Invité à séjourner six mois dans l'école d'éducateurs d'Arras, le romancier Thierry Maricourt a su trouver les mots justes pour restituer les propos et le point de vue des apprentis éducateurs et de quelques-uns de leurs formateurs. Avec talent, il réussit également à faire entendre la parole d'usagers que ces protagonistes de l'intervention sociale sont amenés à rencontrer, à travers de brefs textes plus personnels - dont plusieurs poèmes - qui jalonnent son ouvrage. Ayant eu l'occasion, grâce à ce travail en résidence, d'écouter les travailleurs sociaux et leur public, Thierry Maricourt estime avoir bénéficié d'un audit de la société contemporaine, et plus précisément des inégalités sociales et des exclusions diverses que celle-ci génère. Ouvrir ainsi les yeux sur le monde « me paraît offrir toutes les perspectives qu'un romancier peut souhaiter », juge-t-il. D'autant que l'écrivain, n'étant pas, lui, soumis aux contraintes de temps qui s'imposent aux travailleurs sociaux, jouit du luxe de pouvoir « temporiser son action, libérer sa pensée de la pesante impatience, [...] revenir sur ses pas, tergiverser, corriger ses erreurs ». Il n'en demeure pas moins que, sous plusieurs aspects, le professionnel du travail social et celui de l'écriture lui semblent très proches. L'un comme l'autre portent un regard incisif, parce qu'impliqué, sur le monde, et tous deux exercent leurs compétences à partir d'une même « matière première » :l'humain. Mais probablement la comparaison doit-elle s'arrêter là : aux travailleurs sociaux de colmater sans relâche les brèches d'un monde qui tourne mal, quand l'écrivain en nourrit son imaginaire.
Entre l'ordre établi et la détresse humaine. De quelques travailleurs sociaux en formation, de quelques exclus, aujourd'hui -Thierry Maricourt - Ed. Licorne, diffusion L'Harmattan - 14 € .