La loi « relative aux libertés et responsabilités locales », qui organise les transferts de compétences aux collectivités locales, a passé sans encombre l'étape du Conseil constitutionnel. Les sages ont en effet validé la quasi-totalité du texte, ne censurant qu'une disposition différant le transfert des personnels non enseignants de l'Education nationale dans les départements d'outre-mer. Dernière pierre d'un chantier commencé à l'automne 2002 avec la réforme de la Constitution (1), la loi aura connu un parcours législatif mouvementé, suscitant l'hostilité jusque dans les rangs de la majorité. Au point d'amener le Premier ministre à faire passer le texte sans vote fin juillet, via le recours à l'article 49-3 de la Constitution.
Particulièrement volumineuse, la loi conduit l'Etat, comme prévu, à se délester de nombreuses prérogatives à compter du 1er janvier 2005 au profit des collectivités locales. Et en premier lieu des régions, qui auront la haute main sur la formation professionnelle. La loi leur confie en effet la pleine responsabilité de la formation professionnelle des adultes - avec notamment le transfert des crédits de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) -, l'Etat conservant simplement celle des programmes de formation à vocation sociale, comme la lutte contre l'illettrisme. La formation des travailleurs sociaux leur est également transférée- élaboration du schéma régional des formations sociales en association avec les départements, agrément et financement des établissements de formation initiale, attribution des aides aux étudiants qui y sont inscrits -, l'Etat gardant toutefois ses compétences en matière de délivrance des diplômes et titres de travail social, ainsi que de contrôle des programmes de formation, de qualification des formateurs et directeurs d'établissements et de la qualité des enseignements.
De leur côté, les départements se voient accorder le rôle de chef de file dans le domaine de l'action sociale et de l'insertion. La loi leur confie ainsi l'élaboration et la mise en œuvre du schéma départemental d'organisation sociale et médico-sociale (en concertation avec l'Etat et après avis du comité régional de l'organisation sociale et médico-sociale - au lieu d'un principe de décision conjointe entre l'Etat et le conseil général), la création, le financement et la gestion du fonds d'aide aux jeunes en difficulté, ainsi que la définition et la mise en œuvre de l'aide aux personnes âgées. Les compétences des conseils généraux en matière de mesures d'assistance éducative seront en outre étendues, à titre expérimental, pour cinq ans.
Plusieurs pans de la gestion du logement social vont par ailleurs glisser non seulement dans le champ des départements - avec, entre autres, la création dans chaque département d'un fonds de solidarité pour le logement (étendu au passage aux aides pour les impayés d'eau, d'énergie et de téléphone) - mais aussi et surtout dans celui des communes, avec notamment une délégation possible aux maires du contingent préfectoral de logements sociaux (2) ou encore, pour celles qui en font la demande, le transfert de la responsabilité des locaux destinés au logement des étudiants.
Au-delà des transferts de compétences, auxquels elle consacre toute sa première partie, la loi du 13 août 2004 fixe, dans sa deuxième partie, le cadre général de l'acte II de la décentralisation. L'un de ses derniers articles, introduit suite à un amendement gouvernemental, modifie la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage - « loi Besson » - pour accorder un nouveau délai de deux ans à l'aménagement d'aires de stationnement à la commune ou à l'établissement public de coopération intercommunale ayant manifesté la volonté de se conformer à ses obligations (3).
Signalons que la loi relative à l'autonomie financière des collectivités locales a, elle aussi, été adoptée définitivement cet été et validée quasiment dans son intégralité par le Conseil constitutionnel (4). Elle constitue le volet financier de l'acte II de la décentralisation. Les débats sur ce texte se sont essentiellement cristallisés autour de la notion de ressources propres des collectivités (5). La loi indique, au final, qu'elles sont « constituées du produit des impositions de toutes natures dont la loi les autorise à fixer l'assiette, le taux ou le tarif, ou dont elle détermine, par collectivité, le taux ou une part locale d'assiette ».
Nous reviendrons sur ces deux lois dans un prochain numéro.
(1) Voir ASH n° 2290 du 20-12-02.
(2) Le contingent préfectoral de réservation des logements sociaux pour les personnes mal logées ou défavorisées est actuellement fixé à 30 % des logements HLM - Sur les réactions associatives, voir ce numéro, page 50.
(3) Sur les réactions associatives, voir ce numéro.
(4) Loi n° 2004-758 et décision du Conseil constitutionnel n° 2004-500 DC du 29 juillet 2004, J.O. du 30-07-04.
(5) Lesquelles doivent constituer, depuis la réforme de la Constitution, « une part prépondérante de l'ensemble de leurs ressources ».