er janvier 2006, a-t-elle indiqué le 3 février en présentant la loi. De plus, « dans un délai maximal de 5 ans, les dispositions de la loi opérant une distinction entre les personnes handicapées en fonction de critères d'âge en matière de compensation du handicap et de prise en charge des frais d'hébergement en établissements sociaux et médico-sociaux seront supprimées » (art. 13 de la loi).
Cette prestation vise à couvrir les besoins en aides humaines, y compris éventuellement celles apportées par les aidants familiaux, les aides techniques, l'aménagement du logement, du véhicule, les aides spécifiques ou exceptionnelles, l'attribution et l'entretien des aides animalières. Relevons que les bénéficiaires de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé pourront eux aussi prétendre au bénéfice des aides àl'aménagement du logement et du véhicule attribuées dans le cadre de la prestation de compensation.
La loi définit également longuement le régime de cette prestation. Aucune condition de ressources n'est fixée pour l'ouverture du droit à cette prestation. Néanmoins, cette dernière est accordée sur la base de tarifs et de montants fixés par nature de dépense dans la limite de taux de prise en charge qui peuvent varier selon les ressources du bénéficiaire. Sont toutefois exclus de ces ressources un certain nombre d'éléments dont la liste est fixée par la loi (revenus d'activitéprofessionnelle de l'intéressé...).
Cette prestation est accordée aux personnes handicapées vivant à leur domicile. Celles hébergées ou accompagnées dans un établissement social ou médico-social ou hospitalisées dans unétablissement de santé y ont également droit.
Il est en outre prévu que toute personne qui a obtenu le bénéfice d'une prestation de compensation avant 60 ans et qui remplit les conditions d'attribution de l'allocation personnalisée d'autonomie pourra choisir, lorsqu'elle atteint cet âge et à chaque renouvellement, entre le maintien de celle-ci et le bénéfice de l'allocation personnalisée d'autonomie.
Par ailleurs, cette prestation est appelée à se substituer à l'allocation compensatrice pour tierce personne. Toutefois, il est prévu que les bénéficiaires de cette allocation dans sa rédaction antérieure à l'adoption de la loi en conservent le bénéfice tant qu'ils en remplissent les conditions d'attribution. Ils ne peuvent toutefois la cumuler avec la prestation de compensation. Ils peuvent opter pour le bénéfice de la prestation de compensation à chaque renouvellement de l'attribution de l'allocation compensatrice, ce choix étant alors définitif (art. 95 de la loi).
Dans le souci d'améliorer le niveau de vie des personnes handicapées, sans toutefois aligner, comme le réclamaient les acteurs de terrain, l'allocation aux adultes handicapés (AAH) sur le SMIC, la loi réforme cette allocation et le mode de rémunération des travailleurs handicapés en centre d'aide par le travail.
Pour les personnes handicapées en mesure de travailler, la loi prévoit que les rémunérations de l'intéressé tirées d'une activitéprofessionnelle en milieu ordinaire de travail seront en partie exclues du montant des ressources servant au calcul de l'allocation selon des modalités fixées par décret (code de la sécurité sociale [CSS], art. L. 821-3 nouveau).
En contrepartie de la suppression du complément d'AAH (voir ci-dessous), la loi institue, à compter du 1erjuillet 2005, un complément de ressources pour les bénéficiaires de l'AAH dans l'incapacité de travailler, c'est-à-dire ceux dont la capacité de travail, compte tenu de leur handicap, est inférieure àun pourcentage qui sera fixé par décret, qui n'ont pas perçu de revenus d'activité professionnelle depuis une certaine durée et qui disposent d'un logement indépendant. Associé à l'AAH, il constitue une garantie de ressources (CSS, art. L. 821-1-1 nouveau). Selon les informations communiquées par la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, ce complément sera de 140 € par mois et, associéà l'allocation aux adultes handicapés, représentera 80 % du SMIC.
Par ailleurs, une majoration pour la vie autonome sera versée, à compter de la même date, aux bénéficiaires de l'AAH au chômage en raison de leur handicap qui ne perçoivent notamment aucun revenu d'activité à caractère professionnel propre mais qui disposent d'un logement indépendant pour lequel ils perçoivent une aide personnelle au logement. Ce, pour alléger leurs frais de logement (CSS, art. L. 821-1-2 nouveau). Cette majoration devrait être d'un montant de 100 € par mois, a indiqué la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées.
La loi prévoit la suppression du complément d'AAH parce que son objet - favoriser l'accès au logement indépendant - procédait plutôt d'une logique de compensation que d'une logique de ressources. Elle introduit toutefois un régime transitoire. Les personnes bénéficiaires de ce complément dans sa rédaction antérieure à la loi en conservent le bénéfice, dans les mêmes conditions, jusqu'au terme de la période pour laquelle l'allocation aux adultes handicapés au titre de laquelle elles perçoivent ce complément leur a été attribuée. Si elles ouvrent droit à la garantie de ressources ou à la majoration pour la vie autonome, elles bénéficient du complément jusqu'à la date à laquelle elles percevront ces avantages (art. 95 de la loi).
Une atténuation est par ailleurs apportée au caractère subsidiaire de l'AAH. Rappelons, en effet, que cette allocation est ouverte lorsque la personne ne peut prétendre au titre d'un régime de sécuritésociale ou d'une législation particulière à un avantage de vieillesse ou d'invalidité ou à une rente d'accident du travail. Désormais, la majoration pour aide constante d'une tierce personne qui constitue un avantage d'invalidité (CSS, art. L. 355-1 inchangé) et la majoration pour aide d'une tierce personne versée aux titulaires d'une rente d'accident du travail (CSS, art. L. 434-2 inchangé) ne priment plus sur l'AAH (CSS, art. L. 821-1 modifié).
Enfin, diverses dispositions visent à simplifier le mécanisme de versement de l'allocation aux adultes handicapés.
Une autre modification apportée par la loi touche au mode de rémunération des travailleurs handicapés dans les centres d'aide par le travail (CAT).
Le mécanisme de la garantie de ressources, composée d'un salaire direct versé par le CAT et d'un complément de rémunération à la charge de l'Etat - qui permet de rémunérer les travailleurs handicapés à un niveau supérieur à celui correspondant à leur rendement au travail - est abrogé. Désormais, les intéressés bénéficieront d'une rémunération garantie versée par l'établissement ou le service d'aide par le travail qui les accueillent et qui tiendra compte du caractère à temps plein ou partiel de l'activité qu'ils exercent. Afin de les aider à financer cette rémunération, ces structures recevront, pour chaque personne accueillie, une aide au poste financée par l'Etat (CASF, art. L. 243-4 nouveau). Des textes réglementaires sont toutefois nécessaires pour la mise en place de ce dispositif.
Parallèlement, la loi réaffirme la vocation médico-sociale des centres d'aide par le travail et prévoit qu'un contrat de soutien et d'aide par le travail doit être conclu entre ces structures et la personne handicapée. Il s'agit en fait du contrat de séjour instauré par la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale mais spécifique à ces établissements (CASF, art. L.311-4 modifié) (5).
Surtout, la loi accorde de nouveaux droits à ces publics accueillis en CAT : droit à congé, validation des acquis de l'expérience, bénéfice du congé de présence parentale... (CASF, art. L. 344-2 à L.344-2-3 nouveaux).
Enfin, elle améliore les passerelles entre le milieu ordinaire et le milieu protégé (CASF, art. L. 344-2-4 et L. 344-2-5 nouveaux).
L'architecture institutionnelle introduite, pour l'essentiel, en seconde lecture au Sénat, après les conclusions du rapport Briet-Jamet (6), dont la loi ne s'inspire finalement qu'en partie, porte sur les missions de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, le rôle des maisons départementales des personnes handicapées et des commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. Relevons que les actuelles commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel (Cotorep) et les commissions départementales de l'éducation spéciale (CDES) seront regroupées au sein des commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées.
Afin « d'offrir un accès unique aux droits et prestations » et de leur ouvrir « toutes les possibilités d'appui dans l'accès à la formation età l'emploi et à l'orientation vers desétablissements et services ainsi que de faciliter les démarches des personnes handicapées et de leur famille », la loi prévoit la création dans chaque département d'une maison départementale des personnes handicapées (CASF, art. L. 146-3 à L. 146-13 nouveaux). Cette dernière, qui doit se mettre en place, selon la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, au plus tard pour le 1er janvier 2006 et, d'après le président de la République, « dans les meilleurs délais », est organisée sous forme d'un groupement d'intérêt public dont le département assure la tutelle administrative et financière. Elle exercera une mission d'accueil, d'information, d'accompagnement et de conseil des personnes handicapées et de leur famille ainsi que de sensibilisation de tous les citoyens à la problématique du handicap (CASF, art. L. 146-3-1 nouveau).
Elle organisera notamment le fonctionnement de l'équipe pluridisciplinaire chargée d'évaluer les besoins de compensation de la personne handicapée et son incapacitépermanente sur la base de son projet de vie et de proposer un plan personnalisé de compensation du handicap (CASF, art. L. 146-8 nouveau). L'équipe se rendra sur le lieu de vie de l'intéressé, de sa propre initiative ou à la demande de celui-ci, et l'entendra, dans les mêmes conditions, ainsi que, le cas échéant, ses parents s'il est mineur ou son représentant légal.
De même, la maison des personnes handicapées organisera le fonctionnement de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (voir ci-dessous).
Chaque maison départementales des personnes handicapées gérera, par ailleurs, un fonds départemental de compensation du handicap chargéd'accorder des aides financières pour permettre aux personnes handicapées de faire face aux frais de compensation restantà leur charge, après déduction de la prestation de compensation (CASF, art. L. 146-5 nouveau).
Ces structures devront, de plus, mettre à la disposition, pour les appels d'urgence, un numéro téléphonique en libre appel gratuit pour l'appelant, y compris depuis un téléphone mobile (CASF, art. L. 146-7 nouveau).
Par ailleurs, pour faciliter la mise en œuvre des droits et sans préjudice des voies de recours existantes, une personne référente sera désignée au sein de chaque maison départementale des personnes handicapées (CASF, art. L. 146-13 nouveau). Sa mission sera de recevoir et d'orienter les réclamations individuelles des personnes handicapées ou de leurs représentants vers les autorités et services compétents. Celles mettant en cause une administration, une collectivité territoriale, unétablissement public ou tout autre organisme investi d'une mission de service public seront transmises par elle au médiateur de la République.
Dans le même esprit, une procédure de conciliation interne devra être mise en place au sein de la maison départementale en cas de contestation des décisions de la commission des droits et de l'autonomie (CASF, art. L. 146-10 nouveau) (voir ci-dessous).
Enfin, la loi prévoit la création dans chaque maison départementale d'une équipe de veille pour les soins infirmiers qui a pour mission d'évaluer les besoins de prise en charge de soins infirmiers, de mettre en place les dispositifs pour y répondre et de gérer un service d'intervention d'urgence auprès des personnes handicapées (CASF, art. L. 146-11 nouveau).
Dans chaque département, une commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées - regroupant Cotorep et CDES - prendra, sur la base de l'évaluation réalisée par l'équipe pluridisciplinaire des souhaits exprimés par la personne handicapée et par son représentant légal dans son projet de vie et du plan personnalisé de compensation, les décisions relativesà l'ensemble des droits de cette personne (CASF, art. L. 146-9 nouveau). Elle sera ainsi compétente pour se prononcer sur l'orientation de l'intéressé et les mesures propres à assurer son insertion scolaire ou professionnelle et sociale, pour désigner les structures correspondant à ses besoins et apprécier le droit à diverses prestations. C'est encore elle qui reconnaîtra, s'il y a lieu, la qualité de travailleur handicapé et qui statuera sur l'accompagnement des personnes handicapées âgées de plus de 60 ans hébergées dans les structures pour adultes handicapés (CASF, art. L. 241-6 nouveau).
La composition et le fonctionnement de cette commission sont détaillés par la loi (CASF, art. L. 241-5 à L.241-11 nouveaux).
Sans préjudice des voies de recours devant la juridiction du contentieux technique de la sécurité sociale ou devant les juridictions administratives selon les cas, lorsqu'une personne handicapée, ses parents si elle est mineure ou son représentant légal estimeront qu'une décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées méconnaît ses droits, ils pourront demander l'intervention d'une personne qualifiée, figurant sur une liste établie par la maison départementale et chargée de proposer des mesures de conciliation (CASF, art. L. 146-10 nouveau).
Créée par la loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie fait l'objet de nombreuses dispositions, introduites essentiellement lors de la seconde lecture au Sénat, détaillant ses missions, son organisation et ses financements (CASF, art. L. 14-10-1 àL. 14-10-8 nouveaux ou modifiés). Rappelons que pour préparer ce pan de la loi, le gouvernement avait fait appelà Raoul Briet, conseiller maître à la Cour des comptes, et à Pierre Jamet, directeur général des services du département du Rhône.
Au titre de ses missions, la caisse aura à contribuer au financement de l'accompagnement de la perte d'autonomie des personnes âgées et handicapées, à domicile et en établissement. Elle devra également assurer la répartition équitable sur le territoire du montant total de dépenses fixé par l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour les personnesâgées et handicapées, en veillant notamment àune prise en compte de l'ensemble des besoins pour toutes les catégories de handicaps. Elle a aussi des missions d'expertise, d'information et de conseil ainsi que d'échanges avec différentes instances, en particulier avec les maisons départementales du handicap, qui sont détaillées (CASF, art. L. 14-10-1 nouveau).
Cette caisse sera dotée d'un conseil et d'un directeur, un conseil scientifique devant les assister (CASF, art. L. 14-10-3 nouveau).
Un article de la loi retrace par ailleurs les ressources et les charges de la caisse qui sont réparties en six sections, ce dispositif entrant en vigueur le 1er janvier 2006 (CASF, art. L. 14-10-5 nouveau). Un autre article précise les modalités de répartition du concours de la caisse versé aux départements au titre de la prestation de compensation (CASF, art. L. 14-10-7 nouveau).
En présentant la loi le 8 février, Jacques Chirac a indiqué que cette instance, qui pourrait être confiée à Denis Piveteau, maître des requêtes au Conseil d'Etat, devrait être mise en place « dans les 3 mois » .
La loi réaffirme de manière plus claire le principe de non-discrimination en raison du handicap dans le cadre professionnel. Parallèlement, elle précise que des différences de traitement fondées sur l'inaptitude constatée par le médecin du travail en raison de l'état de santé ou du handicap ne constituent pas des discriminations lorsqu'elles sont « objectives, nécessaires et appropriées » (code du travail [C. trav.], art. L. 122-45-4 nouveau).
Pour garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des travailleurs handicapés, les employeurs devront prendre, en fonction des besoins dans une situation concrète, les « mesures appropriées » pour permettre aux personnes handicapées bénéficiaires de l'obligation d'emploi d'accéder à un emploi ou de le conserver, de l'exercer ou d'y progresser ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée. L'application de ce principe ne doit toutefois pas entraîner des charges disproportionnées (C. trav., art. L. 323-9-1 nouveau).
Une traduction concrète de ces mesures appropriées est inscrite dans la loi : la possibilité pour ces salariés de bénéficier d'aménagements d'horaires individualisés propres à faciliter leur accès à l'emploi, leur exercice professionnel ou le maintien dans leur emploi (C. trav., art. L. 212-4-1-1 nouveau).
Ce principe de l'égalité de traitement vaut tant dans le secteur privé que dans la fonction publique (loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligation des fonctionnaires, art.6 sexies nouveau). En outre, le gouvernement devra déposer chaque année sur le bureau des assemblées parlementaires un rapport sur la situation de l'emploi des personnes handicapées dans chacune des trois fonctions publiques (loi du 13 juillet 1983, art. 23 bis nouveau).
Plusieurs mesures en faveur de l'emploi concernent le secteur privé.
Ainsi, la loi introduit la problématique des travailleurs handicapés (accès à l'emploi, à la formation, conditions de travail) dans le cadre des négociations collectives, tant au niveau de la branche - tous les 3 ans -que de l'entreprise - tous les ans (C. trav., art. L. 132-12 et L. 132-27 modifiés).
Au-delà, elle cherche à améliorer l'articulation des mesures spécifiques en faveur des personnes handicapées avec la politique générale de l'emploi. A cette effet, elle légalise et encadre la convention d'objectifs conclue entre l'Etat et le Fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) (C. trav., art. L. 323-8-3 nouveau).
Par ailleurs, une convention de coopération devraêtre conclue entre l'Agefiph et le nouveau fonds d'insertion professionnelle des personnes handicapées dans la fonction publique (voir ci-dessous) (C. trav., art. L. 323-10-1 nouveau).
Autre mesure : la loi vise à clarifier la place des organismes de placement spécialisés dans la politique d'insertion professionnelle des personnes handicapées (C. trav., art. L. 323-11 nouveau).
Tout un pan de la loi est également consacré àl'obligation d'emploi des travailleurs handicapés. Ces mesures entreront en vigueur le 1er janvier 2006. Elle en maintient le principe mais en étend le bénéfice aux titulaires de la carte d'invalidité et aux bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés. Par ailleurs, le mode de décompte des bénéficiaires et les modalités de calcul de l'effectif global de l'entreprise sont simplifiés (C. trav., art. L. 323-4 nouveau).
Surtout, la loi pose le principe de la modulation du montant de la contribution à l'Agefiph versée par les entreprises qui ne s'acquittent pas de leur obligation d'emploi par l'embauche directe de personnes handicapées (C. trav., art. L. 323-8-2 nouveau). Cette modulation tiendra compte des efforts de l'entreprise en matière de maintien dans l'emploi ou de recrutement direct de personnes handicapées. Le plafond de la contribution est également relevé de 500 à 600 fois le SMIC horaire par bénéficiaire de l'obligation d'emploi non employé. Pour les entreprises qui n'ont occupé aucun bénéficiaire de l'obligation d'emploi pendant plus de 3 ans, la limite de la contribution est portéeà 1 500 fois le SMIC horaire.
Enfin, la loi transforme les ateliers protégés en entreprises adaptées, leur reconnaissant une place spécifique mais à part entière dans le milieu du travail ordinaire. Elle supprime, comme pour les centres d'aide par le travail, le mécanisme de la garantie de ressources et définit le nouveau régime de ces structures qui ne sera applicable qu'à compter du 1er janvier 2006 (C. trav., art. L. 323-29 à L. 323-33 nouveaux ou modifiés).
Comme dans le secteur privé, l'Etat et les employeurs publics occupant plus de 20 agents sont soumis à une obligation d'emploi des travailleurs handicapés. Mais il n'existait jusqu'à présent pas d'instance similaireà l'Agefiph pour le secteur public qui échappait àtoute sanction en cas de non-respect de cette obligation. C'est pourquoi la loi prévoit l'instauration d'un fonds pour l'insertion des personnes handicapées, scindé en trois sections distinctes : fonction publique de l'Etat, territoriale et hospitalière (C. trav., art. L. 323-8-6-1 nouveau). Sa mise en place effective est prévue pour le 1er janvier 2006. Ce fonds sera alimenté par une contribution annuelle des employeurs du secteur public pour chacun des bénéficiaires de l'obligation d'emploi qu'ils auraient dû employer.
Au-delà, le texte prévoit des dispositions pour favoriser l'accès à la fonction publique. Il s'agit, par exemple, d'étendre à l'ensemble des personnes handicapées bénéficiaires de l'obligation d'emploi certains avantages - telle la non-opposabilité des limites d'âge pour l'accès aux grades ou aux emplois publics -accordés jusque-là aux seuls travailleurs handicapés reconnus comme tels par la Cotorep (loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, art. 27 nouveau ; loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, art. 35 nouveau ; loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, art. 27 nouveau).
Ne souhaitant plus opposer l'éducation spéciale àl'éducation ordinaire, la loi gomme tout d'abord ce premier terme des textes existants.
Au-delà du geste symbolique, le texte affirme le devoir du service public de l'éducation, applicable selon la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées dès la prochaine rentrée scolaire, d'assurer une formation scolaire, professionnelle ou supérieure aux enfants, adolescents et aux adultes présentant un handicap ou un trouble de la santé invalidant (code de l'éducation, art. L. 112-1 nouveau). Tout enfant ou adolescent présentant un handicap doit être inscrit dans l'école ou l'établissement scolaire « le plus proche de son domicile, qui constitue son établissement de référence ». Toutefois, dans le cadre de son projet personnalisé, si ses besoins nécessitent qu'il reçoive sa formation au sein de dispositifs adaptés, il peut être inscrit dans une autre école ou un autreétablissement sur proposition de son établissement et avec l'accord de ses parents ou de son représentant légal.
Lorsqu'une scolarisation en milieu ordinaire a étédécidée par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mais que les conditions d'accèsà l'établissement de référence la rendent impossible, les surcoûts imputables au transport de l'enfant ou de l'adolescent handicapé vers un établissement pluséloigné seront à la charge de la collectivitéterritoriale compétente pour la mise en accessibilité des locaux.
Afin que lui soit assuré un parcours de formation adapté, chaque intéressé a droit, selon la loi, à une évaluation de ses compétences, de ses besoins et des mesures mises en œuvre dans le cadre de ce parcours, selon une périodicité adaptée à sa situation (code de l'éducation, art. L. 112-2). En fonction des résultats de cette évaluation, le parcours de formation fait l'objet d'un projet personnalisé de scolarisation. Lequel constitue un élément du plan de compensation.
Par ailleurs, la loi instaure dans chaque département des équipes de suivi de la scolarisation qui seront chargées d'assurer le suivi des décisions de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (code de l'éducation, art. L. 112-2-1 nouveau).
Pour garantir l'égalité des chances entre les candidats, des aménagements aux conditions de passation des épreuves orales, écrites, pratiques ou de contrôle continu des examens ou concours de l'enseignement scolaire et de l'enseignement supérieur, rendus nécessaires en raison d'un handicap ou d'un trouble de la santé invalidant, devront être mis en place àcompter du 1er janvier 2006, ce dispositif devantêtre précisé par un décret (code de l'éducation, art. L. 112-4 nouveau).
La loi prévoit par ailleurs les modalités de l'accueil des étudiants handicapés dans les établissements d'enseignement supérieur (code de l'éducation, art. L. 123-4-1 nouveau et L. 916-1 modifié). A l'initiative du gouvernement, la possibilité pour les assistants d'éducation d'exercer des fonctions d'auxiliaires de vie universitaire est ouverte (code de l'éducation, art. L. 916-1 modifié).
Au-delà, la priorité donnée àl'intégration scolaire individuelle ordinaire du jeune handicapé, dès lors que sa santé le permet, est réaffirmée (code de l'éducation, art. L. 351-1 nouveau). A cet égard, les parents sont étroitement associés à la décision d'orientation et peuvent se faire aider de la personne de leur choix. C'est la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées qui la prend, en accord avec les parents (ou le représentant légal). A défaut d'accord, les procédures de conciliation interne prévues dans le cadre des maisons départementales des personnes handicapées ou de recours judiciaires s'appliquent, précise la loi.
Enfin, l'enseignement d'éducation civique devra désormais comporter à l'école primaire et au collège une formation consacrée à la connaissance et au respect des problèmes des personnes handicapées et à leur intégration dans la société (code de l'éducation, art. L. 312-15 nouveau).
La loi modifie l'article L. 111-7 du code de la construction et de l'habitation de manière à ce que le cahier des charges opposable aux constructeurs prenne en compte l'ensemble des handicaps, notamment physique, sensoriel, cognitif, mental ou psychique et non plus le seul handicap moteur (code de la construction et l'habitation [CCH], art. L. 111-7 nouveau).
L'obligation d'accessibilité concerne, en premier lieu, les bâtiments nouveaux, des modalités particulièresétant prévues pour les maisons individuelles (CCH, art. L. 111-7-1 nouveau).
De même, il est prévu d'étendre l'obligation d'accessibilité aux opérations de rénovation des bâtiments ou parties de bâtiments d'habitation existants dans des conditions qui seront fixées par décret. Toutefois, des dérogations motivées peuvent être autorisées en cas d'impossibilité technique ou de contraintes liées à la préservation du patrimoine architectural ou lorsqu'il y a disproportion manifeste entre les améliorations apportées et leurs conséquences (CCH, art. L. 111-7-2 nouveau).
Les établissements existants recevant du public devront répondre aux exigences d'accessibilité dans un délai, fixé par décret, qui pourra varier par type et catégorie d'établissement, sans excéder 10 ansà compter de la publication de la loi (CCH, art. L. 111-7-3 nouveau).
Pour donner du poids à ces principes, la loi les assortit de procédures de contrôle et de sanctions. Par exemple, l'autorité administrative peut décider la fermeture d'un établissement recevant du public qui ne répond pas aux normes d'accessibilité (CCH, art. L.111-8-3-1 nouveau). De même, une collectivitépublique ne pourra accorder une subvention pour la construction, l'extension ou la transformation du gros œuvre d'un bâtiment soumis à ces règles que si le maître d'ouvrage a produit un dossier relatif à l'accessibilité. Elle pourra également exiger le remboursement de cette aide si ce maître d'ouvrage n'est pas en mesure de lui produire, à l'issue des travaux, un document attestant de la prise en compte des règles d'accessibilité. Parallèlement, les sanctions pénales sont renforcées (code pénal, art. L. 152-4 nouveau).
En matière d'accessibilité de la voirie, la loi affirme le principe de la chaîne de déplacement qui comprend le cadre bâti, la voirie, les aménagements des espaces publics, les systèmes de transport et leur intermodalité.
Un calendrier de mise en accessibilité est introduit :les services de transport collectif ont 10 ans àcompter de la publication de la loi pour devenir accessibles aux personnes handicapées et à mobilité réduite. Pour ce faire, les autorités concernées doiventélaborer un schéma directeur d'accessibilité des services dont ils sont responsables, dans les 3 ans àcompter de la publication de la loi.
En cas d'impossibilité technique avérée de mise en accessibilité de réseaux existants, la loi indique que des « moyens de transport adaptés aux besoins des personnes handicapées ou à mobilité réduite doivent être mis à leur disposition ».
En outre, les réseaux souterrains de transports ferroviaires et de transports guidés existants ne sont pas soumis au délai de 10 ans à condition d'élaborer un schéma directeur dans les 3 ans et de mettre en place, toujours dans un délai de 3 ans, des transports de substitution.
Par ailleurs, chaque commune doit établir un plan de mise en accessibilité de la voirie et des aménagements des espaces publics qui s'intègre dans le plan de déplacements urbains quand il existe.
Il est également prévu que l'octroi des aides publiques favorisant le développement des systèmes de transport collectif est subordonné à la prise en compte de l'accessibilité.
Autre mesure : dans les communes de plus de 5 000 habitants, devra être créée à l'initiative du maire une commission communale, voire intercommunale, pour l'accessibilité aux personnes handicapées qui dressera notamment le constat de l'accessibilité dans la commune (code général des collectivités territoriales, art. L. 2143-3 nouveau).
La loi rend enfin obligatoire la constitution d'une annexe particulière traitant de l'accessibilité dans les plans de déplacements urbains (loi du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, art. 28 modifié).
Selon la loi votée le 3 février, les services de communication publique en ligne des services de l'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics qui en dépendent devront être accessibles aux personnes handicapées.
Par ailleurs, le législateur cherche à favoriser l'accès aux loisirs et aux vacances des personnes handicapées. Par exemple, toute personne physique ou morale qui organise, en les réalisant ou en les faisant réaliser, des activités de vacances avec hébergement d'une durée supérieure à 5 jours destinées spécifiquement à des groupes constitués de personnes handicapées majeures devra bénéficier d'un agrément « vacances adaptées organisées », délivré par le préfet de région.
La loi comporte tout un volet consacré à la prévention, la recherche et l'accès aux soins. Dans ce cadre, le principe de la mise en œuvre de politiques de prévention, de réduction et de compensation des handicaps et les moyens nécessaires à leur réalisation est posé (CASF, art. L. 114-3 nouveau).
Un Observatoire national sur la formation, la recherche et l'innovation sur le handicap est créé, chargé de se prononcer sur la coordination des politiques de prévention et de dépistage des problèmes de santé avec la politique de prévention du handicap (CASF, art. L. 114-3-1 nouveau).
Autre nouveauté : les professionnels de santé et du secteur médico-social devront recevoir, au cours de leur formation initiale et continue, une formation spécifique concernant l'évolution des connaissances relative aux pathologies à l'origine des handicaps et les innovations thérapeutiques, technologiques, pédagogiques, éducatives et sociales les concernant (code de santé publique [CSP], art. L. 1110-1-1 nouveau).
Enfin, la loi met en place des consultations médicales de prévention supplémentaires spécifiques pour les personnes handicapées au cours desquelles ces dernières reçoivent une expertise médicale qui leur permet de s'assurer qu'elles bénéficient de l'évolution des innovations thérapeutiques et technologiques pour la réduction de leur incapacité (CSP, art. L. 1411-6 modifié).
Sophie André
La loi prévoit que dans toutes les instances nationales ou territoriales qui émettent un avis ou adoptent des décisions concernant la politique en faveur des personnes handicapées, les représentants des personnes handicapées sont nommés sur proposition de leurs associations en veillant à la présence simultanée d'associations participant à la gestion desétablissements et services sociaux et médico-sociaux pour personnes handicapées et d'associations n'y participant pas (CASF, art. L. 146-1 A. nouveau, art. 1 de la loi) .
Le gouvernement doit organiser, tous les 3 ans, à compter du 1er janvier 2006, une conférence nationale du handicap. A l'issue de ses travaux, il dépose au Parlement un rapport sur la mise en œuvre de la politique nationale en faveur des personnes handicapées (CASF, art. L. 114-2-1 nouveau, art. 3 de la loi) .
Le législateur offre à une personne durablement empêchée, du fait de limitations fonctionnelles des membres supérieurs en lien avec un handicap physique, d'accomplir elle-même des gestes liés àdes soins prescrits par un médecin, la possibilité de désigner, pour favoriser son autonomie, un aidant naturel ou de son choix pour les réaliser (CSP, art. L.1111-6-1 nouveau, art. 9 de la loi) . La personne handicapée et les personnes désignées reçoivent préalablement de la part d'un professionnel de santé uneéducation et un apprentissage adaptés.
La loi allonge la durée du congé de maternité des salariées ayant accouchéplus de 6 semaines avant la date prévue et dont l'enfant nécessite une hospitalisation postnatale prolongée, afin de leur permettre de « participer, chaque fois que possible, aux soins dispensés à [leur] enfant et de bénéficier d'actions d'éducationà la santé préparant le retour àdomicile » (C. trav., art. L. 122-26 modifié, art. 10 de la loi) . Cette disposition qui figurait dans la loi de financement de la sécuritésociale pour 2005 avait été censurée par le Conseil constitutionnel au motif qu'elle n'avait aucun rapport avec l'objet de cette loi (7).
Le droit à un départ anticipé en retraite accordé par la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites aux salariés handicapés est étendu aux agents handicapés de la fonction publique (art. 28 de la loi) .
L'accompagnement des personnes aveugles par des chiens guides et ses conséquences sont pris en compte, notamment dans les transports (art. 53 et 54 de la loi) .
La loi prévoit l'élaboration d'un nouvel outil de coordination de la politique en faveur des personnes âgées dépendantes et des personnes handicapées établi par le préfet de région : le programme interdépartemental d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie (CASF, art. L. 312-5-1 nouveau, art.58) .
Les modalités d'attribution des cartes spécifiquement destinées aux personnes handicapées - carte d'invalidité, carte portant la mention « station debout pénible » et carte de stationnement - sont simplifiées (CASF, art. L. 241-3 à L. 241-3-2 nouveaux ou modifiés, art. 65 de la loi) .
Tous les 2 ans, le représentant de l'Etat dans le département devra adresser au président du conseil général et au conseil départemental consultatif des personnes handicapées un rapport sur l'application du dispositif issu de l'amendement dit« Creton » (poursuite de l'accueil de jeunes adultes handicapés dans des structures pour enfants en cas de défaut de places dans un établissement pour adultes). Au vu de ce rapport, toutes les dispositions devront être prises« en suffisance et en qualité » pour créer, selon une programmation pluriannuelle, les places enétablissement nécessaires à l'accueil des jeunes personnes handicapées âgées de plus de 20 ans (CASF, art. L. 242-4 modifié, art. 67 de la loi) .
Toute personne isolée bénéficiant de l'allocation d'éducation spéciale assortie d'un complément et assumant seule la charge d'un enfant handicapé dont l'état nécessite le recours à une tierce personne a droit à une majoration spécifique pour parent isolé d'enfant handicapé (CSS, art. L. 541-4 nouveau, art. 68 de la loi) .
Le droit de vote est ouvert aux majeurs sous tutelle sous réserve de l'autorisation du juge des tutelles (art. 71 de la loi) .
La loi pose le principe du droit pour les personnes handicapées de voter de manière autonome, quel que soit leur handicap (art. 72 et 73 de la loi) .
Des dispositions spécifiques pour les personnes malentendantes ou sourdes, notamment en matière d'accès aux programmes de télévision, d'enseignement de la langue des signes ou dans le cadre de procédures judiciaires, sont introduites (art. 74à 78 de la loi) .
Dans un délai de un an, le gouvernement doit présenter un plan des métiers qui aura pour ambition de favoriser la complémentarité des interventions médicales, sociales, scolaires au bénéfice de l'enfant, de l'adolescent et de l'adulte présentant un handicap ou un trouble de santéinvalidant (art. 79 de la loi) . Marie-Anne Montchamp a promis que ce devrait être chose faite au printemps prochain.
Les aidants familiaux, les bénévoles associatifs et les accompagnateurs non professionnels intervenant auprès de personnes handicapées se voient accorder le droit de bénéficier d'une formation (art. 80 de la loi) .
La loi vise à rendre le contrat de rente de survie plus attractif au niveau fiscal dans l'objectif de favoriser la solidarité familiale en faveur des personnes handicapées (art. 85 de la loi) .
Les commissions départementales des travailleurs handicapés, des mutilés de guerre et assimilés sont supprimées (art. 86 de la loi) .
La mise en place d'un recueil régulier d'informations statistiques sur les populations handicapées est prévu (art. 88 de la loi) .
Les parlementaires ont inclus les personnes handicapées dans le champ de la convention Belorgey sur les risques de santé aggravés pour favoriser leur accès au crédit et à l'assurance (art.91) .
Une « étape essentielle », « à concrétiser » , pour l'APF. Des « avancées indéniables mais des craintes persistantes » pour l'Unapei. Une« désillusion » confirmée pour l'APAJH. Après le vote de la loi pour l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées, la gamme des appréciations est très large au sein du monde associatif. Cependant, personne ne parle d'étape historique, contrairementà ce que beaucoup espéraient après l'annonce du« grand chantier » du président de la République, le 14 juillet 2002.
La Fédération nationale des malades et handicapés relève le parcours « assez chaotique » du projet de loi, marqué par des avancées, des reculs et des désaveux entre les deux chambres, mais aussi par des amendements importants du gouvernement à son propre texteà toutes les étapes de la discussion. Face à cela, les associations avaient d'abord réussi à s'exprimer d'une seule voix au travers du Comité d'entente puis du Comité national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), à la fois sur leurs aspirations communes et sur leurs critiques des premiers textes. Elles ont fini par diverger sur la tactique à adopter, les unes continuant de batailler piedà pied pour obtenir des améliorations - manifestationsà l'appui de la part de l'APF qui estime s'être« fait entendre » -, les autres décrochantà mi-parcours pour créer un « Collectif pour la refondation de la loi de 1975 », jugeant le texte« structurellement inadapté et inamendable », quitte à défendre quand même par la suite un amendement sur le point très sensible de la scolarité...
Alors, bien sûr, il y a des avancées que tout le monde reconnaît, franchement ou du bout des lèvres. Parmi les plus citées figurent le début de concrétisation du droit à compensation, l'affirmation plus nette du droit àla scolarisation, l'extension au secteur public des obligations d'emploi faites au secteur privé, les délais enfin imposés, après moult hésitations, à la mise en accessibilité de tous les bâtiments, voiries et moyens de transports ouverts au public, la reconnaissance du handicap psychique, l'amélioration du statut d'aidant familial, l'extension du droit à la retraite anticipée, l'amélioration des droits sociaux des personnes en institution, notamment l'augmentation de leur « resteà vivre ». L'ensemble des associations saluent aussi la promesse de la suppression des barrières d'âge, du moins entre enfants et adultes handicapés, qu'elles réclamaient. Moins nombreuses sont celles qui se montrentégalement favorables à une réflexion sur« la compensation des incapacités à toutâge », qui engloberait personnes âgées et handicapées.
Il y a aussi des regrets, largement partagés. Par exemple sur le fait que seuls les salariés aient été mis àcontribution pour le « jour de solidarité », pas l'ensemble de la collectiviténationale. Ou que le droit à compensation reste soumis non seulement à un « tarif de responsabilité » mais aussi à des conditions de ressources. Signe, parmi d'autres, que « la logique d'aide sociale n'a pas complètement cédé la placeà celle de protection sociale », comme le dit l'Unapei. Quant au montant des ressources, porté dans certaines conditions à 80 % du SMIC, il reste« insuffisant » pour permettre d'accéderà l'autonomie, pour la FNATH comme pour l'APF, laquelle attend aussi de savoir « quelles personnes bénéficieront réellement de cette mesure et àquelle hauteur ».
L'heure est désormais à la rédaction des décrets, à laquelle Marie-Anne Montchamp veut associer parlementaires... et associations, qui promettent, selon la formule consacrée, de « se montrer vigilantes ». Ce sera l'occasion, pour l'Unapei, de vérifier que« les moyens nécessaires accompagnent les décisions ».
Plusieurs chantiers importants sont aussi ouverts pour le court ou le moyen terme. L'Education nationale doit traduire concrètement les engagements du gouvernement sur la scolarisation. L'APAJH a entraîné dans son sillage les principaux syndicats d'enseignants et les fédérations de parents d'élèves afin de pousser ensemble en ce sens. Il faut également que les pouvoirs publics s'attaquent rapidementà la mise en accessibilité : l'Uncass suggère de réunir une table ronde des partenaires financiers potentiels, les collectivités locales ne pouvant être« seules à assumer cette responsabilité ».
Reste aussi aux départements à mettre sur pied, et rapidement, les maisons du handicap. Il faut qu'elles agissent dans la proximité, en s'appuyant notamment sur les centres communaux d'action sociale, rappelle l'APF. Et que les équipes pluridisciplinaires d'évaluation aient les capacités, les moyens et « l'indépendance par rapport aux considérations financières » pour se mettre réellement à l'écoute des projets individuels, ajoute- t-elle. De son côté, l'Assemblée des départements de France s'inquiète du nombre de personnes concernées par le droit à compensation, de l'ampleur des besoins qui vont s'exprimer, alors que la CNSA n'aura qu'une enveloppe fermée à répartir. Le Comité des démocrates handicapés va dans le même sens en soulignant l'absence d'évaluation des besoins, du coût de la compensation et de la mise en accessibilité, et en annonçant une « bombe àretardement » .
Demeure également le problème de la représentativité même des associations, contestée par quelques groupes et par le sénateur Nicolas About, qui les soupçonnent de faire passer leurs intérêts de gestionnaires d'établissements avant la défense des personnes. La question sera examinée dans l'année, a indiqué Marie-Anne Montchamp, en commençant par la poser au CNCPH. Lequel s'en saisira... quand il aura obtenu quelques moyens pour fonctionner. Toujours sans secrétariat, ni téléphone, ni boîte aux lettres depuis sa nomination en janvier 2003, son président, Jean-Marie Schléret, a décidé de ne plus tenir de réunion plénière tant qu'il n'aura pas obtenu ce minimum vital. Il veut aussi être rattaché à la délégation interministérielle aux personnes handicapées et non plus à la direction générale de l'action sociale, dont il peut être amené àcritiquer les textes... en toute autonomie. Cela aussi fait partie des décrets promis par la ministre - et très attendus.
Marie-Jo Maerel
(1) Voir ASH n° 2344 du 30-01-04.
(2) Voir ASH n° 2360 du 21-05-04 et n° 2362 du 4-06-04.
(3) Voir ASH n° 2368 du 16-07-04.
(4) Voir ASH n° 2253 du 8-03-02.
(5) Voir ASH n° 2384 du 3-12-04.
(6) Voir ASH n° 2368 du 16-07-04.
(7) Voir ASH n° 2387 du 24-12-04.