Quelques semaines après le Sénat (1), c'était, le 3 mars, au tour de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la canicule de rendre son rapport (2). Il livre au passage le dernier bilan de l'Inserm, qui a finalement comptabilisé 14 947 décès en surnombre entre le 4 et le 18 août 2003. Près de 15 000 morts qui n'ont pas été fauchés par un « effet de moisson » un peu prématuré , a indiqué récemment l'INSEE (3), mais qui correspondent bien à 15 000 décès de plus. Autre fait frappant : la surmortalité a proportionnellement beaucoup plus frappé les femmes que les hommes, et cela dans toutes les tranches d'âge à partir de 50 ans. Pourquoi ? Le trop petit nombre d'études sur l'état sanitaire des personnes concernées et l'absence totale de données sur leur situation sociale ne permet pas d'aller plus loin dans l'élucidation du phénomène, regrette le rapport.
« C'est en s'affranchissant des circuits officiels de la remontée d'informations que les acteurs de terrain ont donné l'alerte le plus efficacement », constate la commission qui insiste fortement sur le manque de réactivité et le cloisonnement des administrations, au niveau central mais aussi à l'échelon décentralisé. Elle dénonce notamment la « césure profonde » entre les administrations sanitaires et sociales alors même qu'elles se retrouvent sous le chapeau commun des directions départementales des affaires sanitaires et sociales (DDASS). Celles-ci devraient cependant être les mieux placées, à l'avenir, pour assurer, à l'occasion de la gestion des crises par les préfets, la collecte d'informations, leur remontée et le relais des décisions. Pour la commission, les communes et les centres communaux d'action sociale, de même que les départements, devraient aussi être associés au dispositif de veille, d'alerte et d'information. « Aujourd'hui, plus d'une personne hospitalisée sur quatre est âgée de 80 ans ou plus », rappelle la commission, qui estime, comme la mission du Sénat, que la société n'a pas tiré les conséquences du vieillissement de la population. C'est même « un sujet tabou qui n'intéresse personne », au dire du secrétaire d'Etat aux personnes âgées, Hubert Falco, comme de son prédécesseur, Paulette Guinchard-Kunstler. D'où l'inadaptation de la prise en charge hospitalière, l'offre insuffisante, en nombre et en qualité, des établissements d'hébergement et le sous-dimensionnement des soins et de l'aide à domicile, sur lesquels le rapport s'attarde plus longuement que les études précédentes. Pendant les vacances, le ratio d'encadrement dans les maisons de retraite passe de 0,4 à près de 0, 2, rappelle-t-il en souhaitant que l'on se rapproche progressivement des taux qui prévalent dans les établissements pour personnes handicapées. Autres vœux : que la convention collective en cours de négociation dans le secteur de l'aide à domicile remédie à son « défaut d'attractivité », lié à « la faiblesse des rémunérations, l'absence de carrière, la pénibilité du travail ». Ou que l'intervention des départements, bientôt seuls responsables de la coordination gérontologique, permette une meilleure articulation entre les équipes gérant l'allocation personnalisée d'autonomie, les centres locaux d'information et de coordination (CLIC) et les services d'aide et de soins à domicile.
Il reste qu'après un constat sans complaisance des dysfonctionnements et des insuffisances, le rapport tourne court au chapitre des propositions en se contentant de rappeler les mesures du plan Raffarin (4).
(1) Voir ASH n° 2346 du 13-02-04, p 10.
(2) Disp. sur
(3) Voir ASH n° 2348 du 27-02-04.
(4) Voir ASH n° 2333 du 14-11-03.