Il est nécessaire « que le temps qu'une personne passe en détention [...] lui permette de prendre un nouveau départ et [de] préparer sa réinsertion ou plutôt, pour le plus grand nombre, [de] préparer sa première insertion dans la vie sociale et professionnelle ». Telle est la ligne de conduite qu'a préconisée Dominique Perben, le 20 septembre, lors d'une visite du centre pénitentiaire de Bapaume (Pas-de-Calais). L'occasion pour le ministre de la Justice de préciser quelques axes de sa politique pénitentiaire.
S'il relève que des initiatives ont déjà été prises pour améliorer « la prise en charge des publics les plus fragiles et les plus vulnérables », comme la séparation des mineurs et des majeurs détenus, la lutte contre les suicides en prison ou un meilleur suivi des détenus âgés et malades, pour autant l'effort doit être poursuivi, estime le garde des Sceaux. Trois priorités sont donc dégagées dans cet objectif. En premier lieu, l'enseignement et la lutte contre l'illettrisme - fréquent en particulier chez les mineurs détenus - retiennent son attention. Actuellement, plus de 30 000 détenus suivent des cours d'alphabétisation et de remise à niveau, 400 enseignants à temps plein sont affectés au milieu carcéral et plus de 12 000 heures de cours y sont dispensées chaque semaine, relève ainsi le ministre. Il juge toutefois que cet effort doit être accentué, notamment en direction des jeunes. L'idée est également d'offrir une variété et une individualisation des réponses.
Autre axe : les actions de formation professionnelle. En accord avec le ministère de l'Emploi, du Travail et de la Cohésion Sociale, trois priorités sont ainsi fixées : garantir l'accès des personnes les plus éloignées de la qualification à l'acquisition des savoirs de base ;développer les procédures d'information, de bilan et d'orientation ; adapter l'offre de formation en fonction des besoins et des nouveaux modes d'apprentissage. Ces objectifs devant se traduire par des actions adaptées aux possibilités offertes par chaque établissement, voire à la situation personnelle et pénale de chaque détenu. Les pédagogies doivent être en outre diversifiées, insiste Dominique Perben, par le biais d'emplois en chantier-école, de l'instauration de filière professionnelle depuis la pré-qualification jusqu'au module de spécialisation, d'ateliers pédagogiques personnalisés et de formation à distance s'il y a lieu.
Enfin, la chancellerie met l'accent sur le travail en milieu pénitentiaire, sans toutefois annoncer de mesures précises.
Parallèlement, le ministre, accompagné du médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, également maire de Bapaume, a indiqué qu'une expérimentation permettant aux délégués du médiateur de la République d'intervenir en milieu carcéral devrait débuter « d'ici novembre-décembre » dans une dizaine d'établissements pénitentiaires. L'ambition de ce dispositif est d'apporter un « regard extérieur » et d'éviter « l'aggravation des tensions » entre les détenus et l'administration pénitentiaire en cas de litige (accès aux parloirs...), alors que seule une dizaine de saisines émanant de personnes incarcérées est enregistrée chaque année, a déclaré le garde des Sceaux. A cet effet, une convention entre le ministère et le médiateur serait en cours d'élaboration. Cette initiative a été saluée par la Commission nationale consultative des droits de l'Homme qui, dans une étude récente, avait appelé à une plus grande reconnaissance des droits fondamentaux des détenus (1).
(1) Voir ASH n° 2352 du 26-03-04.