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Le rapport d'étape Briet-Jamet propose de confier la perte d'autonomie à la compétence du département et de la CNSA

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Au département, le pilotage et la responsabilité de l'ensemble des établissements et services médico-sociaux pour personnes âgées et pour personnes handicapées. A la future Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), un rôle de répartition des fonds et de régulation. Telles sont les grandes lignes du « document d'étape » de la mission de préfiguration de la CNSA confiée à Raoul Briet et à Pierre Jamet (1). Il s'inscrit, sans surprise, dans le cadre déjà esquissé par le gouvernement (2) et propose de pousser au maximum sa logique de décentralisation.

Le texte ayant été envoyé aux organisations concernées le 13 avril, Raoul Briet et Pierre Jamet ont entamé un nouveau round de concertation. Ils ont rencontré, le 20 avril, le Conseil national des retraités et personnes âgées, le 21 avril, la commission permanente du Conseil national consultatif des personnes handicapées, puis les représentants du secteur des personnes âgées (aide à domicile non comprise) et devaient consulter, le 22 avril, les confédérations syndicales. Leur rapport définitif est annoncé pour la fin mai ou le début juin. Mais le gouvernement ne cache pas qu'il pourrait déjà s'inspirer de leurs propositions pour préparer les prochaines étapes législatives.

Pour une « gestion de proximité renforcée »

« La compensation individualisée des besoins » des personnes handicapées ou en perte d'autonomie « exige de passer d'une logique structurée autour de l'attribution de prestations à une logique partant de la personne ». Ce qui implique « une gestion de proximité renforcée ». « Le département a une vocation naturelle à assurer cette charge. » Tel est le point de départ de l'approche « délibérément pragmatique » retenue par la mission.

Dans cette logique, c'est au département de mettre en place et de gérer la maison départementale du handicap prévue par le projet de loi sur les droits des personnes handicapées. Il s'agit « d'une fonction à assumer et non d'une institution à créer », indique le rapport, pour laquelle il serait « inopportun » d' « imposer la création d'une structure supplémentaire ». Loin d'être un lieu unique, elle devra d'ailleurs « s'appuyer sur les circonscriptions d'action sociale des départements ». Autrement dit, il s'agirait de créer un nouveau service départemental plutôt qu'une institution autonome par rapport à son financeur comme en rêvaient les associations.

Plus largement, le département devrait se voir attribuer la totalité des « compétences de planification et d'autorisation » mais aussi « de tarification, de financement et de tutelle » des établissements et services pour personnes âgées (EHPAD, SSIAD), pour personnes handicapées adultes (FAM, MAS et CAT) et d'une partie des établissements et services d'enseignement et d'éducation spéciale (IMP, IME, IR et Sessad). Cette responsabilité générale porterait aussi sur les dépenses actuellement à la charge de l'assurance maladie, ce qui suppose soit une délégation de compétence de l'Etat (en lieu et place des directions départementales des affaires sanitaires et sociales et des agences régionales de l'hospitalisation qui l'assurent actuellement), soit un transfert complet de compétence, « y compris pour la partie soins » (3). La mission préfère nettement la deuxième solution. Tout cela suppose « naturellement » que des dispositions légales « assurent le strict maintien des droits » du point de vue du champ des bénéficiaires, de la nature de la prestation et de son étendue, précise le rapport.

Une commission départementale de solidarité pour l'autonomie pourrait servir d'instance d'analyse et d'évaluation. Le département devrait lui rendre compte, au moins une fois par an, des politiques menées et des orientations. Une annexe au budget devrait aussi détailler l'usage des fonds, qu'ils viennent de la CNSA ou des ressources propres à la collectivité. Seules mentions du rôle laissé à l'Etat :il peut servir de recours en cas de « dysfonctionnement grave » et garde la faculté de mener des missions d'inspection et de contrôle dans les établissements.

Une double mission de financement et de régulation

Ce transfert « d'un ensemble significatif de responsabilités » doit s'accompagner- les deux propositions sont « indissociables »  - de la mise en place, au plan national, d'une « institution forte » capable de « satisfaire à l'exigence d'un traitement équitable sur l'ensemble du territoire  » et de « garantir la cohérence des politiques menées ». C'est l'un des rôles dévolus à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie qui se verrait donc attribuer une  « mission de régulation ». Celle-ci inclurait la correction des disparités géographiques d'équipement, par la signature de contrats d'objectifs pluriannuels avec les départements ; la structuration des actions d'étude et de recherche, par le développement de liens conventionnels avec les organismes existants ; une « aide aux responsables locaux », par la définition d'outils d'évaluation et la diffusion d'informations fiables sur les aides techniques. Cette dernière mission rendrait inutile la création d'une agence nationale du handicap et conduit la mission à préférer la dénomination d' « agence » plutôt que « caisse » pour ce qui deviendrait alors l'ANSA.

Autre attribution : « contribuer au financement » des politiques menées par les départements « sous leur responsabilité, y compris financière », le périmètre d'intervention de la CNSA devant d'ailleurs coïncider avec leur champ de compétence. Il inclurait donc, outre les différents types d'établissements déjà cités, la part Etat de l'allocation personnalisée d'autonomie, les services de soins et d'aide à domicile, les centres locaux d'information et de coordination (CLIC), les services d'auxiliaires de vie scolaire, les sites pour la vie autonome et autres dispositifs pour personnes handicapées, enfin la prestation de compensation telle que définie par le projet de loi sur les droits des handicapés.

La caisse disposerait de deux types de ressources :celles qui lui sont affectées en propre ( notamment par la cotisation assise sur la suppression d'un jour férié), évaluées à 2,1 milliards d'euros par an ; et celles qui compenseraient chaque année le transfert de compétence, qui viendraient de l'assurance maladie et du budget de l'Etat, et qui pourraient avoisiner les 11,2 milliards d'euros. Cette seconde enveloppe devrait être calculée sur la base des dépenses effectives constatées l'année précédente et pourrait être actualisée du coût de la vie, propose la mission. Cette notion de transfert « d'enveloppes fermées » (c'est-à-dire fixes) apparaît plusieurs fois dans le texte, qui ne semble pas exclure par ailleurs le maintien d'un lien avec le vote annuel de la loi de financement de la sécurité sociale (lequel autorise une augmentation différenciée, par exemple en faveur du secteur des personnes âgées, actuellement le plus mal doté). Un point crucial qui nourrit les inquiétudes des opposants à la caisse et demande à être éclairci.

Pas moins de quatre organismes devraient participer à la « gouvernance » de la caisse : un conseil de surveillance, chargé de l'orientation stratégique et du contrôle, où siégeraient des représentants des élus (parlementaires et conseils généraux), des organismes de protection sociale, des usagers (trois pour les personnes âgées et autant pour les personnes handicapées) et des personnalités qualifiées ; un directoire de trois membres nommés par le gouvernement ; un conseil scientifique ; enfin un conseil de tutelle assurant la représentation des ministères concernés, son chef de file participant aux travaux du conseil de surveillance.

M.-J.M.

Notes

(1)  La mission a été créée dès l'annonce du plan Raffarin « de solidarité pour les personnes dépendantes » - Voir ASH n° 2333 du 14-11-03.

(2)  Notamment dans le cadre des projets de loi relatif aux responsabilités locales (voir ASH n° 2327 du 3-10-03), instituant la CNSA (voir ASH n° 2342 du 16-01-04) et relatif à l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées (voir ASH n° 2344 du 30-01-04).

(3)  Pour répondre aux inquiétudes souvent exprimées, la mission affirme en préambule que la prise en charge des soins de droit commun doit continuer à relever de l'assurance maladie, quels que soient l'âge ou les déficiences des assurés sociaux.

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