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Claire Brisset présente devant les Nations unies un bilan des droits de l'enfant en France

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En prélude au rapport que le gouvernement français remettra en mai 2004 au Comité des droits de l'enfant des Nations unies (1), la défenseure des enfants, Claire Brisset, a été entendue par cette instance, le 6 février à Genève, sur son propre état des lieux des droits de l'enfant en France. La procédure veut en effet que, plusieurs mois avant l'examen du rapport officiel des pays, les membres de ce comité reçoivent et examinent les évaluations menées sur le même thème par les associations et les institutions indépendantes chargées de la défense des droits de l'enfant.

« De façon générale, [les] conditions de vie [des 13,5 millions de mineurs en France] sont bonnes et leurs droits respectés. L'évolution de la législation tend le plus souvent à mettre les règles de droit françaises en conformité avec les engagements souscrits par la France lors de la ratification » de la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE) en 1990, juge d'emblée la défenseure. Pour autant, il demeure des « ombres à ce tableau ». Et « certaines catégories d'enfants sont dans des situations de grande fragilité et les mesures prises pour un meilleur respect de leurs droits sont insuffisantes, voire, dans certains cas, vont à contresens de leur intérêt ». En premier lieu, Claire Brisset doute même que la notion de droits de l'enfant soit véritablement acquise en France. En effet, si le Conseil d'Etat reconnaît que plusieurs articles de la CIDE sont applicables directement par les tribunaux administratifs, il n'en est pas de même de la Cour de cassation qui refuse toujours de la considérer comme d'application directe par les tribunaux de l'ordre judiciaire. Au-delà, Claire Brisset s'inquiète de l'effet de la décentralisation, source, selon elle, de grandes inégalités géographiques car les « garanties nécessaires pour assurer aux enfants une protection d'égale qualité quel que soit le département de leur résidence n'apparaissent pas suffisantes ».

Outre des considérations institutionnelles, le document s'alarme de la situation des enfants soumis à la violence des adultes. Les études épidémiologiques françaises et étrangères indiquent que, chaque semaine en France, trois enfants meurent des suites de mauvais traitements constatés par la justice, auxquels s'ajoutent trois autres décès d'enfants que les spécialistes attribuent à des causes « troublantes et méconnues ». De manière moins dramatique, Claire Brisset juge que les mineurs sont peu protégés des messages et images à caractère violent ou pornographique diffusés par les différents supports médias et préconise la mise en place d'une autorité indépendante « plurimédia » chargée de veiller à les défendre.

Au chapitre de l'accueil des jeunes enfants, le rapport déplore que l'insuffisance dans l'accueil des très jeunes enfants explique en partie que 35 % des enfants de moins de 3 ans soient scolarisés dans des conditions d'accueil (nombre d'enfants par classe, formation des enseignants, respect des rythmes de développement des enfants) généralement négatives pour eux. En d'autres termes, « l'accueil de très jeunes enfants en France doit être considérablement amélioré, notamment par une augmentation considérable du nombre de crèches et par la multiplication des structures de type jardins d'enfants qui assurent la transition entre la crèche et l'école maternelle ».

Le rapport porte également son attention sur l'effet de la séparation des parents sur l'enfant. Or, relève Claire Brisset, le jeune qui le demande n'est pas toujours entendu par le juge aux affaires familiales, ce dernier n'étant pas formellement tenu à cette audition. Aussi, alors que le projet de réforme du divorce actuellement débattu n'a pas prévu de modifier cette situation, la défenseure des enfants a expressément demandé que la future loi rende cette audition obligatoire, sauf exceptions très précises (âge de l'enfant, conditions particulières) et que l'enfant, à titre exceptionnel, puisse faire appel de ce refus.

Autre sujet de mécontentement : Claire Brisset déplore que le droit pénal des mineurs tende actuellement à abandonner la primauté de l'éducatif au profit du répressif. Par ailleurs, elle constate que «  les mesures éducatives subissent d'importants retards de mise en place et les alternatives à l'incarcération demeurent encore beaucoup trop rares, de même que les aménagements de peine » (prison du week-end, peines de substitution par exemple). Surtout, avec la prochaine loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité (dite loi Perben II) qui a été votée le 11 février, des adolescents peuvent être retenus en garde à vue durant quatre jours avant toute mise en examen, «  ce qui semble tout à fait excessif ». Elle critique également les conditions d'incarcération des mineurs.

Pour finir, la défenseure passe en revue la situation des mineurs étrangers, isolés ou non, dont l'acquisition de la nationalité française est devenue plus difficile avec la loi sur l'immigration (2). Elle s'attarde, comme dans son rapport pour 2003 (3), sur le cas des enfants handicapés, « les oubliés du droit à l'éducation », de 6 000 à 15 000 d'entres eux étant privés de tout droit à l'éducation, « en contradiction flagrante avec la CIDE  ».

S.A.

Notes

(1)  Ce rapport sera le deuxième depuis 1990.

(2)  Voir ASH n° 2338 du 19-12-03.

(3)  Voir ASH n° 2334 du 21-11-03.

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