Recevoir la newsletter

Loi sur le handicap : un texte qui doit encore être amélioré, estiment les associations

Article réservé aux abonnés

Bien sûr, il y a « des avancées », que la plupart des associations saluent au passage, mais sans s'y attarder. A ce stade où il est encore temps de faire évoluer le projet de loi « pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » présenté le 28 janvier (1) en conseil des ministres, les premiers intéressés détaillent surtout leurs insatisfactions et les nombreux points qu'ils voudraient voir être améliorées au fil des débats parlementaires (2).

« Une vue très partielle »

Première critique - avancée notamment par l'Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales (Unapei), l'Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (Uniopss) et l'Association pour adultes et jeunes handicapés (APAJH) - : « la vue très partielle » proposée, des questions essentielles comme le financement du dispositif, les prérogatives de la future Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, le fonctionnement des maisons du handicap ou la répartition des compétences entre l'Etat, les conseils généraux et l'assurance maladie, devant être réglées par d'autres textes législatifs à venir. De même, dénoncent l'Uniopss et l'Union nationale des associations de sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes (Unasea), des éléments fondamentaux tels que le mode d'évaluation des besoins des personnes handicapées ou les conditions d'éligibilité à la prestation de compensation sont renvoyés à des décrets, « la fonction législative [s'effaçant] à l'évidence devant la puissance réglementaire, non contrôlée, de l'administration ».

Autre remarque générale : le décalage entre « un exposé des motifs généreux » et une traduction souvent jugée beaucoup plus restrictive. Elle n'est pas à la hauteur des promesses présidentielles, tranche l'Association nationale pour l'intégration des personnes handicapées moteurs (Anpihm). Elle ne se concrétise pas assez en « vrais programmes d'action », regrette l'Association des paralysés de France (APF). « La question de l'effectivité des droits reste posée », estime l'Uniopss.

La définition même du handicap, en retrait sur les derniers travaux de l'Organisation mondiale de la santé, ne fait pas l'unanimité. Revendiquée par Jean-François Mattei comme « humaniste » et « axée sur la personne », elle ne fait justement pas assez la part d'un environnement lui aussi handicapant pour l'APF, la Fédération des établissements hospitaliers et d'assistance privés à but non lucratif (FEHAP), l'Union nationale des associations de soins et services à domicile (Unassad) et l'Uniopss.

Regret tout aussi largement partagé : que le droit à compensation intégral « ne soit pas acté », selon les termes de l'Association des accidentés de la vie (FNATH), et qu'on en reste aux demi- mesures, avec une prise en charge partielle des aides techniques ou humaines : « Accepteriez-vous de vous coucher tous les jours à 19 heures », faute d'auxiliaire de vie en soirée ?, demande l'APF. Ce droit n'est pas vraiment universel si son montant reste lié aux ressources du bénéficiaire ou à son niveau d'incapacité, dénonce aussi la FNATH. « La loi doit prévoir explicitement la solvabilisation des besoins de toutes les personnes handicapées de la même manière que notre système d'assurance maladie garantit à chaque personne malade d'être soignée », revendique le Syndicat national des associations de parents d'enfants handicapés mentaux (Snapei) qui précise que cela ne coûterait, à terme, que deux points de CSG et que c'est la condition pour passer définitivement d'un système d'aide sociale à un système de protection sociale.

Le droit à compensation demeure également borné par des barrières d'âge. « Les enfants s'en trouvent exclus, dénonce l'Association française contre la myopathie (AFM), l'allocation d'éducation spéciale (AES) ne couvrant pas du tout les aides techniques et étant insuffisante pour financer les aides humaines.  » L'Uniopss, aussi, regrette que le projet de loi maintienne des « traitements discriminatoires » selon l'âge de survenue du handicap : l'AES jusqu'à 20 ans, la prestation de compensation ensuite et l'allocation personnalisée d'autonomie après 60 ans.

Des mesures et des garanties concrètes

L'accessibilité aussi subit encore trop d'exceptions aux yeux des associations. Ainsi l'APF réclame-t-elle un programme pluriannuel volontariste sur le bâti existant, y compris pour inciter les propriétaires privés (de commerces de proximité, de lieux de loisirs...) à réaliser des travaux. De même, l'Union nationale pour l'insertion sociale des personnes déficientes auditives (Unisda) veut voir imposer aux chaînes de télévision le sous-titrage de l'ensemble de leurs programmes et, plus généralement, la traduction écrite ou visuelle de toute information orale ou sonore, le manquement à ces obligations devant être sanctionné de la même manière que le non-aménagement pour le handicap moteur.

Des garanties concrètes sur la prise en compte du projet de la personne, la Fédération des associations pour l'insertion des personnes porteuses d'une trisomie 21 (FAIT 21) en demande également en s'interrogeant : quel sera le changement lorsqu'une famille aura inscrit son enfant à l'école et que l'équipe pédagogique affirmera qu'en raison de ses « besoins particuliers » il doit être orienté en établissement spécialisé ? Quel sera le changement quand, dans la maison du handicap, la famille rencontrera les mêmes interlocuteurs que ceux des actuelles commissions d'orientation ou bien les mêmes équipes techniques d'évaluation, « théoriquement indépendantes mais issues de fait des institutions spécialisées »  ?

Les lacunes du projet de loi sont aussi pointées. L'Unassad ne trouve nulle mention du nécessaire développement des services d'aide à la vie quotidienne, leurs interventions semblant même exclues du chapitre consacré aux métiers concourant au maintien ou au retour à domicile.

La FNATH juge également «  assourdissant » le silence du projet de loi sur le montant de l'allocation aux adultes handicapés  (AAH) . « L'AAH doit devenir un revenu d'existence, non une simple allocation, et doit être revalorisée de façon à atteindre le même montant que le SMIC », martèle l'Association des paralysés de France.

Pour le Collectif des démocrates handicapés (CDH), un autre point brille par son absence : la citoyenneté des personnes handicapées. Il voudrait la voir beaucoup mieux reconnue à chaque niveau de décision, d'un comité national qui « statuerait sur les projets de loi » à la maison départementale du handicap qui devrait être « cogérée par des citoyens handicapés élus ».

Reste quand même deux points de satisfaction explicites : la reconnaissance du handicap psychique et de l'accompagnement adapté qu'il nécessite, saluée par l'Union nationale des amis et familles de malades mentaux (Unafam). Et le programme de création de 40 000 places en cinq ans ajouté in extremis à l'annonce du projet de loi. « Un effort conséquent destiné à remédier au manque criant d'équipements, source de détresse humaine inacceptable », commente la FEHAP, « pro- pre à résoudre une partie des besoins recensés », reconnaît l'Unapei.

Notes

(1)  Voir ASH n° 2344 du 30-01-04.

(2)  Sur la réaction du Conseil national consultatif des personnes handicapées à l'avant-projet de loi dans les ASH n° 2342 du 16-01-04.

LE SOCIAL EN ACTION

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur