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Polygamie : nouvelles interrogations sur le droit au séjour

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Depuis la loi du 24 août 1993 prohibant la polygamie sur le territoire, les ressortissants étrangers qui se prévalent d'une pluralité de mariages n'ont plus le droit au séjour et au regroupement familial. D'où la situation problématique de ceux qui ont obtenu des cartes de résident de dix ans délivrées avant 1993, et qui arrivent aujourd'hui à expiration.

Cartes de résident non renouvelées

C'est l'un des thèmes centraux du rapport d'observation 2003 du service d'information juridique Info Migrants (1). Sur la totalité des appels relatifs au droit de la famille et au mariage (plus de la moitié des 14 700 appels enregistrés en 2002), 5 % concernent une situation de polygamie, et principalement un refus de renouvellement de carte de résident. «  Finalement ne pouvant obtenir ni la carte de résident, ni un titre de séjour temporaire de plein droit, mais appartenant parfois à des catégories dites juridiquement “protégées”, les étrangers dont la carte de résident expire se retrouvent dans une situation communément appelée “ni régularisable, ni expulsable ” », commente le rapport. Les parents d'enfants français et les étrangers présents en France depuis plus de 15 ans sont notamment dans ce cas. «  Très souvent, nous constatons que les travailleurs sociaux sont les premiers surpris lorsque nous évoquons la règle de droit applicable à propos des familles polygames  », note d'ailleurs Info Migrants.

Le traitement juridique est, en outre, pour le moins inégal suivant le statut des épouses :selon une circulaire d'avril 2000 non publiée, précise Info Migrants, la « première » épouse ne peut faire l'objet d'un refus de séjour, contrairement à la « deuxième ». Cette dernière est alors lésée et doit revoir ses projets, à la fois en termes d'intégration et de maintien des liens familiaux : elle «  envisage parfois la dissolution de l'union (divorce), alors que l'époux évoque plutôt pour elle un retour au pays d'origine ».

Au même titre que les parents, les enfants sont concernés par l'interdiction du regroupement familial polygamique, puisque ceux d'une co-épouse ne peuvent prétendre avoir droit au séjour. D'où des problèmes forcément complexes : «  Il existe de fait des situations où les enfants d'une co-épouse sont présents sur le territoire français, précise Info Migrants. Et le père nous sollicite afin d'envisager un regroupement familial sur place “dans l'intérêt des enfants”  ». La loi sur l'entrée et le séjour des étrangers ayant, en novembre dernier, interdit ce type de procédure, les cas risquent d'être de plus en plus difficiles à régler...

Mais la polygamie a aussi des conséquences sur la perception de certaines prestations sociales, comme le revenu minimum d'insertion. Ainsi, une circulaire de 1996 distingue les familles installées de façon régulière avant l'entrée en vigueur de la loi et celles qui sollicitent la prestation depuis son application. Dans le premier cas, l'époux demandeur pouvait bénéficier d'une allocation prenant en compte sa première épouse et tous les enfants, quelle que soit la mère. Situation qui s'abolit dès la fin de la période de validité de la carte de résident. Depuis le 24 août 1993, seuls l'époux et la co-épouse entrée dans le cadre du regroupement familial (et les enfants du couple) sont concernés. «  La grande majorité des appels dont nous sommes saisis concerne des demandes de RMI après l'entrée en vigueur de la loi, témoigne Info Migrants. Il peut s'agir notamment de la prise ou non en compte des enfants et/ou d'une des co-épouses entrés en dehors du regroupement familial. »

Quels droits pour les co-épouses ?

Autre casse-tête pour les travailleurs sociaux :certaines co-épouses se demandent si elles peuvent avoir droit au RMI, alors qu'elles entament une démarche de « décohabitation » ou de divorce. La question n'est pas anodine, puisque c'est l'autonomie financière qui peut permettre à ces femmes de se mettre ou non en conformité avec la loi prohibant la polygamie. «  En effet, nous constatons fréquemment que c'est l'époux qui détient les “cordons de la bourse” et l'absence de ressources personnelles pour la co-épouse qui souhaite mettre un terme à la situation de polygamie constitue un obstacle supplémentaire », observe Info Migrants.

Notes

(1)  La législation sur les étrangers et ses implications dans la vie quotidienne -Rapport d'observation - Décembre 2003 - Info Migrants : 251, rue du Faubourg Saint-Martin - 75010 Paris - Tél. 01 53 26 52 50.

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