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Plusieurs associations dénoncent le risque de « banalisation du fichage »

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Une trop grande complexité, et surtout une rupture de l'équilibre entre le « progrès informatique » et la préservation du droit à la vie privée et des libertés. Tels sont, pour l'intercollectif Droits et libertés face à l'informatisation de la société (DELIS) (1), les deux principales caractéristiques de la réforme de la loi informatique et libertés, adoptée en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 30 avril (2) et visant à transposer la directive européenne de 1995 « relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données ». «  Nous alertons sur le risque d'un vote du projet de loi en l'état actuel, qui constituerait un abaissement très sérieux du niveau de protection à l'égard des traitements de données personnelles  », s'alarme DELIS dans un appel lancé le 16 avril à son initiative et déjà signé par 260 associations et organisations, dont l'Association nationale des assistants de service social, la Confédération française des professions sociales et le Groupe d'information et de soutien des immigrés.

« Données sensibles »...

Premier danger selon les signataires : le projet de loi prévoit des dérogations à toute déclaration ou autorisation préalable au traitement de fichiers. Il permettrait aussi, « pour les stricts besoins de la lutte contre la fraude », à des personnes morales victimes de délits de stocker des données concernant les auteurs d'infractions. Cette disposition « banalise le fichage », estiment les associations, en le déléguant à des « organismes dépourvus de mission de service public ».

Pour préserver et améliorer les garanties de protection du droit des personnes, DELIS avait notamment proposé un amendement visant à élargir la notion de «  données sensibles », qui doivent être recueillies seulement avec le consentement des intéressés et dont le traitement est placé sous la vigilance de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). Il souhaitait que bénéficient de cette protection maximale les informations concernant les caractéristiques génétiques des personnes, celles « relatives à la santé ou à la vie sexuelle de celles-ci ou à l'intimité de leur vie privée dans ses composantes psychiques et sociales ». Autrement dit les informations pouvant être détenues par les travailleurs sociaux. Mais cette proposition a été rejetée par les parlementaires. DELIS n'a pas été entendu non plus sur sa volonté d'interdire l'utilisation des données personnelles « pour d'autres finalités que celles qui ont présidé à leur collecte initiale ». Il souhaitait aussi les rendre « anonymes pour tout traitement statistique, scientifique ou historique associé ».

Membre de DELIS, le Collectif pour les droits des citoyens face à l'informatisation de l'action sociale est particulièrement en alerte. « Nous redoutons à la fois le détournement de la finalité des fichiers contenant des données sociales et l'utilisation de l'outil informatique pour catégoriser des situations », explique Pierre Suesser, son porte-parole. Le terrain est d'autant plus glissant que ces données consistent le plus souvent en des appréciations subjectives sur le comportement des personnes, comme le rappelait la CNIL dans sa délibération du 13 octobre 1998, à propos du progiciel ANIS, mis en place par le département de l'Ain (3). « Dans le contexte actuel de l'élaboration du projet de loi sur la prévention de la délinquance, les questions liées aux fichiers des travailleurs sociaux risquent de se poser », ajoute Pierre Suesser.

Les usagers à la CNIL

Les signataires de l'appel réclament d'ailleurs que tout rapprochement entre fichiers soit strictement encadré. Ils souhaitent également que la CNIL soit élargie dans sa composition aux représentants des usagers et aux associations de défense des droits de l'Homme et qu'elle bénéficie de moyens renforcés de contrôle. L'intercollectif envisage de saisir la Cour de justice de Luxembourg sur les conditions de transposition de la directive si le Sénat ne répondait pas à ses exigences. Le texte européen précise en effet que la protection des droits garantie par les lois nationales existantes ne doit pas être diminuée.

M. LB.

Notes

(1)  Ligue des droits de l'Homme, Collectif informatique, fichiers et citoyenneté, Collectif pour les droits des citoyens face à l'informatisation de l'action sociale, Collectif des associations et des syndicats contre la connexion des fichiers sociaux et fiscaux. Contact : DELIS, Pierre Suesser - E-mail : psuesser@wanadoo.fr - Tél. 06 88 98 31 72.

(2)  Le texte doit encore être examiné par le Sénat.

(3)  Voir ASH n° 2095 du 27-11-98.

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