Les députés ont adopté le 17 juin en première lecture une proposition de loi UMP autorisant l'expulsion des étrangers ayant tenu des propos discriminatoires - entre autres - envers les femmes. Il s'agit plus précisément de modifier la législation sur la « double peine » issue de la loi Sarkozy sur l'immigration (1), qui protège certaines catégories d'étrangers contre les expulsions notamment en raison de leur lien particulier avec la France (parce qu'ils y sont nés ou y sont arrivés avant l'âge de 13 ans ou encore parce qu'ils y résident régulièrement depuis plus de 20 ans ou y sont depuis plus de 10 ans et y ont fondé une famille...). Il n'existe actuellement que trois exceptions à cette protection quasi « absolue » :
lorsque les intérêts fondamentaux de l'Etat sont menacés ;
en cas d'activités à caractère terroriste ;
en cas d'actes de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à raison de l'origine ou de la religion.
Or cette troisième exception « apparaît aujourd'hui inadaptée » car « elle ne permet pas à la France de lutter efficacement contre tous les appels à la discrimination ou à la haine », explique l'exposé des motifs. Les députés ont, en fait, voulu répondre aux difficultés juridiques récemment rencontrées lors de l'affaire de l'imam de Vénissieux (Rhône). Pour mémoire, après avoir prôné la lapidation des femmes adultères dans une interview au mensuel Lyon Mag, l'imam avait été expulsé le 21 avril vers l'Algérie. Mais il avait pu regagner la France quelques jours plus tard, après la suspension par le tribunal administratif de l'arrêté ministériel d'expulsion. Une situation qui ne pourra plus se présenter une fois que la proposition de loi aura achevé son parcours parlementaire. Les étrangers qui se rendront coupables « d'actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes » pourront alors, en effet, être expulsés (2).
(1) Voir ASH n° 2338 du 19-12-03.
(2) Quelques jours avant l'adoption de cette proposition de loi, le Syndicat des avocats de France, le Syndicat de la magistrature, la Ligue des droits de l'Homme, la Cimade et le Groupe d'information et de soutien des immigrés dénonçaient un texte qui « remet gravement en cause les principes de limitation de la double peine issus de la loi Sarkozy [...] dont l'encre est à peine sèche ».