Une offre de soins en psychiatrie inégalement répartie sur le territoire, des attentes nouvelles des usagers, une multiplication des sollicitations des équipes de psychiatrie. Autant de paramètres qui impliquent « la poursuite de la réorganisation de l'offre régionale de soins pour répondre aux besoins en santé mentale », selon la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS). Cette dernière rappelle donc les orientations stratégiques en matière de santé mentale « identifiées comme prioritaires » au niveau national. Elle expose également les principes d'élaboration des volets « psychiatrie et santé mentale » des schémas régionaux d'organisation sanitaire de troisième génération (SROS 3) (1). L'objectif, au final, est de préparer l'évolution de cette offre de soins en psychiatrie et en santé mentale « qui constitue l'un des axes majeurs du plan pluriannuel de santé mentale en cours d'élaboration », relève l'administration.
La circulaire insiste d'abord sur la qualité, l'accessibilité et l'efficience de l'offre de soins en psychiatrie. Des objectifs partiellement atteints et qui doivent donc être poursuivis et intensifiés, indique la DHOS. En termes géographiques, cela doit se traduire notamment par « une réelle prise en charge de proximité ». Autres principes d'organisation : garantir la qualité et la continuité de l'offre de soins psychiatriques notamment par le développement d'une offre médico-sociale adaptée aux besoins des personnes, parfois hospitalisées sur le long terme en psychiatrie faute d'un relais social ou médico-social, la réduction des cloisonnements (entre pédopsychiatrie et psychiatrie générale...) et le renforcement des partenariats et du travail en réseau avec les acteurs sociaux, médico-sociaux, éducatifs et judiciaires. Dernier objectif : soutenir et impliquer les patients et leurs familles.
Au-delà, l'administration liste les publics prioritaires pour lesquels elle formule des recommandations spécifiques. Ainsi, elle préconise de poursuivre l'adaptation de l'offre de soins en faveur des enfants et des adolescents. A cet effet, une circulaire devrait prochainement préconiser une organisation des soins centrées sur les jeunes, tenant compte de leur environnement et de la diversité des troubles rencontrés dans le champ de la santé mentale tout en réduisant les cloisonnements.
Autre public : les personnes âgées, plus exposées aux risques de dépression, de souffrance psychique ou de détérioration intellectuelle découlant d'une pathologie dégénérative. Il s'agit, selon la circulaire, d'assurer des soins psychiatriques dans les établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes ou dans les établissements et services de soins somatiques accueillant des personnes âgées ou, éventuellement, de favoriser les interventions à domicile d'équipes psychiatriques, le cas échéant spécialisées dans la prise en charge des personnes âgées.
Les personnes handicapées en raison de troubles psychiques qui ne « trouvent pas actuellement les réponses adaptées à leurs besoins » retiennent également l'attention de l'administration. Dans la perspective de l'élaboration du volet « psychiatrie et santé mentale » des SROS 3, il est recommandé de repenser le rôle du dispositif de soins spécialisés et du secteur psychiatrique, en particulier en termes d'articulation avec le champ social et médico-social. Pour les personnes atteintes d'un syndrome autistique ou de troubles envahissants du développement, un plan national d'actions et une circulaire spécifiques, en cours d'élaboration, devraient permettre un diagnostic, une prise en charge et un accompagnement précoces « adaptés, individualisés et à caractère pluridisciplinaire ».
La circulaire s'intéresse, par ailleurs, aux personnes en situation de précarité et d'exclusion. L'idée étant notamment, « dans le cadre de partenariats entre les équipes de psychiatrie et les différents acteurs et institutions sanitaires et sociales (centres d'hébergement et de réinsertion sociale, permanences revenu minimum d'insertion, missions locales...), de ne pas ignorer cette souffrance et ces pathologies en mettant en place les conditions d'une prévention, d'une prise en charge précoce, d'un diagnostic et d'une orientation appropriée quand cela est nécessaire » et de développer des actions de soutien et de formation des professionnels, « tout en évitant la psychiatrisation du malaise social ».
La question des personnes détenues est également abordée, le souci de l'administration étant d'assurer une qualité des soins équivalente de celle dont dispose l'ensemble de la population. Dans ce cadre, la prévention du suicide et la prise en charge des auteurs d'infractions à caractère sexuel constituent, pour la DHOS, des priorités pour les équipes de psychiatrie exerçant en milieu pénitentiaire.
Dernier public retenu : les personnes ayant des pratiques addictives qui, au cours de leur prise en charge spécialisée en addictologie, présentent des troubles psychiques, voire psychiatriques, dissimulés par la dépendance.
Outre ces orientations, l'administration définit les principes d'élaboration des volets « psychiatrie et santé mentale » des SROS de troisième génération. Ils visent, à partir d'une évaluation des besoins de la population en santé mentale, à adapter sur un territoire l'offre régionale de soins. Dans l'attente des résultats d'un module d'évaluation épidémiologique des besoins en santé mentale à des fins de planification (2), la circulaire propose d'appréhender ces besoins dans chaque région en distinguant :
les domaines qui requièrent de manière dominante l'intervention directe de la psychiatrie (besoins des enfants, des adolescents, des adultes en situation de crise et d'urgence, des personnes pour des soins programmés de courte ou de longue durée en psychiatrie, y compris en milieu pénitentiaire, des personnes nécessitant une intervention coordonnée de la psychiatrie infanto-juvénile et de la psychiatrie générale...) ;
ceux qui requièrent principalement des interventions indirectes ou en partenariat (besoins des professionnels et des institutions de soins [travail de liaison] et des professionnels des établissements et services sociaux et médico-sociaux [formation, supervision], des personnes handicapées, des personnes âgées...).
Cette distinction ne s'impose toutefois pas comme un ensemble « exhaustif et hiérarchisé » d'axes devant obligatoirement être abordés dans toutes les régions, précise la circulaire. Sur le fondement de cette analyse qualitative, un diagnostic partagé devra être élaboré avec les différents acteurs permettant de mesurer l'implication nécessaire des équipes spécialisées pour répondre à ces besoins, en fonction des ressources existant localement (notamment au regard du bilan des schémas régionaux de psychiatrie précédents et du niveau d'intervention des partenaires). Cette approche permet ensuite de définir les priorités régionales. En tout état de cause, les objectifs de santé publique et les plans stratégiques nationaux ainsi que les plans régionaux de santé publique prévus par la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique (3) devront être pris en compte, ainsi que les politiques sociales et médico-sociales mises en œuvre dans les régions au travers des schémas afférents à ces secteurs.
Ce diagnostic fait, la circulaire définit trois types de réponses. La « réponse de proximité » concrétise l'accessibilité, la continuité et la qualité des soins pour des patients pris en charge dans leur environnement. C'est le niveau privilégié en particulier pour les soins généralistes de premier recours en ambulatoire et à domicile (dont le pivot au niveau du secteur est le centre médico-psychologique). Lesquels doivent être articulés avec le territoire de santé pour assurer la continuité des soins en dehors des heures d'intervention des équipes ou d'ouverture des structures de proximité. Seconde réponse : celle « cohérente avec le territoire de santé défini dans le champ somatique ». Elle vaut par exemple pour le développement de nouvelles prises en charge pour des populations particulières telle l'hospitalisation à temps complet en psychiatrie infanto-juvénile ou la mise en place de lieux d'accueil de crise pour adolescents. Enfin, dernière réponse possible : celle spécialisée. Il s'agit de prendre en compte des besoins spécifiques non pris en charge par ailleurs au niveau de proximité ou du territoire de santé comme des activités, au sein de centres ressources ou de référence, en direction de personnes souffrant d'autisme ou des auteurs d'infractions sexuelles.
(1) Voir ASH n° 2352 du 2-03-04.
(2) Une expérimentation en ce sens a été lancée en Ile-de-France, Haute-Normandie, Lorraine et Rhône-Alpes.
(3) Voir ASH n° 2371 du 3-09-04.