Après un vote en première lecture au Sénat, le 1ermars dernier (1), le projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées (2) vient en première lecture devant les députés à partir du 1er juin (3). L'occasion de faire un petit tour d'horizon des principaux amendements adoptés, du 11 au 13 mai, par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale. Le texte doit encore être complété par les amendements du gouvernement, qui seront discutés en séance plénière. Leur contenu n'est, à ce jour, pas encore connu, à l'exception de quelques indications (4).
La commission propose, en premier lieu, une nouvelle définition du handicap pour en couvrir tous les aspects, et notamment les polyhandicaps. Dans ce cadre, l'instance a eu également à cœur d'éliminer tout critère d'âge, principe que l'on retrouve dans plusieurs autres dispositions. En outre, alors que le projet de loi procédait à une énumération non exhaustive des droits fondamentaux garantis par la solidarité nationale aux personnes handicapées (droit à la liberté du choix de vie, à l'éducation...), la commission préfère évoquer l'idée de « plein exercice de la citoyenneté » assuré à toute personne handicapée.
Par ailleurs, elle propose d'élargir la définition du droit à compensation pour y inclure le rôle des aidants familiaux et des associations représentatives et le droit à un temps de répit pour l'entourage. Idée que l'on retrouve au fil d'autres amendements à la loi. Autre proposition : les besoins de compensation seront évalués par une équipe pluridisciplinaire « labellisée » .
Plus généralement, la commission souhaite la disparition du terme « intégration » (à l'école, dans l'emploi...) au profit d'expressions jugées moins discriminantes ( « insertion », « scolarisation »...). Elle désire en outre que les textes réglementaires d'application paraissent dans les six mois suivant la publication de la loi et prie, enfin, le gouvernement de déposer devant les chambres parlementaires tous les trois ans un rapport sur la mise en œuvre de la politique nationale en matière de handicap.
De plus, la commission apporte plusieurs modifications à la définition de la prestation de compensation. Elle supprime d'abord les barrières d'âge, jugées par le rapporteur à l'Assemblée nationale, Jean-François Chossy, discriminatoires. Ce dernier a ainsi pour ambition d'inciter « d'ici à cinq ans » le gouvernement à envisager la fusion des prestations actuellement attribuées jusqu'à l'âge de 20 ans (allocation d'éducation spéciale), après l'âge de 60 ans (allocation personnalisée d'autonomie), et entre ces deux âges (prestation de compensation). En outre, la liste des aides pouvant être prises en charge par la prestation de compensation est, selon le texte amendé, étendue. Surtout, faisant un « geste symbolique très fort » - qui devrait être rejeté au cours des débats à l'Assemblée nationale pour cause « d'irrecevabilité financière » -, la commission adopte le principe du caractère universel de la prestation. Autrement dit, elle supprime les conditions de ressources.
Dans un autre registre, s'agissant de l'allocation aux adultes handicapés, la commission préconise de faire varier son montant en fonction de l'évolution du SMIC et de prévoir son maintien durant les hospitalisations de plus de 60 jours (5).
Enfin, tout en étendant les missions des centres d'aide par le travail, le projet de loi amendé accorde aux personnes accueillies dans ces structures le bénéfice du complément de libre choix d'activité de la prestation d'accueil du jeune enfant et associe les parents à la gestion de ces établissements. En outre, il suggère une définition légale des missions des maisons d'accueil spécialisées et des foyers d'accueil médicalisés.
En matière d'éducation, des amendements visent à rendre obligatoire l'inscription des enfants handicapés dans l'école la plus proche du domicile. Et à prévoir un enseignant référent pour les jeunes concernés tout au long de leur scolarité.
Les dispositions facilitant l'insertion dans l'emploi des personnes handicapées sont aussi remodelées. L'objectif est, par exemple, de porter le montant maximal de la contribution à l'Agefiph à 1 500 fois le SMIC (au lieu de 600 fois dans le cas général, selon le projet de loi) pour les employeurs n'ayant déclaré, pendant quatre ans, aucun emploi occupé par un bénéficiaire de l'obligation d'emploi, ni fait application d'un accord collectif agréé à ce titre. Des amendements consolident, par ailleurs, le statut juridique des services d'insertion professionnelle spécialisés et intègrent dans le code des marchés publics la prise en compte de ces publics.
S'agissant des entreprises adaptées, qui doivent se substituer aux ateliers protégés, il est recommandé, à l'instar de ce que prévoit déjà le projet de loi pour les CAT, d'instaurer un dispositif passerelle pour les salariés des entreprises adaptées recrutés par une entreprise ordinaire.
Côté accessibilité du cadre bâti, relevons la proposition de créer un crédit d'impôt pour compenser partiellement le surcoût généré par les dépenses de mise en accessibilité d'un logement neuf ou ancien ainsi qu'une obligation pour les communes ou groupements de communes de plus de 5 000 habitants de planifier la création d'établissements d'hébergement de personnes handicapées et de constituer pour ce faire des réserves foncières. Un amendement vise également à assimiler les foyers d'hébergement et les foyers de vie à des logements du parc social.
En ce qui concerne les maisons départementales des personnes handicapées, si aucun éclairage n'est apporté sur leur statut juridique (6), leurs missions sont précisées. Il est également proposé de créer des maisons régionales des personnes handicapées.
Pour finir, les attributions et le statut juridique des auxiliaires de vie sociale sont clarifiés (7). Enfin, à l'image de la convention élaborée pour l'assurabilité des risques de santé aggravés (8), un amendement oblige l'Etat à s'engager à conclure une convention avec les professionnels de l'assurance et du crédit et les associations de personnes handicapées et de consommateurs afin de faciliter l'accès des intéressés à l'emprunt et à l'assurance.
(1) Voir ASH n° 2349 du 5-03-04.
(2) Voir ASH n° 2344 du 30-01-04.
(3) Relevons que, pour permettre aux personnes handicapées de suivre les débats à l'Assemblée nationale, une salle leur sera rendue accessible.
(4) Voir ASH n° 2360 du 21-05-04.
(5) Une réduction est jusqu'à présent opérée. Voir ASH n° 2341 du 9-01-04.
(6) Le rapport d'étape Briet-Jamet préconise que le département mette en place et gère ces maisons départementales des personnes handicapées - Voir ASH n° 2356 du 23-04-04.
(7) Voir ASH n° 2350 du 12-03-04.
(8) Voir ASH n° 2355 du 16-04-04.