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Critiques et questions multiples autour du rapport Briet-Jamet

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Refus en bloc de la logique qui préside à la mise en place de Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) et du rapport Briet-Jamet (1) qui la décline, pour le Conseil national des retraités et personnes âgées (CNRPA). Discussion serrée et pari sur l'amélioration possible des textes pour le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH). Poursuivant les consultations depuis la récente remise de leur « document d'étape », Raoul Briet et Pierre Jamet ont débattu successivement avec les deux instances les 20 et 21 avril.

L'ambiance était houleuse lors de leur rencontre avec le CNRPA et les comités départementaux et régionaux des personnes âgées, qui « rejettent » le projet. D'abord, explique le vice-président du CNRPA, Georges Grulois, parce qu'il « ne touche en rien aux barrières d'âge » ni aux dispositifs séparés de compensation et de prise en charge. Autre reproche : il reste « très éloigné d'une logique de solidarité nationale en ne levant les nouvelles recettes que sur les salariés et, un peu, sur le patrimoine ». Troisième motif d'inquiétude : le transfert au département de compétences et de crédits qui relèvent de la sécurité sociale « porte le risque d'un démantèlement de l'assurance maladie, bien que la mission s'en défende. Le fait d'isoler des personnes fragiles peut conduire rapidement à une stigmatisation de leurs dépenses, qu'il sera alors très facile de remettre en cause ou de contingenter ». Enfin, « le système porte en soi tous les germes de disparité ». L'expérience de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) montre, notamment, que les modalités d'évaluation laissent beaucoup de marge de manœuvre aux conseils généraux. Le CNRPA voudrait, à cet égard, voir reprendre les propositions formulées dans un récent rapport du Conseil économique et social (2).

Un texte qui peut évoluer ?

Même si beaucoup d'associations du secteur du handicap partagent ces critiques ou ces craintes, leur attitude est plus pragmatique. Au CNCPH, le parti retenu a été « d'interroger la mission pour bien éclairer ses intentions, explique son président, Jean-Marie Schléret, de faire valoir nos points de vue, et de ne prendre position que lorsque le gouvernement fera connaître ses intentions ». « Il s'agit d'un rapport d'étape qui peut encore évoluer », martèle Marie-Sophie Desaulle, présidente de l'Association des paralysés de France (APF).

Même si l'Unapei tient à rappeler qu'elle « demeure opposée à la logique générale du rapport qui procède davantage d'un transfert de l'ensemble du dossier du handicap au département que du mécanisme de délégation contrôlée qu'elle appelle de ses vœux », l'idée de la gestion de proximité, par le conseil général, ne suscite guère d'opposition de principe dans le secteur, au contraire. Ses modalités, en revanche, posent problème. « On ne voit pas trop quels sont les mécanismes de régulation, de garantie ni de contrôle, notamment de la part de l'Etat », résume Jean-Marie Schléret. « Les départements reçoivent beaucoup de pouvoirs, mais sans que des contre-pouvoirs soient organisés », ajoute Marie-Sophie Desaulle.

Parmi les points qui passent mal : la totale latitude laissée aux départements pour l'organisation des maisons du handicap. A la lumière des disparités constatées dans le fonctionnement des sites pour la vie autonome, les associations relancent leur idée d'une gestion par un groupement d'intérêt public (GIP) pluripartite. Même réprobation pour la composition de la commission départementale de solidarité pour l'autonomie : « Qu'elle soit présidée par le président du conseil général, soit ! Mais que ses membres soient tous nommés par lui, c'est inenvisageable. C'est à chaque instance représentée de les désigner », précise l'APF. D'autant que sa compétence ne devrait pas être limitée à la compensation et à l'aide aux personnes, mais devrait s'étendre à l'ensemble des politiques du handicap (accessibilité, emploi) et de la dépendance qui ne relèvent pas toutes du conseil général.

Autre point très sensible : l'équipe pluridisciplinaire d'évaluation doit être indépendante du conseil général, lequel ne devrait pas (contrairement à ce qui se passe pour l'APA) « être décideur et financeur ». Elle pourrait dépendre du GIP ou de l'Etat, suggèrent les associations.

Plus globalement, pour que la CNSA puisse peser sur les orientations et garantir une certaine égalité de traitement entre les territoires, elle devrait signer avec les départements des conventions d'objectifs sur l'ensemble des compétences, pas seulement, comme il est prévu, sur les seules créations d'établissements, insistent les associations. Et c'est l'Etat qui devrait contrôler leur exécution, précise l'Unapei.

Reste le problème majeur du financement, posé par les associations de personnes comme par les fédérations d'établissements, dans le secteur du handicap aussi bien que dans celui des personnes âgées. L'assurance maladie transférera-t- elle une « enveloppe fermée », « pétrifiée à son niveau actuel », comme le dit la Fédération hospitalière de France (FHF)  ? Ce serait un « véritable désengagement de l'assurance maladie, inadmissible au regard des retards déjà dénoncés et des perspectives d'évolution démographique », juge Alain Villez, conseiller technique de l'Uniopss. « Il faut absolument que l'objectif de dépenses pour les personnes âgées et les personnes handicapées connaisse une évolution plus dynamique que la moyenne », insiste la FHF. Et qu'il continue d'être discuté chaque année par le Parlement, précise Marie-Sophie Desaulle.

Ultime coup de patte : ce rapport ultra-décentralisateur mentionne à peine les communes et pas du tout les centres communaux d'action sociale, remarque l'Unccas. Les « acteurs de terrain » sont décidément réduits à la « portion congrue ». Enfin, dernière question pratique, posée par l'Unassad, « inquiète de la quantité de dossiers » confiée à des départements déjà chargés et dans un délai très court : « Ne risque-t-on pas l'embolie ? »

M.-J.  M.

Notes

(1)  Voir ASH n° 2356 du 23-04-04.

(2)  Voir ASH n° 2348 du 27-02-04.

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