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« Le secteur social et médico-social paie aujourd'hui son incapacité à prévoir »

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De la lecture de notre enquête consacrée à la « pénurie de directeurs annoncée » dans le secteur social et médico social (1), Jean-Claude Salvia, éducateur spécialisé dans une maison d'enfants à caractère social en Savoie (2), affirme qu'elle l'a parfois laissé « interloqué ». Dans sa ligne de mire, notamment, les propos de certains de nos interlocuteurs sur la formation des directeurs.

« Il apparaît, dans cet article, que les centres de formation s'inquiètent du grand nombre de directeurs déjà en poste qui échouent aux épreuves de sélection préalables au Cafdes. Un directeur adjoint d'IRTS s'irrite : "On demande aux candidats de rédiger des dissertations, ce qui ne correspond pas à l'exercice du métier. " Ai-je bien lu ?Des directeurs d'établissements seraient en difficulté devant une feuille blanche pour disserter sur un sujet imposé ? Cette seule affirmation me laisse pantois. Ne sont-ce pas ces mêmes directeurs qui sont censés construire des projets, en être les porteurs, mener des réflexions sur le fonctionnement institutionnel ? Ne sont-ce pas ces mêmes directeurs qui doivent négocier avec les autorités administratives ? Les professionnels du secteur ne manqueront pas de trouver dans cette remarque quelques explications de l'immobilisme dans lequel se trouvent certains établissements.

« Ce même directeur adjoint d'IRTS poursuit : "Il serait plus intéressant de les tester dans des jeux de rôle pour vérifier leurs capacités à animer des réunions. Mieux vaut retenir des gens qui savent faire plutôt que des têtes bien pleines ! " Le raisonnement est discutable. Jouer des rôles ? Mais dans les institutions on ne joue pas. Des professionnels, tous secteurs confondus, dépendent des compétences professionnelles de l'équipe de direction. C'est justement l'objet de la formation que d'apprendre à réfléchir, à prendre la distance nécessaire pour permettre à l'institution d'avancer, dans le souci des usagers.

« Plus loin, un responsable syndical affirme préférer "un directeur formé, secondé par de bonnes équipes, pour trois sites, que trois directeurs non formés, chacun dans son coin ". Mais c'est évident ! : il n'y aura pas pénurie de directeurs puisqu'un seul remplira trois postes. Et l'organisation des institutions ? Et la charge de travail supplémentaire pour les équipes ? Personne ne se questionne à ce sujet ? Moi oui.

« J'ai été sidéré par de telles réflexions menées par des cadres du secteur. Depuis de nombreuses années, les employeurs et les administrations n'ont eu de cesse de détruire les possibilités de formation complémentaire des professionnels. Combien de salariés bénéficient aujourd'hui d'une réelle formation continue ? Formons les professionnels pour mener un vrai travail auprès des usagers, mais avec de vraies formations qualifiantes.

« Décidément non, comme le relève dans cet article un directeur d'IRTS, le secteur n'est "toujours pas arrivé à décoller de son amateurisme originel ". Il en est même bien loin au regard de ce que je viens de lire : beaucoup d'amateurs sont aux commandes.

« J'oubliais de vous dire que ma connaissance partielle du terrain me vient d'une pratique de 30 années dans le secteur social, dont une bonne partie en internat. Ma formation initiale de moniteur-éducateur en poche, j'ai dû m'affronter à la direction de l'établissement pour suivre une formation initiale d'éducateur spécialisé, dans les conditions de la convention collective de 1966.

« Aujourd'hui, je continue à me former puisque je poursuis une deuxième année de master dans un institut d'études politiques. J'assiste aux cours pendant mon temps libre et sur mes fonds propres, l'actuel employeur ayant refusé de prendre quoi que ce soit en charge. Certains penseurs ont eu la morgue de dénommer cette pratique "principe de co-investissement ". Bel exemple des capacités de prévision du secteur.

« Alors vous saurez comprendre, peut-être, que les plaintes des associations et des administrations sur le sujet du vieillissement des professionnels me laissent perplexe. Le secteur paie aujourd'hui son incapacité à prévoir et son administration uniquement financière pendant les quelques dizaines d'années écoulées. »

Jean-Claude Salvia

Notes

(1)  Voir ASH n° 2381 du 12-11-04.

(2)  Jean-Claude Salvia : Parc du Vergeron - 38430 Moirans - Tél. 06 74 57 23 29 - E-mail : simon-salvia@wanadoo.fr.

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