En 20 ans, le poids des transferts sociaux a augmenté de plus de quatre points dans la richesse nationale. Les prestations de protection sociale sont en effet passées de 24,9 % du produit intérieur brut (PIB) en 1981 à 29,1 % en 2002. Leur part a progressé encore plus fortement dans le revenu disponible des ménages où elle atteint 36,4 % en 2002 contre 30,4 % en 1981. Tel est le principal enseignement d'un travail réalisé par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) qui permet, pour la première fois, de remonter sur cette longue période avec des données rendues comparables (1).
La progression des transferts sociaux n'a pas été continue pendant ces deux décennies. Sensible aux variations de la conjoncture économique, ses à-coups reflètent aussi les réformes de la législation, notamment les freinages successifs imposés à l'assurance maladie dans les années 80, puis la poussée d'accélérateur qui accompagne la création du revenu minimum d'insertion (RMI) et la reprise des dépenses d'assurance maladie au début des années 90. Après une baisse entre 1996 et 2000, la tendance est de nouveau à la hausse en 2001 et 2002. Cette dernière année, le ratio dépenses/PIB est revenu à son niveau de 1993. La DREES note que les fluctuations des dépenses de protection sociale sont moins amples que celles du PIB, ce qui leur confère un rôle d'amortisseur.
Les différents types de prestations n'ont pas non plus évolué de la même façon. Certaines ont vu leur part diminuer, notamment celles liées aux accidents du travail (qui passent de 3,1 % à 1,7 %), ou à la maternité et à la famille (de 12,3 % à 10,3 %). En baisse également : la part relative de l'indemnisation du chômage qui, à 7,8 % en 2002, a régressé de trois points... alors que le taux de chômage a connu le mouvement inverse.
La part du risque invalidité est restée stable, celle du logement progresse de un point, tandis que le risque « pauvreté et exclusion sociale », né en 1989 avec la création du RMI, augmente jusqu'à atteindre 1,5 % des prestations. Les deux postes les plus importants demeurent, de loin, la santé (20 % des prestations, en augmentation depuis l'an 2000) et la vieillesse (50 %). Ce dernier chapitre cumule la croissance du nombre de retraités (du fait de la retraite à 60 ans) et l'augmentation moyenne des pensions. Au total, les deux risques santé et vieillesse contribuent à eux seuls pour 80 % - voire 90 %certaines années - à l'augmentation des prestations.
Toutes origines confondues, les ressources de la protection sociale ont globalement suivi l'évolution des dépenses avec, au cours de la période, 15 exercices excédentaires contre 7 déficitaires. La structure de ces ressources s'est pourtant profondément transformée. La part des impôts et taxes affectées (incluant la contribution sociale généralisée) est passée de 2 % en 1981 à 19 % en 2002. A l'inverse, le poids des cotisations (surtout des employeurs) a diminué de 78 % à 67 %, de même que celui des contributions publiques, passé de 16 % à 11 %. L'apport fiscal totalise désormais plus de 30 % des ressources. Le système a aussi gagné en complexité avec la multiplication des divers fonds - de financement, de réserve, de solidarité... - qui a presque doublé le volume des transferts entre régimes. Au total, estime cependant la DREES, l'équilibre global obtenu au cours des 20 dernières années semble s'être réalisé sans surcroît de concours de l'Etat.
(1) « Vingt ans de comptes de la protection sociale en France. Une rétropolation de 1981 à 2002 » - DREES - Etudes et résultats n° 278 - Décembre 2003.