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Briet-Jamet : un constat partagé et des « partis pris » contestés

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 Les personnes auditionnées par la mission ont été écoutées. » Ce sentiment exprimé par le Syndicat des cadres de direction des établissements sanitaires et sociaux publics et privés (Syncass) -CFDT à la lecture du rapport Briet-Jamet (1) est largement partagé. Beaucoup d'organisations approuvent le constat critique sur les dispositifs actuels de prise en charge des personnes âgées et handicapées et retrouvent dans le texte l'écho de leurs préoccupations, que ce soit sur les questions de vocabulaire ou même sur le souci affirmé de l'égalité de traitement sur l'ensemble du territoire. La Fédération hospitalière de France (FHF) salue quant à elle la « vision décloisonnée » de la gérontologie et du handicap qui devrait permettre une prochaine suppression des barrières d'âge.

Ces satisfecit n'empêchent pas les critiques de fond sur le dispositif proposé, qui ne paraît pas toujours correspondre aux intentions affichées. L'inquiétude la plus vivement exprimée touche au transfert- de l'assurance maladie vers les départements -des dépenses de soins dispensés par les établissements et les services à domicile. Pour l'Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (Uniopss), cette proposition « prépare insidieusement le désengagement de la sécurité sociale ». La FHF a inspiré des amendements sur ce point à l'occasion du débat sur la réforme de l'assurance maladie. Certes, Philippe Douste-Blazy a répété, le 13 juillet à l'Assemblée nationale, qu'il « est hors de question de sortir les soins aux personnes âgées ou handicapées du champ de l'assurance maladie ». Mais le ministre a aussi demandé le retrait des propositions d'amendements qui auraient transcrit ce refus dans la loi en attendant des « expertises complémentaires ».

Plus globalement, pour le Syncass, la création de l'Agence nationale de solidarité pour l'autonomie (ANSA) constitue une « remise en cause de l'unicité de l'assurance maladie et de ses principes fondateurs ». Rappelant que le handicap comme la dépendance ne peuvent, la plupart du temps, être isolés de la maladie, le syndicat juge que « la création d'un risque qui ne serait plus pris en charge dans le cadre de la protection sociale générale porte en soi les germes de la discrimination et le risque de voir des citoyens de seconde zone qui ne seraient plus indemnisés comme les autres ». La FNATH (L'association des accidentés de la vie) regrette aussi le choix d'un dispositif qui s'écarte des régimes de sécurité sociale et de leurs principes de financement solidaire et de couverture universelle. De même pour l'Association des paralysés de France (APF), qui estime que l'on reste dans le registre de l'action sociale plutôt que de la protection sociale.

Inversement, le choix d'une gestion de proximité est approuvé par la plupart des associations. Mais cela n'impliquait pas forcément le transfert complet des pouvoirs et des financements au département, selon le « parti pris » de départ. « On connaît des organismes de sécurité sociale tels que les caisses d'allocations familiales qui s'acquittent très bien d'aides aux personnes », note le Syncass, qui estime aussi que les services déconcentrés de l'Etat peuvent jouer ce rôle. La FHF (2) continue de plaider pour une solution qui se situerait entre une « décentralisation nuancée » et une « déconcentration appuyée ». Dans la première hypothèse, un groupement d'intérêt public (GIP) permettrait d'associer, dans une instance départementale unique, le conseil général, les services de l'Etat, l'assurance maladie, les représentants des usagers et des professionnels. Dans la seconde, les futures agences régionales de la santé (auxquelles les départements seraient associés) pourraient voir leurs responsabilités étendues à la fois aux soins de ville et au secteur médico-social.

Au total, seule l'Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales (Unapei) juge que le dispositif proposé « paraît globalement concilier l'exigence d'un pilotage national et cohérent et d'une gestion de proximité ». Au contraire, l'Union nationale ADMR (Association du service à domicile) estime que l'ANSA, aussi bien que les comités départementaux de solidarité pour l'autonomie, n'auront « que peu de pouvoirs de régulation » par rapport aux politiques menées par les conseils généraux. « A travers l'exemple de l'allocation personnalisée d'autonomie », elle craint donc une « inégalité très forte de prise en charge » selon les départements.

Témoin de la très grande latitude laissée au conseil général, le choix qui lui serait confié de la forme juridique de la maison départementale du handicap. Même l'Unapei refuse qu'elle soit laissée « au gré d'initiatives locales probablement disparates ». « Tout est possible », regrette aussi l'APF, sur ce point comme sur la composition des équipes d'évaluation. L'association déplore en outre le maintien de deux sections, enfants et adultes, dans l'instance qui aura à examiner les plans d'aide et la confusion des rôles entre le décideur et le financeur. Le Groupement pour l'insertion des personnes handicapées physiques (GIHP) s'inquiète également de cette concentration des fonctions, d'autant que « le grave déficit électoral dont souffrent les personnes handicapées risque d'affecter la juste prise en compte de leurs attentes ». Constat que l'on pourrait étendre, et même renforcer, pour les personnes âgées dépendantes.

Est-ce le silence de ces dernières qui a entraîné « l'erreur » du rapport Briet-Jamet relevée par la FHF ? Au lieu de la répartition des nouveaux fonds de l'ANSA « moitié pour les personnes handicapées, moitié pour les personnes âgées » promise par le gouvernement, le texte les affecte moitié pour le droit à compensation des personnes handicapées (de moins de 60 ans) et moitié pour « les dotations à répartir » entre les deux secteurs. Ignorance étonnante ou flou volontaire ?

Autre préoccupation financière, exprimée par le Syncass : « il n'est pas certain » que la taxe intérieure sur les produits pétroliers, suggérée comme nouvelle ressource possible, « puisse répondre à la montée en charge des besoins du secteur soulignée par ailleurs. »

M.-J.M.

Notes

(1)  Voir ASH n° 2368 du 16-07-04.

(2)  Ses propositions ont été formulées dans une lettre du 17 mai adressée à MM. Briet et Jamet, cosignée par l'APF, la FNATH, la FEHAP, l'Unafam, l'Unapei, l'Unccas et l'Uniopss - Voir ASH n° 2360 du 21-05-04.

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