La mission de préfiguration de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) ayant remis, le 13 avril, un « document d'étape soumis à la concertation » (1), sept grandes associations ou fédérations (2) se sont adressées ensemble, le 17 mai, à ses membres, Raoul Briet et Pierre Jamet, pour leur demander d'intégrer à leur rapport final trois séries d'inflexions. Avec un objectif unique : renforcer, dans le dispositif décentralisé proposé, le rôle de l'Etat comme garant de l'égalité de traitement des personnes handicapées et des personnes âgées sur l'ensemble du territoire.
Premier souci : maintenir les crédits de l'assurance maladie transférés vers la CNSA dans le giron de la loi de financement de la sécurité sociale. Il s'agit de permettre à la représentation nationale d'en débattre chaque année et d'attribuer au secteur médico-social, non pas une enveloppe arrêtée une fois pour toutes, juste actualisée de l'inflation, mais des financements évolutifs, capables de répondre à l'augmentation annoncée des besoins et au souhait d'une prise en charge individualisée. Autant d'objectifs qui seraient mieux servis si une loi de programmation assurait une visibilité pluriannuelle et une meilleure lisibilité des engagements financiers de la collectivité.
Deuxième impératif : doter la CNSA des moyens de veiller au bon usage de ses fonds et à l'égalité de traitement des personnes handicapées, quel que soit leur lieu de vie. Dans cette optique, la création de référentiels communs d'évaluation des situations de handicap s'impose. De même que la gestion des futures maisons du handicap, non par des conseils généraux seuls maîtres chez eux, mais par des groupements d'intérêt public associant, aux côtés de l'Etat et des collectivités territoriales, les organisations d'usagers et les fédérations professionnelles. Des règles interdisant les reports de crédits et la thésaurisation et autorisant les seuls versements aux opérations en cours devraient être adoptées. Enfin, des contrats d'objectifs et de moyens passés entre la caisse et chaque département devraient permettre d'adapter les règles à la diversité des situations. Aux défenseurs du principe d'autonomie des collectivités territoriales, les sept organisations rappellent que, dans le domaine médico- social, seule une proportion limitée des ressources utilisées proviendront des impôts locaux. Les « premiers contribuables » seront l'Etat et l'assurance maladie. Il faut en tirer les conséquences, jugent-elles.
Dernier pare-feu : prévoir une procédure adaptée dans l'éventualité d'un département défaillant. En cas d'inexécution des obligations juridiques ou budgétaires ou de non-respect du contrat d'objectifs, un magistrat de la chambre régionale des comptes devrait pouvoir être substitué au président du conseil général. En outre, l'instance de concertation départementale associant les organisations d'usagers et de professionnels devrait être dotée d'un droit d'alerte.
De son côté, l'Association nationale des instituts de rééducation (AIRe) (3) exprime, dans une motion adoptée le 12 mai lors de son assemblée générale, ses vives inquiétudes sur le rapport Briet-Jamet. Selon elle, celui-ci place le secteur social et médico-social sous la tutelle du département sans instance de régulation et fait disparaître les associations « en tant qu'acteurs politiques et techniques légitimes ». Elle craint également que ses orientations ne réduisent le sujet « à la seule dimension de sa perte d'autonomie » et ne transforment le professionnel en un simple exécutant. « Nous exigeons la prise en compte de la complexité des problématiques des jeunes concernés par nos actions et revendiquons la reconnaissance de la dimension thérapeutique dans les réponses à apporter », affirment les signataires de la motion, qui souhaitent être reçus par les rapporteurs de la mission.
(1) Voir ASH n° 2356 du 23-04-04. Sur les premières réactions du secteur, voir ASH n° 2357 du 30-04-04.
(2) L'APF, la FHF, la FNATH, l'Unafam, l'Unapei, l'Unccas et l'Uniopss.
(3) AIRe : 17, rue Monseigneur-Millaux - BP 40 - 35221 Châteaubourg - Tél. 02 99 04 69 55.