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Le gouvernement change de véhicule législatif pour ses mesures contre l'homophobie et le sexisme

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Le texte était prêt et devait être examiné en première lecture par l'Assemblée nationale en décembre. Le projet de loi spécifique réprimant les propos discriminatoires à caractère sexiste ou homophobe, qui était loin de soulever l'enthousiasme dans les rangs de la majorité au lendemain de sa présentation en conseil des ministres (1), ne verra finalement pas le jour. Son contenu n'est pas pour autant jeté aux oubliettes. Des mesures contre l'homophobie « tenant compte des avis exprimés sur le projet de loi initial » ont en effet été introduites le 21 novembre par le gouvernement sous forme d'amendements au projet de loi créant une « Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité » (HALDE), actuellement en cours d'examen au Parlement.

L'avis adopté le 18 novembre en assemblée plénière par la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH) - à 26 voix contre 17 - aura sans aucun doute pesé dans la balance. La commission préconisait ni plus ni moins que le retrait pur et simple d'un texte qui, pour mémoire, proposait d'aligner la répression des propos homophobes - injures, diffamation et provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence - et, dans une moindre mesure, des propos sexistes (2) sur celle des propos racistes et antisémites. La CNCDH, qui regroupe représentants de l'Etat et de la société civile (associations de défense des droits de l'Homme, syndicats, représentants du culte...) redoutait notamment une dérive communautariste. « S'il est indéniable que l'Etat doit assurer une protection aux personnes vulnérables de la société, il semble que ce principe n'a pas matière à s'appliquer en ce qui concerne l'homophobie », jugeait-elle ainsi. « L'affirmation du contraire consisterait à ériger l'orientation sexuelle en composante identitaire au même titre que l'origine ethnique, la nationalité, le genre sexuel, voire la religion, et donc à segmenter la société française en communautés sexuelles. » En outre, assurait l'avis, « il n'est pas démontré que l'orientation sexuelle d'une personne ou d'un groupe d'individus génère une vulnérabilité nécessitant une protection spécifique de l'Etat ». Autre pilier de l'argumentation de l'instance consultative : le texte ne respectait pas, selon elle, la liberté de la presse et d'opinion. La position de l'Eglise catholique, annexée à l'avis, illustrait à cet égard assez bien les craintes exprimées dans le camp des détracteurs du texte. « L'homosexualité, l'homoparentalité appellent de légitimes débats sur la vie de la société et même sur la nature de la civilisation, écrivait ainsi le cardinal Lustiger, débats qui risquent d'être analysés comme des messages ou propos homophobes susceptibles d'être poursuivis aux termes de ce projet de loi. »

Le gouvernement, voyant grossir la vague de protestations suscitée par le texte, aura donc choisi de changer son fusil d'épaule. Les amendements au projet de loi instituant la HALDE maintiennent la création, dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, d'un délit de provocation à la haine ou à la violence homophobes ou sexistes, qui n'est pas actuellement réprimée en tant que telle. Toutefois, à la différence de la provocation à la discrimination raciale, le texte limite celle en matière de sexisme ou d'homophobie à des types de discriminations limitativement énumérées aux articles 225-2 et 432-7 du code pénal : refus de fournir un bien ou un service, entrave à l'exercice normal d'une activité économique, refus d'embauche, sanction ou licenciement... Autrement dit uniquement à des discriminations liées à l'emploi, au logement et aux services, alors que le projet de loi spécifique sur l'homophobie correctionnalisait» toutes les provocations à la discrimination. Des propos défavorables par exemple au mariage des homosexuels ne seront donc pas susceptibles de tomber sous le coup de la loi pénale.

Un amendement prend par ailleurs les dispositions du texte initial prévoyant la répression des diffamations et injures homophobes. Toutefois, changement notable, celles commises à raison de sexe seront sanctionnées de la même façon.

Ce même texte ménageait un délai de prescription de un an - comme en matière de racisme -pour les nouveaux délits de provocations, diffamations et injures qu'il créait. Le gouvernement fait finalement machine arrière, préférant s'en tenir, pour ces délits, au droit commun. Soit un délai de trois mois.

Enfin, un dernier amendement maintient la création d'un droit à se porter partie civile pour les associations se consacrant à la lutte contre le sexisme ou l'homophobie déclarées depuis au moins cinq ans, à l'image des dispositions existant en matière de racisme.

Notes

(1)  Voir ASH n° 2365 du 25-06-04.

(2)  En la matière, seules les provocations avaient été retenues. Les notions de propos diffamatoires et d'injures sexistes avaient ainsi été écartées.

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