On s'attendait à un gouvernement resserré. C'est finalement une équipe élargie qu'ont constituée le 31 mars Jean-Pierre Raffarin, reconduit la veille dans ses fonctions de Premier ministre, et le Chef de l'Etat. Le nouveau gouvernement compte désormais 44 ministres, ministres délégués et secrétaires d'Etat - presque tous UMP à l'exception notable de Gilles de Robien (UDF) -, alors qu'ils n'étaient que 38 précédemment. Parmi ces titulaires de portefeuille, le nombre de femmes reste peu ou prou stable : elles sont 10, contre 11 auparavant.
L'architecture globale du gouvernement reste finalement très classique, organisée autour de quatre grands pôles : le ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, entre les mains de Nicolas Sarkozy, seul ministre d'Etat ; le ministère de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, confié à François Fillon ; le ministre de l'Intérieur, de la Sécurité intérieure et des Libertés locales, dévolu à Dominique de Villepin ; et le ministère de l'Emploi, du Travail et de la Cohésion sociale, à la tête duquel est placé Jean-Louis Borloo.
A ce dernier incombe désormais la lourde tâche d'incarner l'inflexion sociale du gouvernement. « Malgré une augmentation très considérable des dépenses sociales, la pauvreté n'a pas reculé et l'exclusion non plus[...]. C'est pourquoi j'ai souhaité que l'on crée un ministère de la Cohésion sociale pour gérer l'ensemble de ces problèmes, depuis le logement jusqu'au travail en passant par l'intégration », a expliqué Jacques Chirac le 1er avril lors d'une intervention télévisée au cours de laquelle il a souligné la nécessité de poursuivre les réformes engagées - au premier rang desquelles celle de l'assurance maladie - mais de façon plus pédagogique et en privilégiant la justice sociale. Entendant par là montrer qu'il avait entendu le message envoyé via les urnes à l'occasion des élections régionales.
Dans le troisième gouvernement de Jean-Pierre Raffarin -qui est apparu, dans son discours de politique générale du 5 avril, nettement plus en retrait que le chef de l'Etat sur la question sociale -, Jean-Louis Borloo sera assisté, au sein du large portefeuille qu'il appelait de ses vœux depuis longtemps, de deux ministres délégués et de trois secrétaires d'Etat, tous dépourvus d'expérience gouvernementale. Marc-Philippe Daubresse occupera par exemple sous sa tutelle le poste de secrétaire d'Etat au logement, un secteur qui quitte le giron de l'équipement. Quant à la lutte contre la précarité et l'exclusion, elle est désormais nantie d'un ministère délégué, et non plus d'un simple secrétariat d'Etat. C'est Nelly Olin qui en a la charge.
D'une façon générale, dans le gouvernement Raffarin III, on note un accroissement sensible du nombre de portefeuilles consacrés aux thématiques sociales (qui passent de 9 à 13) et leur promotion dans la hiérarchie gouvernementale. Hubert Falco quitte ainsi le rang de secrétaire d'Etat pour celui de ministre délégué aux personnes âgées, placé désormais sous la houlette du ministère de la Santé et de la Protection sociale. Le ministère de la Famille et de l'Enfance, confié à Marie-Josée Roig, devient autonome, dégagé de la tutelle traditionnelle des Affaires sociales. De même, la parité et l'égalité professionnelle ne relèvent plus d'un ministère délégué mais d'un ministère de plein droit.
« On ne nomme pas un gouvernement pour une durée déterminée mais pour atteindre des objectifs », a expliqué Jacques Chirac le 1er avril. Raffarin III aura-t-il, cependant, le temps d'atteindre les siens ? Le Premier ministre, le 5 avril, a demandé aux parlementaires, et obtenu, un « mandat d'action, un mandat pour la croissance et l'emploi, pour la cohésion sociale, pour la préparation de l'avenir ». Mais il reste seulement deux mois avant les élections européennes. Un nouveau revers de la majorité parlementaire est possible, sinon probable. Que fera alors le président de la République ?
Ministre : Jean-Louis Borloo Ministre délégué aux relations du travail :Gérard Larcher Ministre déléguée à la lutte contre la précarité et l'exclusion : Nelly Olin Secrétaire d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes : Laurent Hénart Secrétaire d'Etat au logement :Marc-Philippe Daubresse Secrétaire d'Etat à l'intégration et à l'égalité des chances : Catherine Vautrin
Le ministre délégué à la ville et à la rénovation urbaine sous Raffarin II était a priori le mieux placé pour être la « caution sociale » du nouveau gouvernement. C'est fort de la bataille contre le chômage et la dégradation des quartiers qu'il a menée à Valenciennes (Nord), dont il a été maire de 1989 à 2002, que cet ancien avocat d'affaires a présenté en août 2003 son projet de loi sur la rénovation urbaine, assortie de son volet contre le surendettement. Lors d'une visite présidentielle dans son ancien bastion, en octobre dernier, le ministre présentait ce projet comme l'illustration de l'engagement pour l'intégration pris par le chef de l'Etat lors de son discours de Troyes, en octobre 2002.
Plutôt apprécié des syndicats, auteur, en 2002, d'un réquisitoire contre la France Jacobine et la « techno- structure » ( Un homme en colère, Ed. Ramsay), Jean- Louis Borloo, 52 ans, est connu pour ne pas manier la langue de bois et être un homme d'action. Les travailleurs sociaux, dont il assure désormais la tutelle, auront certainement noté qu'il a dernièrement mis en cause la légitimité de Nicolas Sarkozy à proposer un projet de loi sur la prévention de la délinquance. Interministériel, ce dossier n'a pas eu le temps d'être arbitré par Matignon avant le remaniement.
Nommé pour incarner une nouvelle impulsion, mais seulement numéro 5 du gouvernement, Jean-Louis Borloo hérite d'un vaste portefeuille susceptible de répondre à la volonté d'une approche globale du problème de l'insertion sociale. Même si, lors de son discours de politique générale du 5 avril, le Premier ministre a davantage insisté sur la relance de la croissance et la réduction des dépenses publiques et été peu disert sur les moyens donnés au virage social promis par Jacques Chirac au lendemain des élections.
Sous la coupe du ministre : l'emploi, avec le concours d'un ministre délégué aux relations du travail, Gérard Larcher, et d'un secrétaire d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes, Laurent Hénart ; le logement, qui bénéficie désormais d'un secrétaire d'Etat attitré, Marc-Philippe Daubresse ; la lutte contre l'exclusion et la précarité, confiée à une ministre déléguée, Nelly Olin ;l'intégration et l'égalité des chances, pilotée par une secrétaire d'Etat, Catherine Vautrin ; et enfin la politique de la ville.
Le ministre continuera de piloter en direct la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine , désormais « entrée dans sa phase opérationnelle », a-t-il souligné le 2 avril en conseil des ministres. L'occasion pour lui d'indiquer qu'une charte de l'insertion, en cours d'élaboration par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, devrait favoriser l'embauche des habitants des quartiers par les entreprises. Dans chaque zone franche urbaine, l'Etat devrait signer prochainement, avec les collectivités locales et les partenaires économiques, une convention qui préciserait les modalités d'accueil des entreprises, ainsi que les conditions de formation et d'accès à l'emploi des résidents. Encore faudra-t-il que la rénovation urbaine, qui a réussi à mobiliser 30 milliards d'investissements sur cinq ans en temps de rigueur budgétaire, ne passe pas au second plan la question de crédits alloués à la politique du logement...
Jean-Louis Borloo devra également trancher l'épineuse question de l'aide médicale de l'Etat (AME), que le gouvernement cherche à réformer depuis deux ans. La députée (UMP) du Val-de-Marne Marie-Anne Montchamp planchait sur une alternative aux projets de décret depuis le mois de décembre et devait remettre les conclusions de ses travaux à François Fillon au mois de mai. Qu'adviendra-t-il de cette mission, la parlementaire ayant été nommée secrétaire d'Etat aux personnes handicapées ? « Elle est très attachée à la poursuite de ses travaux, même si elle ne pourra pas remettre elle-même le rapport », indique-t-on à son cabinet. Reste à savoir si cette ambition pourra être concrétisée avant que le nouveau ministre des Finances ne boucle lui-même le dossier.
Jean-Louis Borloo pilotera avec Gérard Larcher et Laurent Hénart le chantier de l'emploi, annoncé comme prioritaire. Le 1er avril, le chef de l'Etat a promis une « suspension » de la réforme de l'allocation de solidarité spécifique (ASS). Ce que confirme le ministère, même si Jean-Pierre Raffarin s'est pour sa part contenté, dans son discours de politique générale, d'indiquer que des « améliorations » seraient apportées à l'ASS dans le cadre de la réflexion menée pour accompagner les chômeurs en fin de droits, notamment « en leur donnant accès à la formation qualifiante ». Les associations de chômeurs sont également mobilisées sur le nouveau système d'indemnisation du chômage (voir ce numéro). Un dossier ultrasensible, tout comme celui du revenu minimum d'activité (voir ce numéro), et, plus largement, de l'insertion professionnelle. François Fillon avait également, rappelons-le, promis aux acteurs associatifs la création d'un contrat unique d'insertion, fusion des contrats emploi-solidarité et contrats emploi consolidé.
Quelle suite pour le projet de loi de mobilisation pour l'emploi amorcé par son prédécesseur ? Jean-Louis Borloo a annoncé le 6 avril, à l'Assemblée nationale, qu'il présenterait « dans les dix semaines » un « plan national de cohésion sociale » qui intégrerait ce projet. Le plan viserait également à corriger « les dix plus graves dysfonctionnements de la société française », a expliqué le ministre, parmi lesquels la « crise du logement », « la crise de l'école », les « écarts entre les territoires », ou encore les problèmes liés à l'intégration. Il devrait associer l'Etat, les régions, les départements, les villes, les organismes HLM, les caisses d'allocations familiales et les partenaires sociaux.
S'il a été sénateur des Yvelines et maire de Rambouillet, Gérard Larcher, 54 ans, est surtout connu du secteur social pour avoir été président de la Fédération hospitalière de France jusqu'à sa nomination. Vétérinaire de formation, il a été en charge des « nouvelles relations sociales » au bureau du RPR de 2000 à 2002 avant d'animer le groupe de réflexion sur la concertation entre syndicats et pouvoirs publics au sein de l'UMP.
Gérard Larcher copilotera-t-il le volet emploi du « plan de cohésion sociale » annoncé par Jean-Louis Borloo ? Les orientations du projet de loi initial de mobilisation pour l'emploi, qui devait s'inspirer des propositions des rapports de Virville et Marimbert sur la réforme du code du travail et du service public de l'emploi, seront-elles maintenues ? Le Premier ministre a bien rappelé son intention de moderniser le service public de l'emploi, « afin d'accompagner d'une manière personnalisée les demandes d'emploi », mais a éludé la question du contrôle des chômeurs. Le projet devait aussi intégrer celle des restructurations (la prévention des licenciements et le droit au reclassement), sur la base du résultat des négociations que les partenaires sociaux devaient conduire jusqu'au 8 avril. Si ces derniers parviennent à un accord sans que le gouvernement ait à trancher, il aura force de loi, a indiqué Jean-Pierre Raffarin lors de son discours de politique générale. Celui-ci a par ailleurs précisé qu'il fallait « lever les contraintes qui pèsent sur les entreprises et freinent leurs projets d'embauche ».
Le benjamin du gouvernement (35 ans), juriste d'entreprise, était député (UMP) de Meurthe-et-Moselle depuis 2002, adjoint au maire de Nancy. Le nouveau secrétaire d'Etat a d'ores et déjà déclaré vouloir faire en sorte que le « dossier de l'insertion des jeunes colle plus aux réalités du terrain ». Il est déjà connu par les réseaux locaux d'insertion pour s'être impliqué dans ce domaine.
Le gouvernement a voulu montrer sa détermination à agir pour l'insertion des jeunes en créant ce secrétariat d'Etat, alors qu'il avait supprimé la délégation interministérielle à l'insertion professionnelle et sociale des jeunes en décembre 2002. Objectif affiché : prolonger la loi sur la formation professionnelle en « créant un droit à la deuxième chance pour ceux sortis prématurément et sans qualification du système scolaire », selon Jean- Pierre Raffarin. François Fillon avait annoncé que, chaque année, l'Etat offrirait à 100 000 jeunes sans qualification la possibilité de suivre une formation ciblée aux métiers en mal de main-d'œuvre.
Laurent Hénart a, le 6 avril à l'Assemblée nationale, confirmé trois axes de travail : « faire en sorte que tous les acteurs du service public de l'emploi se mobilisent pour réorienter les jeunes chômeurs vers les secteurs qui souffrent d'une pénurie de main-d'œuvre » ; mettre en œuvre le contrat de professionnalisation et développer le dispositif des contrats jeunes en entreprise. « Nous allons redoubler d'énergie sur cette question avec un grand chantier qui s'ouvre devant nous, celui de la nouvelle chance offerte aux 60 000 jeunes qui sortent chaque année de notre système éducatif sans qualification », a-t-il ajouté.
Député (UDF, puis UMP) du Nord, maire de Lambersart depuis 1988 et vice-président de la communauté urbaine de Lille, Marc-Philippe Daubresse est l'auteur de plusieurs rapports sur le logement à l'Assemblée nationale. Le secrétaire d'Etat, âgé de 50 ans, présidait le Conseil national de l'habitat depuis deux ans et s'y est forgé une image d'homme à la fibre sociale. Rapporteur à l'Assemblée nationale du projet de loi sur la décentralisation, il a porté une oreille attentive aux demandes des associations, comme l'Uniopss, dont il a repris certains amendements.
Marc-Philippe Daubresse devra poursuivre les chantiers engagés par Gilles de Robien : relancer la construction locative sociale, notamment en encourageant les collectivités locales à édifier des logements sociaux et en incitant les propriétaires de logements vides à les mettre sur le marché, et veiller à la production d'une offre de logements à bas loyers en compensation des démolitions prévues dans le cadre du projet de loi sur la rénovation urbaine. Le secrétaire d'Etat devra encore s'atteler au projet de loi sur l'accession à la propriété, que Gilles de Robien n'a pas eu le temps de présenter, et mener à bien la réforme annoncée des organismes HLM pour « affirmer leur vocation sociale ». Mais surtout, il aura la responsabilité de l'organisation du grand débat national sur le logement des plus démunis annoncé pour l'automne par son prédécesseur.
L'ex-sénatrice (UMP) du Val-de-Marne et maire de Garges-lès-Gonesse, 63 ans, était membre du Haut Conseil à l'intégration depuis 2002, du Conseil national des villes et a participé à la commission Stasi sur la laïcité. Elle présidait également au Sénat le groupe d'études parlementaire sur la lutte contre la drogue et la toxicomanie et était membre de la commission des affaires sociales de cette assemblée.
C'est en tant que ministre déléguée qu'elle prend le relais de Dominique Versini, qui était, elle, secrétaire d'Etat. Lors de sa première visite officielle sur le terrain, le 6 avril, Nelly Olin a annoncé que la conférence nationale de la lutte contre l'exclusion se tiendrait soit comme prévu en juin, soit au plus tard en septembre. Reste à espérer que le comité interministériel d'octobre ne soit pas, lui, retardé, ce qui dissiperait tout espoir de voir des mesures concrètes financées pour 2005. Autres priorités avancées par la nouvelle ministre déléguée : la mise en cohérence du dispositif d'urgence, déjà engagée par Dominique Versini, et la lutte contre les expulsions locatives. Nelly Olin souhaite d'ailleurs travailler en concertation avec le secrétaire d'Etat au logement sur l'accueil d'urgence et l'insertion par le logement.
Ancienne directrice générale adjointe des services du conseil régional de Champagne-Ardenne, Catherine Vautrin (UMP), 43 ans, a été à l'Assemblée nationale rapporteure de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour l'initiative économique. Elle était par ailleurs vice-présidente de la mission d'information parlementaire commune sur l'évaluation des conséquences économiques et sociales de la législation sur le temps de travail.
La nouvelle secrétaire d'Etat aura, elle aussi, droit à un grand débat national : Jean-Pierre Raffarin a confirmé le 1er avril qu'il réunirait « au cours du second semestre » une conférence sur l'égalité des chances, qui devrait associer l'ensemble des partenaires concernés. Sous l'ancien gouvernement, le Premier ministre avait aussi promis la réunion « au printemps » d'un comité interministériel à l'intégration. A charge également pour Catherine Vautrin de créer la Haute Autorité indépendante de lutte contre toutes les formes de discrimination - François Fillon avait annoncé l'adoption d'un projet de loi avant la fin de l'année - et d'accompagner la généralisation du contrat d'intégration, expérimenté depuis juillet dernier.
Ministre : Philippe Douste-Blazy Ministre délégué aux personnes âgées : Hubert Falco Secrétaire d'Etat aux personnes handicapées : Marie-Anne Montchamp Secrétaire d'Etat à l'assurance maladie : Xavier Bertrand
A 51 ans, le cardiologue et professeur de médecine Philippe Douste-Blazy retrouve l'avenue de Ségur, où il a occupé les fonctions de ministre délégué à la santé dans le gouvernement Balladur, de mars 1993 à mai 1995. D'abord premier magistrat de Lourdes, sa ville natale, et député des Hautes-Pyrénées, il s'est fait élire à la mairie de Toulouse en 2001. Ancien dirigeant de l'UDF, il a entraîné une partie de ses troupes à l'UMP lors de sa création en 2002 et en est devenu le secrétaire général.
Lors de la passation de pouvoirs avec Jean-François Mattei, le nouveau ministre a indiqué qu'il avait choisi « l'énorme chantier » de l'assurance maladie, l'un des « plus dangereux » et des « plus importants pour notre pays ». Il devrait le copiloter avec le secrétaire d'Etat Xavier Bertrand... sous l'œil de l'Elysée et de Matignon. Il a déjà indiqué qu'il juge la privatisation de la sécurité sociale « impensable » et prévient contre les risques « d'étatisation ». Il estime aussi que l'on se tromperait « si on commençait par augmenter les prélèvements sociaux ». Le ministre aura également à superviser la mise en œuvre du plan « Hôpital 2007 », lancé par son prédécesseur, qui amènera notamment à changer le mode de tarification des établissements.
A 39 ans, Xavier Bertrand est l'un des benjamins du gouvernement. Agent d'assurance entré très jeune en politique, il est conseiller municipal de Saint-Quentin depuis 1989, adjoint au maire depuis 1995 et député de l'Aisne depuis juin 2002. Il s'est fait remarquer pour ses talents d'animateur et de débatteur en devenant, en décembre 2002, le « Monsieur retraites » de l'UMP chargé d'expliquer la réforme aux militants. Il assure s'être intéressé au dossier de l'assurance maladie « depuis plusieurs mois ».
Le Premier ministre l'a confirmé : la réforme de l'assurance maladie devrait venir « à l'été » devant le Parlement - elle ne sera donc pas décidée par ordonnance comme le prévoyait le gouvernement Raffarin II. Le ministère ne devrait cependant pas annoncer ses orientations, comme initialement prévu, en avril, car il entame une nouvelle phase de consultation des parties concernées, appelées à formuler des propositions. Il ne devrait pas recevoir les 57 délégations rencontrées par Jean-François Mattei, mais devrait circonscrire ses entretiens aux principaux interlocuteurs. Il reste qu'il y a pour le gouvernement urgence à faire face à un « déficit considérable » (près de 11 milliards d'euros en 2003 et autant de prévus en 2004) et à une « augmentation non maîtrisée des dépenses ». Il compte s'appuyer sur le « diagnostic partagé » émis en janvier dernier par le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, présidé par Bertrand Fragonard. Il souhaite aussi « associer l'opposition » à des décisions qui « mettent en jeu l'avenir même de notre pacte social ». La réforme devra toucher à la fois à l'organisation de l'offre de soins, à la gouvernance du système de santé et aux équilibres financiers. Il n'est pas sûr qu'elle puisse aboutir rapidement sur tous ces points, mais le gouvernement pourrait déjà inclure des mesures significatives dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 qui sera débattu à l'automne.
Epargné par les conséquences de la mauvaise gestion de la canicule de l'été 2003 qui a emporté 15 000 personnes âgées, le secrétaire d'Etat Hubert Falco a pris du galon en devenant ministre délégué. Il a surtout quitté le giron des affaires sociales pour le pôle santé, ce qui lui semble « plus logique » et « plus efficace » pour améliorer « la cohérence entre le sanitaire et le social ». Ancien chef d'entreprise et élu rural, député du Var à partir de 1988 puis sénateur à partir de 1995 et président du conseil général, il s'est signalé en enlevant la mairie de Toulon au Front national en 2001. De son activité comme secrétaire d'Etat, on retiendra l'accent mis sur la maltraitance des personnes âgées, mais aussi son zèle à répondre aux plaintes des départements et à raboter les droits à l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) avant même la fin de la montée en charge du dispositif créé par son prédécesseur, Paulette Guinchard-Kunstler. Il a fallu plus de temps à Hubert Falco pour entendre les revendications du secteur des maisons de retraite malmené par une diminution brutale des crédits de médicalisation... dont il a finalement obtenu le rétablissement.
Pour financer (à parité) les nouvelles actions en faveur des personnes âgées dépendantes et des personnes handicapées, le gouvernement Raffarin II a décidé de créer une caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Le projet de loi est annoncé pour le début mai à l'Assemblée nationale. Il ne s'agit, dans un premier temps, que d'ouvrir un fonds et de lui affecter une nouvelle recette assise, pour l'essentiel, sur la cotisation de 0,3 % sur les salaires prélevée en contrepartie de la suppression d'un jour férié. Comment la caisse sera-t-elle gérée ? Au plan national ?départemental ? Par qui ? Quelles seront les frontières entre l'assurance maladie (dont les intéressés veulent continuer à relever pour les soins) et le nouveau risque ? Sur ces questions de fond, le gouvernement renvoie pour l'instant aux propositions attendues de la mission Briet-Jamet. Son rapport d'étape est annoncé « dans les jours qui viennent », selon Hubert Falco, le texte définitif devant être remis à la fin mai. Pour la suite législative, les deux options restent ouvertes : elle sera incluse dans la réforme de l'assurance maladie, comme l'assurait François Fillon en mars dernier devant la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, ou bien elle fera l'objet d'un texte autonome. Là non plus, rien n'est tranché, selon Hubert Falco.
Gérante de société, native de Tulle en Corrèze, Marie-Anne Montchamp, 46 ans, est adjointe au maire de Nogent-sur-Marne, chargée de l'économie et de l'emploi. Secrétaire nationale de l'UMP, elle y était responsable des ressources humaines. Elue du Val-de-Marne à l'Assemblée nationale depuis juin 2002, elle était membre de la commission des finances et rapporteur du budget de la solidarité. C'est à ce titre qu'elle a fait adopter, en décembre 2002, un amendement visant à réduire les dépenses de l'aide médicale de l'Etat à destination des étrangers en situation irrégulière et à supprimer la gratuité de l'accès aux soins, notamment par l'introduction d'un ticket modérateur. Disposition sur laquelle le gouvernement a dû faire marche arrière. Elle aussi sensible aux objections formulées, la députée avait souhaité la suspension des décrets et devait rendre un rapport proposant des « pistes alternatives de réforme » en mai . La nouvelle secrétaire d'Etat ne s'est pas, jusqu'à présent, signalée par une activité particulière sur la question du handicap, même si elle s'est associée (comme sur d'autres sujets variés) à quatre propositions de loi formulées par des collègues sur ce thème. Dans ses premières déclarations, elle a classiquement appelé au « changement des mentalités ».
Il n'y aura donc pas de « loi Boisseau ». Débarquée au milieu du gué, Marie-Thérèse Boisseau ne conduira pas le projet de « loi sur l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » au bout du débat parlementaire. Le texte suivra-t-il le cheminement prévu ? Après la discussion en première lecture au Sénat en février dernier, l'Assemblée nationale devait s'en saisir en juin prochain. Le Premier ministre a indiqué, le 5 avril, que les députés auront « prochainement à en débattre ». Les étapes de la traditionnelle navette trouveront-elles place dans un calendrier parlementaire très chargé avant la fin de la session en juillet ? L'ancienne titulaire s'était engagée sur la signature des principaux décrets avant la fin de l'année...
Quant au contenu du projet, qui ne satisfait aucune des organisations concernées, sera-t-il maintenu sans retouches ? La nouvelle secrétaire d'Etat - qui doit tout apprendre du secteur - voudra-t-elle rouvrir le débat ? Le pourra-t-elle, tous les arbitrages étant intervenus avec la forte empreinte de l'Elysée et de Matignon ? Nombre d'associations auraient préféré que cette loi soit débattue après, et non avant, que son environnement institutionnel et financier soit fixé, soit après les lois sur la décentralisation, sur la CNSA et même sur la réforme de l'assurance maladie. Peuvent-elles encore être entendues ?
Nouvelle recrue du gouvernement, Marie-Josée Roig, 65 ans, est une proche de Jacques Chirac, qui lui avait d'ailleurs réservé la primeur de l'annonce de sa candidature pour un deuxième mandat présidentiel en 2002. Maire d'Avignon depuis 1995, cette ancienne enseignante avait largement battu Elisabeth Guigou aux municipales de 2001. Elle est également redevenue députée (UMP) du Vaucluse en 2002, après l'avoir été de 1993 à 1997. Membre de la commission des finances de l'Assemblée nationale, Marie-Josée Roig est aussi secrétaire de la mission d'information parlementaire sur l'accompagnement de la fin de vie. A la Famille et à l'Enfance, qui passe du rang de ministère délégué à celui de ministère à part entière, elle prend la suite de Christian Jacob qui, de son côté, devient ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation. Dans ses attributions, il est précisé qu'elle aura la responsabilité des prestations familiales relevant des régimes de sécurité sociale.
Au premier rang de ses dossiers figure évidemment la préparation de la prochaine conférence de la famille- consacrée cette année à l'adolescence - qui, avant le remaniement, devait se tenir en mai ou juin prochain. La nouvelle ministre devra également, avec la chancellerie, défendre la réforme du divorce - qui, après avoir été adoptée en première lecture au Sénat en janvier, devrait venir devant les députés le 13 avril - et s'atteler à celles des tutelles et du mariage civil (voir ci-après).
La simplification des procédures d'agrément en matière d'adoption et la création éventuelle d'une Agence nationale de l'adoption devraient également retenir son attention.
Ministre - Garde des Sceaux : Dominique Perben Secrétaire d'Etat aux droits des victimes : Nicole Guedj
Donné partant avant le remaniement, Dominique Perben a finalement été reconduit à la tête du ministère de la Justice. Un changement toutefois pour le garde des Sceaux : il dispose désormais d'un secrétariat d'Etat aux droits des victimes - une première dans un gouvernement - qui se substitue au secrétariat d'Etat aux programmes immobiliers de la Justice, notamment chargé de la construction des prisons, qui, lui, disparaît.
Agé de 59 ans, ce proche d'Alain Juppé aura tout le loisir de poursuivre les réformes qu'il avait engagées.
Premier objectif : mener à terme, avant la fin du semestre, la réforme du divorce, en cours d'examen par le Parlement.
Dans le même registre, un projet de loi sur le droit des successions et des libéralités devrait être présenté en conseil des ministres dans le courant de l'année. Il vise en particulier à sécuriser les héritiers tout en simplifiant leurs démarches et en accélérant le partage. Concernant le droit des libéralités, l'ambition du texte en préparation est également de permettre aux parents de transmettre des biens à un enfant fragilisé, par exemple handicapé, sous la condition que leur gestion soit confiée à un tiers désigné par la famille.
Quant à la réforme des tutelles, elle semble toujours à l'ordre du jour, un avant-projet de loi étant annoncé pour le premier semestre. Un de ses objectifs est de créer un mandat de protection future qui permettra à toute personne capable de désigner devant notaire, pour le cas où elle deviendrait incapable, un tiers de confiance chargé de la représenter dans les actes de la vie civile. Ce texte devrait également élargir la mission des personnes chargées d'assurer les mesures de protection, qui ne portera plus seulement sur le patrimoine mais également sur la personne même du majeur.
Toujours en matière de droit de la famille, des pistes de réforme du droit de la filiation sont également à l'étude. L'ambition est, entre autres, d'unifier les filiations naturelle et légitime, de faciliter l'établissement volontaire du lien de filiation et d'harmoniser les procédures d'établissement judiciaire et de contestation du lien de filiation. Par ailleurs, la chancellerie réfléchit aux moyens de revaloriser le mariage civil par des mesures pratiques visant à renforcer la solennité de l'événement et à mieux informer les futurs époux sur l'importance de leur engagement.
Au-delà, le garde des Sceaux va retrouver le lourd dossier de la surpopulation carcérale, la construction de 28 nouveaux établissements pénitentiaires étant toujours prévue. Ainsi que celui de la prise en charge des mineurs délinquants, avec la création d'établissements pénitentiaires leur étant spécialement dédiés et censés proposer un « fort contenu éducatif ». Il est également très attendu sur la mise en œuvre de la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, dite loi « Perben II ».
Entrée au gouvernement en janvier 2004 à la suite du départ de Pierre Bédier, Nicole Guedj, 48 ans, y demeure, mais ses attributions changent. Elle abandonne ainsi la charge du secrétariat d'Etat aux programmes immobiliers de la Justice au profit d'un secrétariat d'Etat aux droits des victimes. Le sujet est cher au garde des Sceaux, mais la création d'un secrétariat d'Etat qui lui est entièrement dédié n'a pas été bien accueillie par les organisations de magistrats, de quelque bord qu'elles se situent, qui y ont vu un affichage « démagogique ».
A la tête de ce nouveau secrétariat d'Etat, l'ancienne avocate devra tout particulièrement porter son attention au sort des victimes de violences conjugales et familiales, un thème que Dominique Perben souhaite mettre au cœur de son programme d'action en faveur des victimes.
Plus largement, elle aura à mettre en œuvre les dispositions de la loi Perben II en faveur des victimes parmi lesquelles celles qui instaurent le droit à l'information des intéressés de la plainte jusqu'à l'engagement de poursuites et tout au long de la procédure. Ou encore les mesures qui visent à prendre en compte leurs intérêts dans le cadre des mesures d'aménagement de peines.
Ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche : François Fillon Ministre délégué à la recherche :François d'Aubert
Assouplissement des 35 heures, réforme des retraites, réforme des conditions d'attribution de l'allocation spécifique de solidarité, instauration du revenu minimum d'activité... François Fillon, 50 ans, était, au ministère des Affaires sociales, du Travail et de la Solidarité du gouvernement Raffarin II, un habitué des réformes contestées. Au point qu'il a pu parfois, au lendemain de la défaite des régionales, être désigné comme l'un des responsables du « déficit social » du précédent gouvernement. A l'Education nationale- une institution qu'il connaît bien pour avoir été ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche sous le gouvernement Balladur (1993-1995) -, après une chaotique période Ferry, c'est l'apaisement qu'il va lui falloir rechercher. En premier lieu celui des enseignants - même si la réforme des retraites avait conduit à la généralisation du mouvement social du printemps 2003 dans le secteur ! - et celui des chercheurs. Il sera dans cette dernière tâche assisté de son ministre délégué à la recherche, François d'Aubert. Soulignons que le ministère est désormais amputé de la Jeunesse, domaine qui retourne, après une parenthèse de deux ans, dans le giron du ministère des Sports.
Parmi ses principaux chantiers, François Fillon va également trouver la future loi d'orientation sur l'école, qui était annoncée avant les régionales pour le début de l'année 2005, mais pour laquelle Jean-Pierre Raffarin, dans son discours de politique générale du 5 avril, n'a donné aucune échéance. Il devra aussi mettre la dernière main à la rédaction de la circulaire d'application de la loi sur les signes religieux à l'école. Et corriger les ratés du remplacement des aides-éducateurs et des anciens étudiants-surveillants (MI-SE) par les nouveaux « assistants d'éducation » dans les établissements scolaires. Autre dossier pendant :l'accompagnement social des étudiants. Quelques jours avant son départ, Luc Ferry avait proposé aux organisations étudiantes un texte d'orientation sur le sujet, proposant notamment la simplification du dispositif d'aides sociales et l'amélioration de l'accueil des étudiants handicapés.
Ministre des Sports depuis mai 2002, Jean-François Lamour (UMP), 48 ans, licencié de chimie, diplômé de kinésithérapie, et ancien champion de sabre, voit ses attributions étendues à la Jeunesse et à la Vie associative.
Au chapitre de la jeunesse, Jean-François Lamour devra décider de la suite à donner à la concertation engagée avec les partenaires sociaux pour la création du statut spécifique de l'engagement éducatif sur des périodes courtes ou fractionnées, qui vise, notamment, à mieux encadrer les fonctions d'animation dans les centres de vacances et de loisirs. Parmi les autres chantiers du ministre, citons la simplification de la réglementation des centres de vacances et de loisirs, la prévention des incivilités et de la violence dans ces structures, ou encore la création d'une aide au démarrage pour permettre aux jeunes de réaliser leur projet de vie.
Ministre : Renaud Dutreil Secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat : Eric Woerth
Secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et aux professions libérales dans le précédent gouvernement Raffarin, dont il était le benjamin, Renaud Dutreil s'est essentiellement consacré à la création d'entreprise en faisant voter, en juin 2003, une loi sur l'initiative économique. La simplification des formalités administratives des employeurs et la réforme de l'apprentissage auront été deux de ses autres chevaux de bataille. A 43 ans, il vient d'être promu ministre de la Fonction publique et de la Réforme de l'Etat, où il remplace Jean-Paul Delevoye. Notons que ce dernier avait également en charge l'aménagement du territoire, qui échoit, dans le nouveau gouvernement, à Gilles de Robien.
Moins d'une semaine après sa nomination, Renaud Dutreil a reçu, du 6 au 8 avril, les sept organisations syndicales représentatives des fonctionnaires pour un tour d'horizon des dossiers en cours. Parmi les thèmes abordés, figure, en premier lieu, la reprise des négociations salariales, la dernière revalorisation de rémunération de 0,5 %, accordée pour 2004, n'ayant absolument pas satisfait les agents de la fonction publique.
Le ministre devrait également poursuivre l'élaboration du projet de loi de modernisation de la fonction publique, qui a déjà fait l'objet, dans son volet fonction publique territoriale, d'une communication en conseil des ministres le 17 mars 2004. Autres dossiers annoncés par son prédécesseur et auxquels Renaud Dutreil devrait s'atteler prochainement : le départ précoce en retraite pour pénibilité ou pour les agents ayant commencé à travailler tôt, l'intégration des primes dans le calcul des retraites ainsi que la rénovation du dialogue social au sein de la fonction publique.
Agé de 48 ans, trésorier de l'UMP et député de l'Oise depuis 2002, Eric Woerth succède à Henri Plagnol au secrétariat d'Etat à la réforme de l'Etat. Diplômé de l'école des Hautes études commerciales (HEC), de l'Institut de sciences politiques de Paris et licencié en droit, il a commencé sa carrière politique en 1986 en se faisant élire au conseil régional de Picardie où il est resté jusqu'en 2002. Depuis juin 1995, il est également maire de Chantilly (Oise).
Dossier principal qui échoit naturellement à Eric Woerth : la poursuite de la réforme de l'Etat. Au menu de ce vaste chantier, notamment : la généralisation de la charte Marianne pour un meilleur accueil des usagers, la poursuite de la simplification du langage administratif, le développement de la carte de la vie quotidienne et de l'administration électronique, l'amélioration de l'accessibilité des services publics pour les personnes handicapées. Reste à savoir si le nouveau secrétaire d'Etat va, comme son prédécesseur, préparer de nouvelles lois habilitant le gouvernement à légiférer par voie d'ordonnances en matière de simplifications administratives.
Ministre : Dominique de Villepin Ministre délégué à l'intérieur :Jean-François Copé
Son nom avait été cité par les « premiers ministrables ». Après avoir détenu le portefeuille des Affaires étrangères durant deux ans, Dominique de Villepin a finalement hérité du ministère de l'Intérieur. Agé de 50 ans, ce diplomate de carrière est très lié à Jacques Chirac, dont il fut le plus proche collaborateur pendant sept ans en tant que secrétaire général de la présidence de la République. Son passage au Quai d'Orsay aura notamment été marqué, au plan national, par la réforme du droit d'asile.
Suivant les pas de son prédécesseur et désireux de montrer son implication dans la lutte contre l'insécurité, Dominique de Villepin a passé sa première soirée de ministre de l'Intérieur auprès de policiers et de gendarmes franciliens et délivré « un message très simple » : « ma première priorité, c'est de défendre la sécurité des Français ». Le nouveau pensionnaire de la Place Beauvau s'est ainsi engagé à poursuivre « l'action contre la délinquance, contre la violence ». Celle ciblée sur les 23 quartiers considérés comme les plus « criminogènes » devrait ainsi figurer sur son agenda. Mais l'ancien diplomate entend également apporter « désormais une contribution plus active à la politique de prévention ». « Sans marquer la moindre faiblesse à l'égard de la délinquance, il faut combattre les problèmes à la racine », a-t-il ainsi affirmé, assurant à titre d'exemple que son ministère prendra « toute sa part dans la définition d'une nouvelle politique de lutte contre la toxicomanie ». Il n'a en revanche, pour l'instant, fait aucune allusion au projet de loi sur la prévention de la délinquance, aujourd'hui bloqué à Matignon. Rien n'indique que Dominique de Villepin restera sur la même ligne que Nicolas Sarkozy, dont l'avant-projet avait jeté les travailleurs sociaux dans la rue. Il ne sera certainement pas, en tout cas, le seul membre du gouvernement sollicité sur ce dossier.
L'immigration sera également au programme du nouveau ministre. Ce dernier a ainsi déclaré vouloir aborder la question « sans faiblesse [...] car la politique d'intégration des Français issus de l'immigration repose directement sur la maîtrise, dans le respect des droits de l'Homme, des flux migratoires ». Sans donner plus de précisions sur ses intentions.
Enfin, Dominique de Villepin devra poursuivre le chantier de la décentralisation. Son premier dossier brûlant sera, à cet égard, celui du projet de loi sur les responsabilités locales dont le vote en première lecture, prévu initialement le 7 avril, a été repoussé au 14 avril. De son côté, Jean-Pierre Raffarin a promis de recevoir les présidents socialistes des conseils régionaux et généraux. Le 6 avril devant les députés, le nouveau ministre de l'Intérieur a, pour sa part, d'ores et déjà réitéré l'engagement du gouvernement que les compétences transférées aux collectivités locales seraient « intégralement » compensées par les transferts financiers correspondants. Le président du groupe UMP à l'Assemblée a en outre annoncé le même jour que le projet de loi organique relatif aux moyens financiers accompagnant le transfert de compétences serait examiné par les députés avant la deuxième lecture au Parlement de l'acte II de la décentralisation.
La ministre de la Parité et de l'Egalité professionnelle : Nicole Ameline
Nicole Ameline, 47 ans, garde son portefeuille, qui passe du rang de ministère délégué à celui de ministère à part entière. Elle va devoir suivre l'application de la « charte pour l'égalité des hommes et des femmes », remise le 8 mars au Premier ministre, un programme sur trois ans comprenant 300 actions, parmi lesquelles l'amélioration de l'accueil dans les commissariats des femmes victimes de violences ou encore le dispositif « Chrysalide » d'aide renforcée à la création d'entreprise par les femmes des cités. Au chapitre de l'égalité professionnelle, Nicole Ameline peut se réjouir de la signature unanime, le 7 avril, par les partenaires sociaux d'un accord cadre interprofessionnel, 15 ans après le précédent. A son actif également, au cours des deux années écoulées : un plan global contre les violences faites aux femmes.
La ministre de l'Outre-mer : Brigitte Girardin
Reconduite dans ses fonctions, cette ancienne administratrice des terres australes et antarctiques a fait voter l'été dernier une loi de programme sur l'outre-mer prévoyant notamment la prolongation des emplois-jeunes dans les DOM et un dispositif de soutien à l'emploi des jeunes qualifiés. L'ancienne conseillère de Jacques Chirac a également créé un « passeport mobilité », qui offre aux jeunes d'outre-mer qui partent étudier, se former ou occuper un emploi dans la métropole ou dans une autre collectivité la prise en charge intégrale de leurs billets d'avion. Brigitte Girardin a annoncé en janvier dernier qu'elle préparait aussi la mise en place d'un « passeport logement » pour ces mêmes publics : 800 chambres devraient ainsi leur être réservées à la rentrée prochaine.
Le ministre délégué aux anciens combattants : Hamlaoui Mekachera
Le secrétariat d'Etat qu'occupait Hamlaoui Mekachera devient un ministère délégué, toujours placé auprès de la ministre de la Défense. Au cours des deux dernières années, l'ancien délégué interministériel à l'intégration (1995-1997) a mis en place, à la suite d'un arrêt du conseil d'Etat, le dispositif de « décristallisation » des pensions des anciens combattants étrangers, gelées depuis 1959. La Haute Juridiction avait en effet estimé que la différence entre le niveau des pensions des Français et des étrangers, fondée sur la seule nationalité, constituait une discrimination contraire à la Convention européenne des droits de l'Homme. Le mécanisme imaginé par le gouvernement pour revaloriser les pensions des anciens combattants étrangers est toutefois très contesté, car il n'assure pas l'égalité de fait avec les Français mais fait dépendre la réévaluation du pouvoir d'achat dans les pays de résidence des intéressés. Hamlaoui Mekachera va par ailleurs pouvoir accompagner le parcours du projet de loi « portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés » qu'il a présenté début mars en conseil des ministres. Ce texte prévoit notamment l'augmentation de l'allocation de reconnaissance pour les harkis et une indemnité compensatrice pour les agents du secteur privé qui avaient dû interrompre leur activité au moment de la guerre d'Algérie.
Secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement dans le précédent gouvernement, Jean-François Copé devient ministre délégué à l'intérieur, fonction qu'il cumulera avec celle de porte-parole du gouvernement, qu'il exerçait déjà auparavant. Ancien maire de Meaux (Seine-et-Marne), ce quadragénaire a fait de la lutte contre l'insécurité son cheval de bataille dans sa commune. Une ville dont un quartier figure du reste parmi les 23 secteurs sur lesquels la Place Beauvau va exercer une action prioritaire.
Jean-François Copé devrait reprendre une part des attributions de Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales dans le précédent gouvernement. Et sera, à cet égard en première ligne aux côtés de Dominique de Villepin dans la gestion du dossier de la décentralisation, en particulier dans le travail de concertation que le gouvernement entend désormais conduire avant le vote solennel du projet de loi sur les responsabilités locales.
Au-delà, Jean-François Copé aura sans doute pour rôle d'apporter sa connaissance du Parlement et des élus à son ministre de tutelle, qui, lui, n'a jamais été élu et ne dispose pas de véritable réseau.
Ministre d'Etat : Nicolas Sarkozy Ministre délégué à l'industrie : Patrick Devedjian Ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation :Christian Jacob Ministre délégué au commerce extérieur : François Loos Secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire : Dominique Bussereau
Promu à la tête d'un grand ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie après deux ans passés à l'Intérieur, Nicolas Sarkozy se retrouve en terrain connu. C'est en effet à Bercy que cet avocat de 49 ans a fait ses débuts gouvernementaux en 1993, en tant que ministre du Budget d'Edouard Balladur.
Seul « ministre d'Etat », l'ancien maire de Neuilly demeure le numéro 2 dans l'organigramme du gouvernement. Il aura sous son autorité trois ministres délégués et un secrétaire d'Etat.
Pour son retour à Bercy, Nicolas Sarkozy n'aura pas la tâche facile. Il devra en effet ramener la confiance en trouvant les moyens de financer des réformes coûteuses, sur fond de déficit public important et de croissance molle. Tout en gardant un œil sur l'emploi. L'élaboration du budget 2005 s'annonce ainsi d'ores et déjà comme un des principaux casse-tête auquel il sera confronté. Répondant le 6 avril à la question d'un député, le ministre a en tout cas prévenu que, s'il encouragera les dépenses publiques « qui préparent l'avenir du pays et soutiennent l'activité et l'emploi », il fera en revanche la chasse à celles « qui ont moins d'utilité ». Autre chantier auquel le nouveau ministre des Finances sera associé, la réforme de l'assurance maladie, dont « il faudra juguler l'hémorragie ».
MINISTRES Nicolas SARKOZY, ministre d'Etat, ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie
François FILLON, ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche
Dominique de VILLEPIN, ministre de l'Intérieur, de la Sécurité intérieure et des Libertés locales
Jean-Louis BORLOO, ministre de l'Emploi, du Travail et de la Cohésion sociale
Dominique PERBEN, garde des Sceaux, ministre de la Justice
Michèle ALLIOT-MARIE, ministre de la Défense
Michel BARNIER, ministre des Affaires étrangères
Philippe DOUSTE-BLAZY, ministre de la Santé et de la Protection sociale
Gilles de ROBIEN, ministre de l'Equipement, des Transports, de l'Aménagement du territoire, du Tourisme et de la Mer
Renaud DUTREIL, ministre de la Fonction publique et de la Réforme de l'Etat
Hervé GAYMARD, ministre de l'Agriculture, de l'Alimentation, de la Pêche et des Affaires rurales
Serge LEPELTIER, ministre de l'Ecologie et du Développement durable
Renaud DONNEDIEU de VABRES, ministre de la Culture et de la Communication
Marie-Josée ROIG, ministre de la Famille et de l'Enfance
Brigitte GIRARDIN, ministre de l'Outre-mer
Jean-François LAMOUR, ministre de la Jeunesse, des Sports et de la Vie associative
Nicole AMELINE, ministre de la Parité et de l'Egalité professionnelle
MINISTRES DÉLÉGUÉS
Henri CUQ, ministre délégué aux relations avec le Parlement, auprès du Premier ministre
Patrick DEVEDJIAN, ministre délégué à l'industrie, auprès du ministre d'Etat, ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie
Christian JACOB, ministre délégué aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, auprès du ministre d'Etat, ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie
François LOOS, ministre délégué au commerce extérieur, auprès du ministre d'Etat, ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie
François d'AUBERT, ministre délégué à la recherche, auprès du ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche
Jean-François COPÉ, ministre délégué à l'intérieur, porte-parole du gouvernement, auprès du ministre de l'Intérieur, de la Sécurité intérieure et des Libertés locales
Gérard LARCHER, ministre délégué aux relations du travail, auprès du ministre de l'Emploi, du Travail et de la Cohésion sociale
Nelly OLIN, ministre déléguée à la lutte contre la précarité et l'exclusion, auprès du ministre de l'Emploi, du Travail et de la Cohésion sociale
Hamlaoui MEKACHERA, ministre délégué aux anciens combattants, auprès de la ministre de la Défense
Claudie HAIGNERÉ, ministre déléguée aux affaires européennes, auprès du ministre des Affaires étrangères
Xavier DARCOS, ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie, auprès du ministre des Affaires étrangères
Hubert FALCO, ministre délégué aux personnes âgées, auprès du ministre de la Santé et de la Protection sociale
Léon BERTRAND, ministre délégué au tourisme, auprès du ministre de l'Equipement, des Transports, de l'Aménagement du territoire, du Tourisme et de la Mer
SECRÉTAIRES D'ÉTAT
Dominique BUSSEREAU, secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire, auprès du ministre d'Etat, ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie
Tokia SAÏFI, secrétaire d'Etat au développement durable, auprès du ministre de l'Ecologie et du Développement durable
Marie-Anne MONTCHAMP, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, auprès du ministre de la Santé et de la Protection sociale
Laurent HÉNART, secrétaire d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes, auprès du ministre de l'Emploi, du Travail et de la Cohésion sociale
Marc-Philippe DAUBRESSE, secrétaire d'Etat au logement, auprès du ministre de l'Emploi, du Travail et de la Cohésion sociale
Catherine VAUTRIN, secrétaire d'Etat à l'intégration et à l'égalité des chances, auprès du ministre de l'Emploi, du Travail et de la Cohésion sociale
Nicole GUEDJ, secrétaire d'Etat aux droits des victimes, auprès du garde des Sceaux, ministre de la Justice
Renaud MUSELIER, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères, auprès du ministre des Affaires étrangères
Xavier BERTRAND, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie, auprès du ministre de la Santé et de la Protection sociale
Eric WOERTH, secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat, auprès du ministre de la Fonction publique et de la Réforme de l'Etat
François GOULARD, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer, auprès du ministre de l'Equipement, des Transports, de l'Aménagement du territoire, du Tourisme et de la Mer
Philippe BRIAND, secrétaire d'Etat à l'aménagement du territoire, auprès du ministre de l'Equipement, des Transports, de l'Aménagement du territoire, du Tourisme et de la Mer
Nicolas FORISSIER, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales, auprès du ministre de l'Agriculture, de l'Alimentation, de la Pêche et des Affaires rurales (Décret du 31 mars 2004, J.O. du 1-04-04)