« De la potence à la pitié » - selon l'expression de Bronislaw Geremek -, puis à la prise en compte politique de la question sociale, avec l'adoption, au cours du XIXesiècle, de différentes lois fixant les cadres généraux de l'assistance publique, le social s'est progressivement démarqué de la charité. Quant aux premières formes de travail social, elles apparaissent dès 1896, avec l'œuvre des « maisons sociales », défendue par Marie-Jeanne Bassot, et sous l'impulsion de personnalités comme la féministe chrétienne Marie Maugeret, qui affirmait le devoir social des femmes.
Construit au croisement d'une triple histoire - celle de l'assistance familiale avec les assistantes sociales, de l'éducation de jeunes inadaptés (éducateurs spécialisés) et de l'animation (animateurs socio-culturels) -, le travail social regroupe aujourd'hui de nombreuses professions qui se sont progressivement structurées. C'est cette « histoire des histoires des métiers du social » que retracent les auteurs, interrogeant l'évolution et l'éclatement du secteur. Des figures « canoniques » aux nouveaux acteurs apparus avec la multiplication des politiques sociales et la décentralisation, les professions sociales constituent une « nébuleuse » dont témoigne le succès de la notion d' « intervention sociale », recouvrant un champ professionnel aux contours flous. « Division du travail social, affaiblissement de son monopole, irruption d'autres fonctions et métiers, déstabilisation des normes collectives d'action » : c'est aussi cette mutation d'un secteur en perpétuelle redéfinition qui est, ici, en question.
Histoire des métiers du social en France - Emmanuel Jovelin, Brigitte Bouquet - Editions ASH - 20 €.