Le recours à des opérateurs externes pour la mise en œuvre de la politique de l'emploi est-il pertinent ?Quels en sont les effets pour ses bénéficiaires ? L'instance d'évaluation installée il y a deux ans par le commissariat général du Plan et présidée par Dominique Balmary, conseiller d'Etat, était chargée de plancher sur ces questions. Son rapport, remis en décembre dernier au cabinet de François Fillon, vient d'être dévoilé par le quotidien Liaisons Sociales, dans son numéro du 10 mars. Il fournit des éléments de réflexion supplémentaires en attendant la présentation du projet de loi de mobilisation pour l'emploi, dont quelques dispositions pourraient porter sur le développement des relations entre les acteurs publics et privés qui œuvrent pour le placement et le retour à l'emploi (1).
Le conseiller d'Etat souligne tout d'abord le manque de données objectives apportant la preuve certaine que le recours à des opérateurs externes a eu des effets plus positifs, par rapport aux objectifs de la politique de l'emploi, que n'en aurait eu le choix de faire réaliser toutes les actions en interne en recrutant un nombre élevé de nouveaux agents aux compétences diversifiées. Il signale qu'il existe néanmoins un faisceau d'indications convergentes qui aboutissent à des conclusions encourageantes. L'opinion des usagers (employeurs ou demandeurs d'emploi) sur la qualité et sur l'utilité des prestations qui leur ont été fournies est ainsi « largement positive ». De plus, au vu des éléments partiels d'évaluation, il apparaît que « les demandeurs d'emploi ayant bénéficié de certaines des prestations réalisées par des opérateurs externes ont de meilleures chances d'accès à l'emploi ». La situation actuelle comporte, en outre, un certain nombre d'avantages. Elle permet en particulier beaucoup de souplesse de gestion, la prise en compte d'innovations et le développement de services individualisés pour un nombre croissant de personnes aux besoins diversifiés.
Pour l'instance d'évaluation, des progrès dans les pratiques du service public de l'emploi sont toutefois encore nécessaires. Une grande attention doit notamment être portée aux évolutions institutionnelles qui se dessinent avec le projet de loi relatif aux responsabilités locales, la nouvelle loi sur le revenu minimum d'insertion et le revenu minimum d'activité ou encore l'engagement accru des partenaires sociaux dans la politique de l'emploi, qui vont avoir pour effet de modifier sensiblement les équilibres antérieurs, en donnant plus de poids aux collectivités territoriales et aux partenaires sociaux dans la « commande publique » d'actions en faveur de l'emploi. « Faute d'une coordination entre les anciens et les nouveaux commanditaires, le marché des opérateurs, et le marché de l'emploi lui-même, peuvent être soumis à des mouvements techniquement incohérents, économiquement coûteux et socialement inéquitables. » Estimant nécessaire de réaffirmer le caractère central de la fonction régulatrice de l'Etat, Dominique Balmary préconise le maintien de la place de l'ANPE comme « maître d'œuvre délégué » pour la gestion du marché de l'emploi, régulateur de la commande publique de services aux opérateurs externes dans ce domaine.
(1) Suivant les recommandations du rapport Marimbert - Voir ASH n° 2343 du 23-01-04.