Le décret relatif au dispositif de traitement du surendettement né de la loi « Borloo » du 1er août 2003 (1) est paru. La loi défendue par le ministre délégué à la ville a surtout fait parler d'elle du fait de la procédure dite « de rétablissement personnel » qu'elle met en place, qui permet aux ménages dont la situation est « irrémédiablement compromise » de prétendre, sous certaines conditions, à un effacement de leurs dettes. Une procédure à laquelle aucune famille n'avait jusqu'à présent pu recourir, faute de décret d'application. Elle devrait connaître désormais ses premiers bénéficiaires.
Avant le déclenchement d'une procédure de rétablissement personnel, se déroule une phase d'instruction, commune à toutes les procédures de traitement du surendettement : un particulier dépose un dossier devant une commission de surendettement, elle examine sa recevabilité et dresse l'état d'endettement de l'intéressé avant de lui faire une proposition (plan d'apurement « classique » ou, donc, procédure de rétablissement personnel). La loi du 1er août a déjà apporté à ce stade un certain nombre d'aménagements. Elle a notamment prévu qu'une « personne justifiant d'une expérience dans le domaine de l'économie sociale et familiale » (2) ainsi qu'une « personne justifiant d'un diplôme ou d'une expérience dans le domaine juridique » soient « associées » à l'instruction du dossier et « assistent » aux réunions de la commission (3). La première, indique le décret, est nommée par le préfet « parmi les personnes justifiant d'une expérience d'au moins 3 ans » et peut être choisie « notamment » parmi les agents du département, de la caisse d'allocations familiales ou de la caisse de mutualité sociale agricole. La seconde, également nommée par le préfet mais sur proposition du premier président de la cour d'appel, doit être titulaire d'une licence en droit et justifier d'une expérience juridique d'au moins 3 ans. S'agissant de leur rôle, le texte indique qu'elles « participent à l'instruction sous l'autorité du président de la commission ». Les documents destinés à être examinés par la commission sont tenus à leur disposition préalablement à chacune de ses séances et elles peuvent prendre connaissance des autres pièces des dossiers sur place auprès du secrétariat de la commission, dans des conditions approuvées par l'instance. Elles peuvent en outre être appelées à participer à l'audition du débiteur par le secrétariat. Elles interviennent en tout état de cause à titre gracieux et peuvent être remboursées de leurs frais de déplacement dans les conditions prévues pour les agents de l'Etat.
D'autres précisions sont apportées. La demande du débiteur déposée devant la commission et tendant au traitement de sa situation de surendettement doit, comme auparavant, indiquer un certain nombre d'informations : ses nom et adresse, sa situation familiale, un état détaillé de ses revenus, etc. Mais s'il est suivi par un travailleur social, il doit désormais également indiquer les nom, prénom et coordonnées de ce dernier. Le délai de six mois- imposé à la commission de surendettement pour statuer sur le dossier - et celui de neuf mois - au terme duquel le débiteur peut saisir directement le juge en cas d'instruction inachevée - ne courent par ailleurs qu'à compter de la date à laquelle le dossier est complet. Signalons, enfin, que les dettes fiscales étant désormais considérées comme les autres dettes, la saisine de la commission de surendettement « vaut demande de remise gracieuse d'impôts directs ».
L'accord du débiteur est indispensable au déclenchement de la procédure de rétablissement personnel. Il est donné par écrit sur un formulaire remis à l'intéressé par le secrétariat de la commission, sauf dans le cas où la procédure a été initiée par le juge de l'exécution à la suite de la contestation d'une décision de la commission par le débiteur et à la demande de ce dernier, où il peut être donné verbalement.
La loi offre par ailleurs la possibilité au juge d'inviter un travailleur social à assister à l'audience d'ouverture de la procédure. Il devra s'agir, précise le décret, de celui mentionné par le débiteur dans son dossier de dépôt ou, à défaut, d'un travailleur social choisi sur une liste établie par le préfet.
Dès l'ouverture de la procédure de rétablissement personnel commence une phase d'observation au cours de laquelle le juge peut désigner un mandataire figurant sur une liste dressée par le procureur de la République. Elle comprend des mandataires judiciaires au redressement et à la liquidation des entreprises, des huissiers de justice (4) et des associations tutélaires, familiales ou de consommateurs ou des membres de ces associations. Le juge peut être amené à remplacer son choix initial, s'il existe un empêchement légitime, si la personne désignée refuse la mission ou encore si elle manque à ses devoirs.
Le mandataire est rémunéré selon un tarif qui doit être fixé par arrêté. Lorsqu'il existe un actif réalisable, cette rémunération est prélevée sur le produit de la vente de cet actif. En cas d'insuffisance du produit de la vente, son paiement peut être mis à la charge du débiteur au moyen d'une contribution dont le juge fixe le montant et les modalités de versement en tenant compte des ressources de l'intéressé. Enfin, à défaut d'actif réalisable ou de ressources du débiteur, elle incombe au Trésor.
C'est au cours de la phase d'observation qu'intervient l'appel aux créanciers. Le décret en détaille tous les aspects procéduraux :publication du jugement d'ouverture au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales, déclaration des créances auprès du mandataire (ou à défaut au greffe du juge de l'exécution)... Une fois cette étape passée, le mandataire peut dresser un « bilan de la situation économique et sociale du débiteur » comprenant, indique le décret, un état des créances et, le cas échéant, une proposition de plan prévoyant les mesures existant dans la procédure « classique » de traitement du surendettement. Le coût de ce bilan, qui doit être fixé par un arrêté, est avancé par l'Etat au titre des frais de justice.
Le décret décrit encore la phase de liquidation susceptible d'intervenir au terme de la procédure de rétablissement personnel si le débiteur a des biens saisissables (5) et si le juge ne propose pas, comme la loi l'y autorise, d'établir un plan de redressement. Il détaille notamment les conditions dans lesquelles le liquidateur peut organiser une vente forcée d'immeubles et comment le produit de la vente des biens du débiteur est réparti entre les créanciers.
(1) Voir ASH n° 2322 du 29-08-03.
(2) Rappelons que l'expertise de cette même personne est dorénavant demandée avant la fixation, par la commission, du « reste à vivre », cette somme laissée à la disposition du débiteur pour lui permettre de faire face aux charges de la vie courante.
(3) Rappelons que ces personnes n'ont, au final, qu'une voix consultative et non délibérative.
(4) Les huissiers ayant antérieurement procédé à des poursuites à l'encontre du débiteur ne peuvent toutefois pas être désignés.
(5) Pour mémoire, les biens meublants nécessaires à la vie courante et les biens non professionnels indispensables à l'exercice de l'activité professionnelle du débiteur sont insaisissables.