L'auteur d'un inceste peut-il adopter son enfant dont la filiation est déjà établie à l'égard de son autre parent ? C'est cette question qu'a tranchée la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 6 janvier.
Dans cette affaire, une jeune fille, née en 1990 de l'union d'un demi-frère et d'une demi-sœur ayant une filiation paternelle commune, a été reconnue par sa mère puis par son père. Cette seconde reconnaissance a été annulée en application de l'article 334-10 du code civil qui énonce que s'il existe entre les père et mère de l'enfant naturel un des empêchements à mariage pour cause de parenté (1), la filiation étant déjà établie à l'égard de l'un, il est interdit de l'établir à l'égard de l'autre. Pour tenter de contourner cette interdiction, le père décidait alors de déposer une requête en adoption simple de l'enfant en invoquant le fait que ce type d'adoption, au contraire de l'adoption plénière, n'établit pas une filiation biologique. Rejeté dans un premier temps, son argument a reçu, en revanche, un écho favorable en appel. La cour a en effet considéré que la loi n'interdisait pas l'adoption de son propre enfant et que l'adoption simple, ne manifestant pas une filiation biologique, ne pouvait être assimilée à la reconnaissance d'un enfant dont les père et mère connaissent un des empêchements à mariage liés au lien de parenté.
C'est cette position que la Cour de cassation censure. Elle estime, au contraire, que la requête en adoption contrevient « aux dispositions d'ordre public édictées par l'article 334-10 du code civil interdisant l'établissement du double lien de filiation en cas d'inceste absolu (2) ».
(1) Pour se marier, il faut remplir certaines conditions juridiques du mariage, mais également ne pas faire l'objet d'empêchements à mariage, fondés sur des considérations morales ou d'utilité sociale (existence d'un mariage antérieur non dissous, degré de parenté ou d'alliance entre les époux, non-expiration du délai de viduité). Ces derniers affectent les futurs époux et leur font défense de se marier.
(2) L'inceste est absolu entre ascendant et descendant légitimes ou naturels, entre frère et sœur et, en cas d'adoption simple, entre l'adoptant, l'adopté et ses descendants.