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Sept intervenantes sur dix n'ont pas de qualification

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Des personnels peu qualifiés et vieillissants et des bénéficiaires soutenus seulement pour une petite part de leurs besoins : tels sont les principaux résultats de deux études portant sur l'aide à domicile. Des confirmations plutôt, assises sur des données déjà anciennes, mais les seules disponibles à ce jour...

En 1999 et 2000, la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), commune aux ministères des Affaires sociales et de la Santé, a réalisé deux grandes enquêtes sur l'aide à domicile, l'une portant sur les services prestataires, l'autre sur les bénéficiaires. Seule une partie des données avait été exploitée et publiée jusqu'ici, en fonction des priorités et des moyens humains dégagés. Le volet de l'enquête de septembre 1999 sur les personnels était, en particulier, resté dans les cartons...

Dommage car, depuis, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts, notamment avec la mise en place de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA). Sans apporter de révélations, ces statistiques gardent néanmoins leur intérêt car, comme le dit l'auteur de l'étude, Sophie Bressé, « à terme, confrontées à des données ultérieures », elles permettront d'analyser les évolutions.

Les 7 000 services d'aide à domicile habilités à intervenir auprès des publics « fragiles » (1) employaient 210 000 salariés en 1999 (2), soit une moyenne de 29 personnes par service. Une fois décomptés les 5 % de personnels administratifs, on dénombrait sur le terrain 5 500 techniciennes de l'intervention sociale et familiale (TISF) et 194 000 aides à domicile (3). Deux métiers pour lesquels la DREES utilise le féminin, car les femmes représentent 99 % des effectifs.

Peu nombreuses, les TISF n'exercent leur activité que dans le cadre d'un service prestataire et bénéficient presque toutes d'un contrat à durée indéterminée. Les trois quarts travaillent au moins à mi-temps pour le service. 85 % sont titulaires du diplôme de la profession.

Tel n'est pas du tout le cas des aides à domicile, dont seules 18 % ont un diplôme professionnel, la moitié de celles-ci seulement étant titulaires du certificat d'aptitude aux fonctions d'aide à domicile (CAFAD), aujourd'hui remplacé par le diplôme d'Etat d'auxiliaire de vie sociale (DEAVS). La proportion des titulaires du diplôme professionnel croît avec l'âge des intervenantes : 4 % chez les moins de 30 ans et 11 % chez les plus de 50 ans. En revanche, la proportion de titulaires d'un autre diplôme du secteur sanitaire et social est plus élevée chez les jeunes. Par ailleurs, 48 % des aides à domicile n'ont aucun diplôme et n'ont bénéficié d'aucune formation à l'exercice de leur métier tandis que 23 % n'ont pas de diplôme mais ont reçu une formation.

Au total, plus de sept intervenantes à domicile sur dix n'ont aucune qualification reconnue (alors que cette proportion n'est que de 16 % parmi l'ensemble des femmes actives). « Le processus de professionnalisation engagé depuis 2002 semble correspondre à un réel besoin », commente la DREES.

Autre caractéristique forte des aides à domicile : leur âge médian (44 ans) est plus élevé que celui de l'ensemble des femmes présentes sur le marché du travail (41 ans). Et l'écart tend à s'accroître puisqu'il était de deux ans en 1994. Cette tendance au vieillissement est d'autant plus marquée que, sous l'effet de l'accroissement de la demande, l'effectif des intervenantes a plus que doublé depuis 1994. C'est dire que le secteur ne recrute guère dans les classes d'âge jeunes. 8 % des salariées ont moins de 25 ans, 33 % plus de 50 ans.

Sans surprise, l'enquête confirme l'importance du temps partiel. Dans le service où elles ont été recensées, les aides à domicile ont effectué en moyenne 70 heures dans le mois, soit moins qu'un mi-temps. Une moyenne qui rend mal compte d'une grande dispersion, 5 % étant salariées à plein temps tandis que 10 % n'ont travaillé qu'une dizaine d'heures dans le mois. Cette faible activité peut néanmoins être cumulée avec d'autres emplois dans d'autres organismes ou chez un ou des particuliers, dans une mesure que l'enquête ne permet pas de préciser. Il reste que 56 % des aides à domicile se déclarent disponibles pour travailler davantage. Les services ont-ils eu les moyens d'absorber cette offre non utilisée depuis la création de l'APA ?Une nouvelle étude, rapidement exploitée, serait la bienvenue...

D'AUTRES FORMES D'AIDE RESTENT NÉCESSAIRES

78 % des personnes âgées et 86 % des personnes handicapées bénéficiaires de l'aide à domicile ont recours à d'autres formes d'intervention. Celles-ci sont le fait d'autres professionnels (deux tiers des personnes âgées y ont recours, 77 % des personnes handicapées), dans le domaine de la santé notamment. Beaucoup doivent aussi compter sur l'aide de leur entourage. C'est le cas d'une personne âgée sur deux. Sous l'effet des solidarités naturelles, ou bien faute de moyens et d'offre professionnelle suffisante ?

Les personnes âgées aidées ont en moyenne 82 ans

En mai 2000, la DREES a lancé une autre enquête, cette fois du côté des bénéficiaires de l'aide à domicile, en interrogeant 3 000 personnes (4). Elle a analysé séparément les trois publics concernés :les personnes âgées (79 % de l'ensemble), les personnes handicapées (3 %) et les familles (18 %).

700 000 citoyens de plus de 60 ans bénéficient de l'aide à domicile. Ils sont âgés en moyenne de 82 ans. 55 % sont des femmes qui vivent seules. Un tiers sont physiquement dépendants, 10% le sont lourdement. La DREES précise que ces chiffres prennent mal en compte la dépendance psychique, dont on sait pourtant à quel point elle nécessite aussi un accompagnement.

97 % des personnes sont aidées dans les tâches ménagères, et seulement en cela pour les deux tiers d'entre elles. 30 % reçoivent en outre une aide personnelle pour accompagner les gestes de la vie quotidienne, notamment pour faire les courses (25 %), préparer les repas (9 %), aider à la toilette ou à l'habillage (7 %), au lever et au coucher (5%), à la prise des repas (3,5%)... Au total, 15 % des bénéficiaires âgés reçoivent une aide pour les actes essentiels de la vie.

Il est vrai que la durée des interventions - en moyenne 5,5 heures par semaine et par bénéficiaire - oblige à faire des choix... Logiquement, les volumes d'aide sont liés au niveau de dépendance et ils sont majorés quand la personne vit seule. Mais il apparaît également qu'à dépendance égale, les personnes aux revenus les plus élevés sont plus aidées...

Six personnes sur dix bénéficient d'une participation financière pour le règlement des aides, d'abord de la part des caisses de retraite. A l'époque -avant la mise en place de l'APA -, seule une personne sur cinq recevait le soutien d'une collectivité locale, commune ou département.

Tout cela concourt au fait que l'aide apportée par les services d'aide à domicile ne concerne qu'une partie des difficultés rencontrées par les personnes qui y font appel. Elles déclarent en moyenne 5,5 incapacités alors que les intervenantes réalisent, toujours en moyenne, 1,6 activité. C'est ainsi, par exemple, que près de la moitié des bénéficiaires affirment ne pas être totalement autonomes pour faire leur toilette et que moins d'un sur cinq reçoit une aide du service sur ce point.

Le soutien apporté aux personnes handicapées de 18 à 59 ans est également centré sur les tâches ménagères (dans huit cas sur dix). Les autres besoins sont beaucoup moins couverts. Ainsi, 80 % des bénéficiaires éprouvent des difficultés à préparer leur repas, mais seuls 37 % sont aidés dans ce domaine ; plus de la moitié ont des problèmes pour se lever et se coucher seuls et l'aide à domicile n'intervient que dans 28 % des cas. Il faut dire que la durée moyenne des interventions des services n'est que de huit heures par semaine en moyenne, pour cinq visites. Un peu moins d'un quart des personnes handicapées bénéficient d'un intervenant le week-end. 86 %des usagers sont inactifs. Plus de neuf sur dix perçoivent une allocation spécifique ou une pension d'invalidité et plus de huit sur dix une participation financière pour l'aide à domicile.

Dernier public étudié : celui des familles. Si 9 % des foyers aidés ne comptent pas d'enfants, neuf sur dix sont des familles plus nombreuses que la moyenne et 15 % des familles monoparentales. Dans neuf cas sur dix, c'est un événement particulier qui a déclenché le recours à l'aide à domicile : accident, maladie, naissance, décès, départ... Là encore, le principal service demandé touche aux tâches ménagères (90 % des cas). Mais dans 53 % des familles avec enfants, le soutien porte aussi sur l'éducation et les soins à ces derniers. Dans près de 90 % des cas où ces deux types d'activités sont assurés, c'est la même personne qui intervient et c'est alors, quatre fois sur cinq, une TISF. Les temps d'intervention apparaissent bien courts : moins de 5,5 heures par semaine en moyenne. 4 heures quand il ne s'agit que d'aide ménagère, et 7 heures en cas de soins aux enfants. Les trois quarts des foyers bénéficient d'une participation financière, de la caisse d'allocations familiales le plus souvent. Mais d'autres partenaires interviennent : l'assurance maladie (dans 8,5 % des cas), le conseil général (8 %) et les mutuelles (13 %).

Autant de données qui alimenteront le débat sur le nécessaire développement de l'aide à domicile, sa professionnalisation... et son financement.

Marie-Jo Maerel

Notes

(1)  Le volet de l'enquête qui portait sur l'activité de ces services a été publié rapidement - Voir ASH n° 2191 du 1-12-00.

(2)   « Le personnel des services d'aide à domicile en 1999 » - Etudes et Résultats n° 297 - Mars 2004 - DREES.

(3)  Par ailleurs, 500 000 personnes travaillent à domicile dans le cadre d'une procédure de gré à gré ou d'un service mandataire n'ayant qu'un agrément simple.

(4)   « Les bénéficiaires des services d'aide aux personnes à domicile en 2000 » - Etudes et Résultats n° 296 - Mars 2004 - DREES.

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