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Suites de la canicule : des pistes de l'IGAS pour améliorer la prise en charge des populations fragiles

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Alors que les établissements et services chargés des personnes âgées sont sans doute confrontés au pic de mortalité constaté chaque hiver, un rapport commandé à l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) revient sur celui qui a été relevé pendant la canicule d'août 2003 (1). L'une des caractéristiques de ce phénomène pourtant massif - 70 % de surmortalité chez les plus de 75 ans - fut son « caractère insidieux et peu alarmant », pour les autorités comme pour les acteurs de terrain, qui persistent à relativiser l'événement en le mettant en perspective sur l'année, remarquent les inspecteurs.

Premier constat de la mission, qui s'est déplacée dans huit départements (2) et a visité 22 établissements : la coordination gérontologique reste insuffisante et « n'a généralement joué son rôle ni dans la prévention des conséquences de la canicule, ni dans la gestion de crise ». Il n'existait pas de dispositif de prévention, la prise de conscience a été « tardive » dans les services de l'Etat « et plus encore » dans les conseils généraux.

Les établissements pour personnes âgées se sont donc retrouvés en première ligne. Le taux de mortalité y est sans doute plus important qu'il n'apparaît, car une part des décès intervenus à l'hôpital est le fait de leurs résidents. Mais le phénomène est lié à la population accueillie : l'âge moyen d'entrée a encore reculé de cinq ans durant les dix dernières années et serait désormais proche de 85 ans. Or le parc des maisons de retraite est « largement inadapté » à l'accueil de personnes de plus en plus dépendantes et désorientées. Le jugement vaut pour de nombreux locaux anciens - dont la rénovation n'est pas envisageable et qui nécessiteraient des opérations lourdes de reconstruction, difficiles à financer - mais aussi pour bien des bâtiments récents. La mission épingle ces « constructions industrialisées à plusieurs étages, sans recherche architecturale particulière, à structure de béton, peu isolées, aux larges baies vitrées sans volets et pourvues de toits en terrasse » où il a souvent fait 40 ° et où les décès se sont concentrés dans les derniers étages. Les mesures de sécurité prises par crainte d'intrusions extérieures, de fugues ou de défenestration des résidents ont aussi parfois rendu impossible le déverrouillage des fenêtres transformant les locaux en autant de pièges à calories.

Avec une moyenne de 0,15 soignant par lit, la médicalisation des établissements, bien qu'en progression, demeure encore insuffisante, estiment aussi les rapporteurs. Pour leurs interlocuteurs, « sa poursuite apparaît comme une priorité dont la canicule a illustré l'urgence », même si, pour beaucoup, les conventions tripartites n'offrent qu'une simple « remise à niveau des moyens qui permet d'assurer la sécurité mais non la qualité dans la prise en charge des résidents ».

Reste le rôle joué par les équipes, dont l'importance au regard des facteurs climatiques, architecturaux et médicaux est difficile à pondérer, mais que la mission juge « comme un élément majeur d'aggravation ou d'atténuation des conséquences de la canicule ». Pour elle, la plupart des responsables « sont encore éloignés d'une culture du risque et de l'anticipation », laquelle devrait aussi envisager d'autres situations de crise comme les pics de pollution, le grand froid, les coupures générales d'électricité, etc. Beaucoup d'établissements sont aussi apparus isolés par rapport à leur environnement sanitaire et social et ce sera peut être « une des retombées positives » de la canicule que de les inciter à s'insérer dans des réseaux de coopération gérontologiques qui, comme les centres locaux d'information et de coordination (CLIC), devraient être généralisés.

Quant à la « mobilisation forte et souvent remarquable » des personnels, le rapport nuance ce « discours unanime » pour considérer qu'elle « a été d'une productivité et d'une efficacité variables selon les établissements ». Malgré l'absence de tout arrêt de travail, le taux des personnels permanents présents en août est faible dans bien des maisons de retraite, peu s'étant dotées de règles d'étalement des congés. Malgré la modification fréquente des organisations et des plannings pendant la période critique, fort peu d'entre elles se sont senties autorisées à embaucher des renforts, note aussi le rapport.

Parmi les recommandations qui découlent logiquement de ces constats, la mission insiste sur la nécessaire clarification des responsabilités. Pour elle, « l'échelon départemental doit être privilégié », tant pour la mise sur pied du système d'alerte que pour la construction des coordinations gérontologiques ou le renforcement des services de maintien à domicile. Dans le cadre de la décentralisation, « le rôle central » et la responsabilité du conseil général dans l'action sociale et médico-sociale devront donc être affirmés et pris en compte, même si la gestion de crise revient au préfet.

Notes

(1)  La prise en charge sociale et médico-sociale des personnes âgées face à la canicule de l'été 2003 - Rapport de Didier Lacaze, Michel Laroque, Anne-Marie Léger et Didier Noury. Disp. sur www.ladocumentationfrancaise.fr.

(2)  La mission a choisi d'aller dans les Bouches-du-Rhône, le Cher, la Creuse, l'Eure-et-Loir, l'Isère, à Paris, dans le Val-de-Marne et dans les Yvelines, départements où les taux de surmortalité se sont échelonnés de + 25 % (dans les Bouches-du-Rhône) à + 171 % (dans le Val-de-Marne).

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