Un mineur étranger peut, une fois entré sur le territoire français, ouvrir droit à des prestations familiales à partir du moment où un de ses parents réside régulièrement en France. Telle est, en substance, la solution retenue le 16 avril par la Cour de cassation réunie en assemblée plénière (1).
L'affaire opposait le directeur régional des affaires sanitaires et sociales des Pays-de-la-Loire et une mère de famille de nationalité congolaise qui avait sollicité le bénéfice des prestations familiales, à compter du 1er mars 1993, en faveur de ses deux enfants nés au Congo en 1981 et 1984, et entrés régulièrement en France avec elle en septembre 1991. La caisse d'allocations familiales (CAF) ne lui en a accordé le bénéfice qu'à compter du 1er février 1995, date à laquelle l'intéressée a présenté le certificat de contrôle que lui a délivré, pour ses enfants, l'Office des migrations internationales (OMI) le 13 janvier 1995. Ce faisant, la CAF s'est basée sur la réglementation en vigueur- en l'occurrence l'article D. 511-2 du code de la sécurité sociale -, qui exige que l'enfant étranger de moins de 16 ans produise, à défaut d'un extrait d'acte de naissance en France ou d'un des titres ou documents listés par l'article D. 511-1 du même code (2), un « certificat de contrôle médical délivré par l'OMI à l'issue de la procédure de regroupement familial et comportant le nom de l'enfant ». Et ce afin de prouver la régularité de l'entrée et du séjour du mineur. Pour la caisse, les droits ne pouvaient être ouverts avant que les enfants ne soient titulaires de la pièce exigée. La cour d'appel lui a donné tort. L'assemblée plénière a fait de même. « Les étrangers résidant régulièrement en France avec leurs enfants mineurs bénéficient de plein droit des prestations familiales », affirme-t-elle ainsi, en faisant référence aux articles L. 512-1 et L. 512-2 du code de la sécurité sociale. Or il n'était pas contesté que la mère des deux enfants congolais résidait régulièrement en France depuis le 27 septembre 1991 avec eux. La Haute Juridiction considère donc que le juge d'appel a eu raison d'en déduire, « par une interprétation des textes précités, conforme aux exigences des articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales », que les prestations familiales étaient dues à compter du 1er mars 1993.
Cette décision conduit à s'interroger sur la valeur, dans le processus d'une demande de prestations familiales, du certificat de contrôle médical délivré par l'OMI exigé par l'article D. 511-2 du code de la sécurité sociale, la Cour de cassation s'étant finalement attachée uniquement à la situation des parents plutôt qu'à celle des enfants. Montrerait-elle la même souplesse face à des mineurs étrangers placés dans la même situation mais entrés clandestinement en France ? La question reste posée.
(1) Pour mémoire, la réunion en assemblée plénière intervient de manière obligatoire lorsqu'il y a résistance de la cour d'appel de renvoi après un premier arrêt de cassation et de manière facultative quand l'affaire pose une question de principe.
(2) Voir ASH n° 2324 du 12-09-03.