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Les propositions du CNH pour solvabiliser les locataires et sécuriser les bailleurs

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Le ministre délégué au logement et à la ville, Marc-Philippe Daubresse, l'a répété tout au long de l'année : il attendait « avec un intérêt non dissimulé » les conclusions du groupe de travail du Conseil national de l'habitat (CNH) chargé de plancher sur le thème de la « garantie des risques locatifs ». La balle est désormais dans le camp du gouvernement. Car plus d'un an après le lancement de ses travaux, le groupe présidé par Jean-Luc Berho, secrétaire confédéral CFDT en charge du logement, a remis son rapport (1) le 24 novembre au ministre.

Le constat dressé en introduction est connu : de plus en plus de personnes ont du mal à devenir locataires, faute de pouvoir présenter des garanties suffisantes aux yeux des propriétaires. Comment mieux solvabiliser les premières et sécuriser ainsi les bailleurs ? Les propositions formulées par le groupe de travail - dont certaines ont un air de déjà-vu avec celles soumises il y a plus de deux ans par le CNH au gouvernement Jospin (2) - sont multiples, allant d'une réforme des aides personnelles au logement à la création d'un fonds de garantie.

Renforcer les aides personnelles au logement

Conçues à la fois pour solvabiliser les ménages face à leurs dépenses de logement et pour prévenir le risque d'impayé de loyers et de charges locatives, les aides personnelles au logement constituent, pour le groupe de travail, la « colonne vertébrale », le « socle du système global de garantie des risques locatifs ». Partant de là, « dans un contexte de précarisation croissante », il lui apparaît nécessaire d'en renforcer la portée. Le rapport formule dans cette optique pas moins de dix propositions. En premier lieu, comme le demande un très grand nombre d'acteurs du logement (3), il préconise d'ouvrir le droit aux aides dès le mois d'entrée dans les lieux et non plus un mois après le paiement du premier loyer. « L'existence de ce mois de carence est particulièrement pénalisante pour les ménages, leur budget à l'entrée dans le logement étant déjà largement grevé par les dépenses liées à l'emménagement. » Avec comme conséquence d'inciter les ménages à recourir au crédit pour se meubler, voire pour payer leur premier loyer. Autre revendication associative reprise à son compte par le groupe de travail : l'indexation des loyers-plafonds des aides sur l'indice du coût de la construction (ICC). Explication : au cours des dernières années, ces loyers-plafonds ont fait l'objet de réévaluations inférieures à l'augmentation des loyers, qui, dans le secteur libre, sont revalorisés selon l'évolution de l'ICC. « Il s'ensuit donc une augmentation du taux d'effort des ménages, le pouvoir d'achat des aides diminuant. » Le rapport propose encore de systématiser le versement des aides personnelles au logement en tiers payant (4) - un mode de paiement vu comme « un argument supplémentaire pour convaincre les bailleurs de louer leur logement à des personnes qui ne présentent pas toujours toutes les garanties recherchées » - ou encore de revaloriser les aides annuellement au 1er janvier plutôt qu'au 1er juillet. La revalorisation étant en pratique décidée beaucoup plus tard que sa mise en œuvre - elle-même rétroactive -, ce système « pénalise notamment les bénéficiaires pendant l'été et les maintient dans l'incertitude ». Le groupe de travail plaide également pour une majoration du forfait charges en fonction des revenus - actuellement « très en deçà des charges réelles supportées par les locataires » -, une augmentation des loyers-plafonds de 5 %, voire davantage pour les familles nombreuses, ou encore la suppression du dispositif d'évaluation forfaitaire des ressources. Jugeant par ailleurs sévèrement les mesures d'économies décidées cette année par le gouvernement (5), le groupe de travail critique en particulier- comme certaines associations familiales (voir ce numéro) -la majoration du seuil de non-versement des aides, passé de 15 €à 24 €. Une mesure qui, selon le rapport, se traduit par une « sortie » de 115 000 ménages. Le groupe de travail suggère encore de prendre en compte, dans le calcul des aides au logement, les enfants à charge pour chaque parent en cas de séparation et de garde alternée. Enfin, il prône l'ouverture de l'aide aux organismes logeant à titre temporaire des personnes défavorisées (ALT) aux demandeurs d'asile, dès leur déclaration en préfecture.

Le rapport s'est aussi arrêté sur les autres dispositifs actuels d'aide aux locataires comme le fonds de solidarité pour le logement (FSL), qui couvre les accidents de parcours résidentiels des populations les plus démunies. Inquiet des conséquences de la décentralisation des FSL, le groupe de travail juge ainsi essentiel que les fonds financent l'aide à la médiation locative (voir ce numéro). « Le financement de ce dispositif ne peut être facultatif comme cela est inscrit dans la loi relative aux libertés et responsabilités locales », il « doit être rendu obligatoire ».

La création d'un fonds de garantie

Au-delà de cette logique de prévention, le groupe de travail estime que « la garantie des risques locatifs nécessite la mise en œuvre d'orientations et de dispositifs permettant à chaque ménage, quels que soient le parc locatif dans lequel il est logé et sa situation sociale, de bénéficier d'une couverture en cas d'incapacité à payer son loyer et ses charges ». Plusieurs propositions sont avancées pour répondre à cette nécessité.

Solution préconisée plus spécifiquement pour le parc locatif privé conventionné  :la création d'un fonds de garantie qui assurerait non seulement la prise en charge des impayés de loyers et de charges mais aussi le financement de travaux faisant suite à des dégradations, la prise en charge d'une couverture juridique et le financement d'un diagnostic social. Ce fonds serait lui-même financé par un abondement de l'Etat mais aussi par une contribution des propriétaires de logements conventionnés - à un taux inférieur au taux actuel de la contribution sur les revenus locatifs (CRL) (6) - en contrepartie de la suppression de la CRL sur ces mêmes logements.

S'agissant du parc locatif privé non conventionné, le groupe de travail propose d'aménager le dispositif de la garantie Loca-pass (7) en cas de loyers inférieurs à un certain plafond. Ce « Loca-pass plus », qui couvrirait également, au-delà des impayés de charges et de loyers, les dégradations, courrait sur toute la durée de la location et ne serait donc pas, comme la garantie Loca-pass « classique », limité aux trois premières années. Il serait abondé par le 1 % logement et l'ensemble des partenaires institutionnels concernés, et le bailleur comme le locataire seraient invités à y cotiser. Sur un plan plus général, le rapport suggère que des financements complémentaires soient recherchés pour élargir le champ des bénéficiaires de l'ensemble du dispositif Loca-pass - avance et garantie -, afin notamment de toucher les fonctionnaires.

O.S.

Notes

(1)  Il est prévu que ce rapport soit mis en ligne sur le site du CNH (www.logement.gouv.fr). Signalons que le rapporteur du groupe de travail est François Bregou, chargé de mission « habitat » à la la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale.

(2)  Voir ASH n° 2249 du 8-02-02.

(3)  Voir ASH n° 2346 du 13-02-04.

(4)  Rappelons que la loi de simplification du droit adoptée définitivement le 18 novembre dernier habilite le gouvernement à légiférer par ordonnances en matière d'aides personnelles au logement, entre autres (voir ASH n° 2383 du 26-11-04). De plus, à la lecture des rapports parlementaires, il semble bien que le gouvernement envisage de rendre possible le versement en tiers payant de l'allocation de logement à de nouveaux bailleurs sociaux.

(5)  Voir ASH n° 2369 du 23-07-04.

(6)  Pour mémoire, la CRL s'applique au taux de 2,50 % sur les revenus locatifs tirés de la location de locaux situés dans des immeubles bâtis, achevés depuis 15 ans au moins au 1er janvier de l'année d'imposition.

(7)  Pour mémoire, le Loca-pass, créé par le 1 % logement, est un dispositif à deux têtes : l'avance Loca-pass est une avance gratuite du dépôt de garantie tandis que la garantie Loca-pass est une garantie des loyers et des charges en cas d'impayés - Voir ASH n° 2308 du 25-04-03.

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