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Handicap : les principaux points qui font toujours débat

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Ce ne sera pas une réforme historique. Voilà au moins un point d'accord entre la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées et les associations qui contestent le plus son projet de loi sur l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. « Il ne s'agit pas d'un projet pour 30 ans », reconnaît tranquillement Marie-Anne Montchamp. « C'est une loi de transition, en aucun cas un texte de refondation », regrette Fernand Tournan, président de l'Association pour adultes et jeunes handicapés (APAJH).

Un texte peu ambitieux

Alors que la discussion dudit projet devait se dérouler à l'Assemblée nationale du 1er au 3 juin (avec un vote solennel le 8), les uns et les autres ont réaffirmé leurs positions. Tandis que certaines associations, comme l'Association des paralysés de France (APF), la FNATH (L'association des accidentés de la vie) ou l'Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales (Unapei), continuent de se battre pour faire prendre en compte leurs projets d'amendements et faire évoluer le texte au maximum dans le sens qu'elles souhaitent, 25 autres organisations (1) le jugent « structurellement inadapté », « inamendable » et demandent sa « refonte complète ». Parce qu'il n'établit pas définitivement « une logique de droits et de protection sociale », argumente Fernand Tournan. « Parce qu'il ne reconnaît pas d'entrée les obstacles sociétaux et ne se donne donc pas les moyens de les lever et de changer vraiment la situation », ajoute Vincent Assante, président de l'Association nationale pour l'intégration des personnes handicapées moteurs (Anpihm). Pourtant, au-delà des divergences tactiques, les reproches formulés au projet sont souvent semblables. Quoique avec des nuances selon les organisations... En voici quelques exemples.

Accord général du monde associatif :la compensation des charges liées au handicap doit être universelle et intégrale, c'est-à-dire sans conditions d'âge ni de revenus et, ajoute-t-il, en se référant aux projets de décentralisation, égale en tous points du territoire. Pour la levée des barrières d'âge, les associations obtiennent satisfaction, du moins en théorie, puisque la ministre a décidé de faire inscrire dans la loi le principe de la compensation « quel que soit l'âge ». Cela, dans le même texte qui concrétise la création du nouveau droit pour les seuls 20-60 ans... Mais un groupe de travail est d'ores et déjà chargé de réfléchir à l'extension du droit à compensation pour les enfants, en lieu et place de l'actuelle allocation d'éducation spéciale (voir ce numéro). Pour la barrière des 60 ans, la question est plus délicate. L'Unapei plaide pour la prolongation des droits des handicapés au-delà de cet âge fatidique car, comme le dit son président, Régis Devoldère, « le handicap ne prend pas sa retraite ». Mais il défend aussi le maintien de deux systèmes de prise en charge différents pour les personnes âgées et pour les personnes handicapées, « car le projet de vie d'un jeune de 20 ans n'est pas le même que celui d'une dame de 80 ans ». Au contraire, les associations regroupées dans le GRITA (2) militent pour « mettre un terme effectif au cloisonnement » entre les deux dispositifs, avec une prestation unique qui ferait donc disparaître l'allocation personnalisée d'autonomie  (APA) spécifique aux plus de 60 ans.

Une logique d'aide sociale

Malgré les débats qui se déroulent sur ce sujet au sein même de la majorité parlementaire, le gouvernement maintient le droit à compensation sous conditions de ressources, non pour son ouverture mais pour son montant. « Question d'équité », assure la ministre. C'est un point de désaccord fondamental avec le monde associatif, qui voit ainsi la compensation maintenue dans le champ de l'aide sociale. Tous auraient voulu voir le nouveau risque pris en charge selon les mêmes principes universels que la maladie. Cela ne risque-t-il pas de décourager le travail, que le gouvernement entend promouvoir par ailleurs ?, demandent certains.

Autre point de désaccord persistant : le niveau de ressources garanti en cas d'impossibilité de travailler, qui devrait être « égal au SMIC » pour la plupart des associations comme l'APF, la FNATH ou le groupe des 25, du moins « accroché au SMIC » pour être revalorisé au même rythme que lui, pour l'Unapei. Le gouvernement veut le maintenir comme un minimum social, c'est-à-dire, de son point de vue, forcément en retrait par rapport à un revenu d'activité. Là encore, on reste dans l'aide sociale.

Sur l'accessibilité, les associations dénoncent toutes le manque d'ambition du projet. Celles qui représentent les handicapés moteurs soulignent qu'aucun délai n'est imposé pour la mise aux normes du bâti, de la voirie ou des moyens de transport existants, et que les commerces restent à l'abri des obligations formulées pour les autres lieux recevant du public. La FNATH, par exemple, demande que la loi retienne un délai de cinq ans pour les travaux et une mise sous astreinte des récalcitrants. Autre insatisfaction : celle de l'Union nationale pour l'insertion sociale des déficients auditifs (Unisda) qui ne se satisfait pas des objectifs modestes retenus pour le sous-titrage des programmes télévisés : elle demande leur accessibilité intégrale. Quant à l'Unapei, elle rappelle les difficultés de repérage dans l'espace et dans le temps des handicapés mentaux et demande le développement d'une signalétique et de points d'accueil adaptés. Tous ces types d'équipements pourraient servir bien au-delà des seules personnes répertoriées comme handicapées, rappellent les associations, lasses de s'entendre opposer des « arguments économiques à courte vue ».

Le droit à l'éducation est un autre point problématique. De nombreuses associations, dont le groupe des 25, souhaitent voir renforcées les obligations d'accueil de l'Education nationale et s'inquiètent des moyens qu'elle mettra effectivement en œuvre pour former les enseignants spécialisés et les indispensables personnels d'accompagnement. L'Unapei aussi voudrait voir les jeunes enfants intégrés, notamment à l'école maternelle, et pas seulement une ou deux demi-journées par semaine. Mais elle rappelle également la nécessité d'offrir en nombre suffisant des places en établissement spécialisé aux enfants gravement handicapés pour qui « l'intégration scolaire demeure un objectif hors de portée ». Plus inquiète, l'association Droits aux soins et à une place adaptée (DSP) craint que les objectifs d'intégration ne dissimulent carrément la « suppression de l'éducation spéciale » et de ses acquis. Faux débat ? Le gouvernement promet de répondre, à terme, aux souhaits des uns et des autres, en favorisant l'intégration et en créant des places en établissement.

M.-J. M.

Notes

(1)  Dont l'AFM, l'Alefpa, l'Anpihm, l'APAJH, les CEMEA, la Fagerh, Fait 21, Handicap International, les PEP et de nombreuses organisations dans la mouvance de l'Education nationale.

(2)  Le Groupe de réflexion pour la compensation des incapacités à tout âge rassemble l'Adehpa, l'ADMR, l'AFM, l'APF, le CNRPA, la FEHAP, la FNATH, la Fnadepa, la FNG, le GIHP, la Mutualité française, l'Unassad, l'Unccas et l'Uniopss.

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