Ni éducateur de prévention spécialisée, ni personnel éducatif de l'administration pénitentiaire, l'éducateur de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) - fonctionnaire du ministère de la Justice - est chargé de mettre en œuvre des mesures, ordonnées par un magistrat, auprès de jeunes délinquants ou en danger. Près de 60 ans après la création de ce corps professionnel, institué au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les éducateurs de la PJJ - 3 730 en 2003 -restent mal connus, estime Véronique Freund, formatrice à l'Institut régional du travail social de Paris. Qui partage son avis lira avec profit cet ouvrage. L'histoire de la profession, ses différents modes et lieux d'exercice, tout comme les débats - récurrents ou nouveaux -qui l'agitent : c'est un voyage très documenté au cœur d'un métier complexe qui est proposé ici. Il se déroule en bonne compagnie, puisque la parole est largement donnée aux intéressés.
Ces derniers ne dissimulent pas leurs difficultés. Pris entre un feu nourri de critiques - émanant, notamment, de la Cour des comptes -, des conditions de travail qui, selon eux, ne permettent pas de faire face au nombre croissant de mesures ni aux problématiques de plus en plus complexes des jeunes et un contexte économique et social défavorable, les éducateurs s'interrogent sur les finalités de leur action et son indépendance par rapport à la commande politique. « Les orientations sécuritaires actuelles mettent à l'épreuve l'identité de la profession », souligne Véronique Freund.
Face à cette situation, explique-t-elle, les réactions des éducateurs sont partagées. Tout en critiquant l'intransigeance du gouvernement, une partie d'entre eux estiment qu'il faut adopter une attitude plus ferme vis-à-vis des mineurs. Pour d'autres, il est plus que jamais indispensable, au contraire, d'affirmer avec force les valeurs traditionnelles de la profession. Mais « il n'y a plus à la PJJ, depuis des années, de grand projet porteur qui donne un souffle », analyse l'un des interviewés. Quant aux professionnels, précise une de ses collègues, ils sont eux aussi en « panne de rêves ». Selon l'auteur, il ne convient pas, pour autant, de céder au pessimisme. Tablant sur la créativité des éducateurs, Véronique Freund pense que « les professionnels ont le pouvoir, sans doute plus qu'ils ne l'imaginent, d'infléchir le cours des événements ».
Le métier d'éducateur de la PJJ - Véronique Freund - Ed. La Découverte - 15 € .