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Partage d'informations : éviter les dérives sur le terrain

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Vigilants depuis les informations qui filtrent à propos du futur projet de loi sur la prévention de la délinquance, les travailleurs sociaux sont bien décidés à résister à toute remise en cause de leurs pratiques professionnelles. La délégation de l'Hérault de l'Association nationale des assistants de service social (ANAS) vient ainsi d'alerter le ministère de l'Intérieur et le Premier ministre d'une initiative prise dans le cadre du contrat local de sécurité, qu'elle dénonce depuis le mois d'avril. « Un groupe réunissant plusieurs institutions placées sous la responsabilité de l'Etat organise des échanges d'informations parallèles aux procédures légales, au mépris du droit des personnes au respect de leur vie privée et de leurs droits en tant qu'usagers », écrit la délégation, les enjoignant à « garantir l'Etat de droit sur le territoire ».

La charte de déontologie du groupe, censé rassembler, à l'initiative du préfet, le procureur de la République, le conseil général, la ville, l'Education nationale et la protection judiciaire de la jeunesse, institue clairement le principe de l'échange de données nominatives. Le document stipule qu' « il faut, en mettant en avant la notion du secret partagé [...], travailler sur le nominatif en intégrant la notion de suivi personnalisé des familles et mineurs signalés  ». Une pratique que le préfet de région et le procureur de la République justifient : dans un courrier adressé le 21 avril à l'ANAS, ils estiment que contester la notion de secret partagé tendrait à « réduire les possibilités d'échanges entre professionnels, [indispensables] à l'efficacité de l'action publique, au bénéfice premier des enfants et des adolescents en grande difficulté dont le cas a été évoqué, de la population ensuite ». Ils ajoutent que les signataires de la charte se sont engagés à respecter une « stricte confidentialité » en dehors du cercle des acteurs concernés et à ne pas constituer de fichier nominatif.

Préserver la déontologie

Reste que ces arguments sont loin d'apaiser les inquiétudes des travailleurs sociaux, qui se réfèrent à la loi. « Il ne faut pas oublier qu'elle peut être aussi un recours pour protéger notre déontologie  », a, à ce propos, souligné Didier Dubasque, président de l'ANAS, lors des journées d'études de l'association, le 18 juin dernier. Il évoquait ainsi le principe du respect au droit à la vie privée, inscrit dans le code pénal et celui du secret professionnel, institué par le code de l'action sociale et des familles.

Face au tollé des assistants sociaux, le département et la ville ont finalement décidé de se retirer du dispositif. « Le groupe territorial ne se réunit plus qu'avec les services de l'Etat, affirme Christian Bouillé, vice-président du conseil général en charge de l'emploi et de l'insertion, adjoint au maire de Montpellier et chargé de la sécurité. Nous sommes en train de relancer la concertation pour le faire fonctionner dans de nouvelles conditions ».

Comment améliorer le partenariat des acteurs de la prévention sans remettre en cause le principe de confidentialité, avec quels acteurs et dans quel objectif ? C'est aussi la question qui se pose à Vitry-le- François, en Seine-et-Marne. Au début du mois de juin, le conseil général s'était engagé devant les travailleurs sociaux à annuler le principe de « fiches nominatives » constituées pour évaluer les interventions sociales (1), et à rechercher une nouvelle méthodologie d'analyse. Résultat : « Ces fiches ne sont plus transmises mais remplies lors de réunions, dont le bilan final est non nominatif », explique Gérard Gamichon, directeur adjoint à la solidarité départementale.

A l'issue de deux premières journées de travail, les institutions, dont le service social départemental, le centre communal d'action sociale, l'Education nationale et un bailleur social, ont passé en revue 747 familles. Le conseil général prévoit de transmettre en septembre la conclusion de son diagnostic et ses préconisations aux autorités de l'Etat et à la ville. Les travailleurs sociaux, eux, s'interrogent toujours sur l'opportunité de mettre en place une telle méthode, alors que des outils statistiques existent déjà. « Outre le fait que cet échange inclut des personnes qui ne sont pas des travailleurs sociaux, comme l'organisme logeur, nous doutons des préoccupations réelles du département », estime un membre du Collectif marnais de veille contre les dérives sécuritaires et l'atteinte aux libertés des personnes. La méfiance est d'autant plus grande que la ville fait partie des 24 sites prioritaires sur lesquels le ministre de l'Intérieur compte s'appuyer pour rédiger son projet de loi sur la prévention de la délinquance.

M. LB.

Notes

(1)  Voir ASH n° 2361 du 28-05-05.

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