Une nouvelle analyse du Centre de recherche, d'étude et de documentation en économie de la santé (Credes) (1) portant sur l'année 2002 confirme ce qui était apparu pour l'année 2000, an 1 de la couverture maladie universelle (CMU). Les bénéficiaires de la CMU complémentaire sont en plus mauvaise santé que le reste de la population.
Pas en chiffres bruts : ils déclarent en moyenne 2,3 affections, contre 2,6 en général. Mais comme ils sont aussi plus jeunes (31 ans d'âge moyen contre 40), qu'ils incluent beaucoup d'enfants et peu de personnes âgées, il importe de redresser les chiffres. Et alors, à âge et sexe comparables, ils déclarent en moyenne 20 % d'affections de plus que les autres.
Les différences apparaissent surtout dans la prévalence des troubles mentaux ou du sommeil (1,8 fois plus nombreux) et les maladies de l'oreille (1,7). Surviennent aussi plus fréquemment les maladies infectieuses, celles de l'appareil respiratoire et du système nerveux comme les migraines. Une exception notable : les troubles de la vue, qui sont moins souvent déplorés que dans la population générale, sans que l'on sache, précise le Credes, si cela correspond à une réalité médicale ou si cela tient au renoncement plus fréquent au port de lunettes, faute de prise en charge suffisante. Tous les autres indicateurs de santé (appréciation de l'état général, gêne dans les activités de la vie quotidienne...) confirment cette tendance générale.
Ceci explique sans doute cela : les bénéficiaires de la couverture maladie universelle cumulent aussi les facteurs de précarité. Ils sont sept fois plus souvent au chômage, les familles monoparentales sont six fois plus fréquentes, les familles nombreuses cinq fois plus... Ils sont aussi, parmi les plus de 16 ans, deux fois plus souvent fumeurs.
Le Centre de recherche, d'étude et de documentation en économie de la santé a également porté son projecteur sur les personnes proches du seuil de la couverture maladie universelle. Elles sont difficiles à caractériser car hétérogènes, notent les chercheurs. Certaines ont un statut précaire, d'autres vivent dans des ménages de cadres ou de professions intermédiaires. On y trouve une proportion importante d'étudiants. Tous partagent néanmoins deux caractéristiques : leur plus faible taux de couverture sociale et un renoncement aux soins plus fréquent. Intéressant à noter quand il est question de favoriser l'accès à la mutualisation...
Le Credes débusque aussi dans son étude une frange de la population qui devrait, d'après ses revenus, bénéficier de la couverture maladie universelle complémentaire et ne le fait pas. Son état de santé paraît plus favorable que celui des bénéficiaires, ce qui explique sans doute pour partie le non-recours aux droits, l'absence d'information n'étant pas non plus à exclure.
Au total, les études menées confirment que toutes les analyses sur les dépenses (plus fortes que la moyenne) et les comportements de soins (différents) des bénéficiaires de la couverture maladie universelle doivent prendre en compte leur plus mauvais état de santé (2).
(1) Questions d'économie de la santé n° 76 - Décembre 2003 - En ligne sur
(2) Voir ASH n° 2336 du 5-12-03.