Les maires ont aujourd'hui pratiquement toutes les cartes en main pour mettre en œuvre le nouveau régime de validation de l'attestation d'accueil, ce document nécessaire aux étrangers non européens désireux d'obtenir un visa pour une visite à caractère familial ou privé d'une durée inférieure ou égale à trois mois sur le territoire français. Le jour même de la parution du décret durcissant les conditions d'obtention de l'attestation (1), Dominique de Villepin transmettait en effet une circulaire aux préfets pour leur faire part de la nouvelle réglementation.
Revenant tout d'abord sur le champ d'application de cette attestation d'accueil « nouvelle formule », le pensionnaire de la Place Beauvau distingue clairement les courts séjours revêtant un caractère familial ou privé - seuls concernés par l'attestation d'accueil - d'une part, et les séjours touristiques effectués avec des organismes de voyage ou à l'hôtel, ou encore les séjours professionnels à l'invitation d'une entreprise, d'autre part.
Dominique de Villepin fait également le point sur les catégories d'étrangers dispensés de l'obligation de produire une attestation d'accueil. Le décret a évoqué leur cas : les étrangers qui souhaitent effectuer un séjour à caractère humanitaire ou d'échange culturel, ceux qui demandent à se rendre en France pour une cause médicale urgente ou en raison des obsèques ou de la maladie grave d'un proche font partie des populations concernées. Mais, rappelle le ministre, il en est de même pour, entre autres, les ressortissants européens, les diplomates, les étrangers titulaires d'un visa portant la mention « famille de Français », ainsi que ceux qui disposent d'un visa de circulation ou encore d'un visa portant la mention « carte de séjour à solliciter dès l'arrivée en France ».
Le maire de la commune du lieu d'hébergement est la seule autorité habilitée à valider et à délivrer les attestations d'accueil. Cela signifie, précise le ministre de l'Intérieur, qu'il n'est plus possible pour l'hébergeant qui souhaite, par exemple, accueillir l'étranger dans une résidence secondaire située dans une autre commune que celle de sa résidence principale de se présenter au maire de la commune de son domicile plutôt qu'à l'édile du lieu d'hébergement de l'étranger.
Condition sine qua non à la validation du document : la présentation personnelle de sa demande par l'hébergeant. Il remplit ainsi sur place un « formulaire sécurisé » (2) qui lui est remis au guichet en un seul exemplaire. Le ministre insiste : « le formulaire vierge ne saurait en aucun cas être remis au demandeur et tout dispositif de la sorte invitant le demandeur à retourner en mairie le [document] rempli par ses soins est à proscrire, afin d'éviter toute utilisation frauduleuse de formulaires vierges ».
Dominique de Villepin souligne que la période indiquée sur le document devra désormais « strictement coïncider avec celle du séjour figurant sur le visa ». « Les maires devront dans ces conditions appeler l'attention du demandeur de l'attestation d'accueil sur la nécessité qui lui incombe de formuler cette demande suffisamment à l'avance, afin que l'attestation délivrée puisse parvenir à son destinataire dans un délai compatible avec celui requis pour l'obtention du visa. »
Si l'hébergeant n'est pas en principe tenu de produire des pièces justificatives pour prouver la réalité des renseignements qu'il fournit sur l'étranger qu'il souhaite accueillir, le ministre indique qu'il en est toutefois tout autrement si l'attestation d'accueil est demandée pour un ou des enfants mineurs non accompagnés par les parents. Le demandeur devra en effet produire dans ce cas une attestation émanant du ou des détenteurs de l'autorité parentale, établie sur papier libre, précisant l'objet et la durée du séjour de l'enfant ainsi que la personne à laquelle est confiée la garde temporaire à cette occasion, personne qui devra être le demandeur.
Autre précision : seuls le conjoint et les enfants mineurs de l'étranger accueilli peuvent figurer sur une même attestation d'accueil. Pour tout autre membre de la famille, ami ou proche, d'autres attestations devront être demandées.
En tout état de cause, le maire peut imposer au demandeur d'une attestation d'accueil qu'il produise les documents originaux des pièces justificatives exigées. A charge pour les services municipaux d'en faire des photocopies à conserver dans le dossier.
Chaque demande de validation d'attestation d'accueil donne dorénavant lieu à la perception d'une taxe de 15 € perçue au profit de l'Office des migrations internationales (OMI). Il s'agit en fait d'un timbre fiscal que les intéressés peuvent se procurer « dans les lieux de délivrance habituels (débitants de tabac, comptables des impôts, comptables du Trésor, comptables des douanes et des droits indirects et régisseurs de recette des préfectures et sous-préfectures) ». Ils doivent produire cette pièce dès le dépôt de la demande de validation - un emplacement est prévu à cet effet sur le formulaire - car la taxe est due même s'ils se voient, in fine, opposer un refus.
La demande de validation doit être accompagnée, en outre, de l'engagement de l'hébergeant à prendre en charge les frais de séjour en France de l'étranger accueilli au cas où celui-ci n'y pourvoirait pas. Un engagement qui, précise le ministre, doit couvrir un montant correspondant au montant journalier du SMIC, multiplié par le nombre de jours de présence de l'intéressé sur le territoire national. Les maires, qui vérifient entre autres choses les ressources du demandeur, ont donc à cet égard un rôle essentiel à jouer afin, souligne Dominique de Villepin, « d'éviter que des personnes aux ressources manifestement insuffisantes puissent se déclarer garantes de l'accueil d'une ou plusieurs personnes qui n'auraient très vraisemblablement d'autres moyens de subvenir à leurs besoins que le travail clandestin et le maintien irrégulier sur le territoire au-delà de la durée de court séjour ».
Quant à l'attestation d'assurance médicale, exigée par la loi, elle n'a pas à être produite au moment du dépôt de la demande de validation, et ce qu'elle soit souscrite par l'hébergeant ou par l'hébergé. Toutefois, précise le ministre, les maires devront interroger le demandeur, pour remplir le formulaire, sur son intention de laisser l'hébergé souscrire lui-même l'assurance requise ou, comme le lui autorise la loi, de s'acquitter de cette obligation à son profit.
Le ministre de l'Intérieur demande encore aux préfets de rappeler aux maires qu'ils ne sont nullement tenus de valider l'attestation d'accueil en présence du demandeur, « notamment s'ils jugent utile de procéder à une instruction détaillée du dossier de demande ou s'ils envisagent de diligenter une enquête domiciliaire dans les lieux mêmes de l'hébergement déclaré ». Ces cas devraient du reste, selon le ministre, « devenir la règle ». « La délivrance immédiate n'étant plus qu'exceptionnelle », un récépissé de dépôt sera remis au demandeur. Ce reçu portera le cachet de l'autorité sollicitée, la mention « reçu valant preuve de dépôt d'une attestation d'accueil à valider », ainsi que l'indication que, en cas de réponse négative ou à défaut de réponse de l'édile dans un délai de un mois, le demandeur peut former un recours devant le préfet dans un délai de deux mois à compter du refus explicite ou implicite.
Le maire qui souhaite vérifier préalablement à la validation de l'attestation d'accueil que l'étranger peut être accueilli dans un logement décent et dans des conditions normales d'occupation peut, comme le prévoit la loi, demander à l'OMI ou à ses agents des services chargés des affaires sociales ou du logement spécialement habilités d'accomplir cette tâche. Le ministre écarte expressément tout recours à la police municipale pour cette mission mais autorise en revanche les maires des communes qui ne disposeraient pas d'un service chargé des affaires sociales ou du logement à habiliter « tout agent intervenant dans des domaines d'activité placés sous son autorité hiérarchique en qualité d'agent de l'Etat ».
La loi prévoit très précisément les situations pouvant aboutir à un refus de validation de l'attestation d'accueil. Ainsi, tel sera le cas si l'hébergeant n'a pu présenter les justificatifs requis, s'il apparaît qu'il ne peut manifestement pas accueillir l'intéressé dans des conditions normales de logement, s'il a porté des mentions inexactes sur le document ou encore s'il apparaît qu'il s'est déjà rendu coupable, dans le passé, d'un détournement de procédure. Le ministre considère pour sa part qu' « il va de soi » que même si toutes les pièces justificatives sont produites, le maire est libre de refuser de valider l'attestation si, à l'issue de l'examen de ces pièces et/ou d'une éventuelle visite domiciliaire, « il apparaît que l'attestation sollicitée tend à constituer un détournement de procédure ».
L'hébergeant peut toujours contester le refus de validation devant le tribunal administratif. Mais, passage obligé avant tout recours contentieux, il devra d'abord exercer un recours auprès du préfet territorialement compétent dans un délai de deux mois à compter du refus. Celui qui saisirait directement le juge sans passer par le préfet verrait sa demande automatiquement déclaré irrecevable. Le préfet peut soit rejeter le recours, soit valider l'attestation d'accueil, le cas échéant après vérification par l'OMI des conditions prévues par la loi. Du reste, il peut, en tout état de cause, réformer les décisions des maires indépendamment de toute requête, « en fonction de la connaissance [qu'il pourrait] avoir de leur façon d'instruire les demandes d'attestations d'accueil », tout particulièrement dès lors qu'ils ont accès aux fichiers des demandes de validation d'attestation mis en place par les édiles.
Signalons enfin qu'en cas de validation de l'attestation d'accueil, c'est à l'hébergeant de transmettre le document à l'étranger qu'il entend accueillir, afin que ce dernier puisse présenter ce document au consulat auprès duquel il déposera sa demande de visa et aux autorités de contrôle aux frontières au moment de sa demande d'entrer sur le territoire national.
(1) Voir ASH n° 2383 du 26-11-04.
(2) Les nouveaux formulaires d'attestation d'accueil ne peuvent pas encore, pour des questions de délais d'impression, être livrés aux mairies. En attendant, les communes sont invitées à utiliser les formulaires dont elles disposent aujourd'hui, en y apportant de manière manuscrite les mentions complémentaires figurant sur le nouvel imprimé prochainement utilisé : lien de parenté entre l'étranger et l'hébergeant, attestations d'accueil antérieurement signées par ce dernier, renseignements relatifs au domicile principal ou secondaire, intention de l'hébergeant d'assurer ou non la personne accueillie, etc.