Prendre sa retraite à partir de 56 ans quand on a commencé à travailler à 14,15 ou 16 ans est un droit désormais ouvert aux salariés (1) avec la loi Fillon sur les retraites du 21 août 2003 (2). Il sera effectif au 1er janvier 2004 avec la parution du décret du 30 octobre 2003 qui en fixe les conditions d'application et une circulaire de la caisse nationale de l'assurance vieillesse (CNAV) du 18 novembre 2003 qui présente aux caisses ses incidences pratiques.
Maintes fois revendiqué sous les précédentes législatures, très attendu de ses bénéficiaires potentiels, le départ en retraite anticipée pour les salariés à carrière longue est présenté comme une avancée sociale - ce fut même ce qui décida la CFDT et la CGC, en mai dernier, à entrer en négociation avec le gouvernement sur la réforme des retraites. Mais le dispositif risque d'en décevoir certains, compte tenu des conditions d'accès restrictives imposées par le gouvernement. La première : avoir déjà cotisé 42 ans à un régime d'assurance vieillesse (168 trimestres), soit 2 ans de plus que la durée nécessaire pour l'obtention d'une retraite à taux plein. En outre, sur cette période, l'assuré doit pouvoir justifier d'une période d'assurance (variable selon l'âge de départ en retraite) ayant donné lieu à cotisations à sa charge. De fait, cette exigence exclut les salariés qui n'ont pas eu de carrière linéaire, notamment ceux qui ont connu des périodes de chômage. Pour finir, l'intéressé doit avoir débuté son activité professionnelle avant 16 ou 17 ans.
La CNAV estime que 159 000 salariés devraient profiter du dispositif en 2004 (ce qui représenterait un coût de 1,050 milliard d'euros). Ils devraient être 460 000 d'ici à 2008.
Rappelons que les intéressés pourront également percevoir leur retraite complémentaire ARRCO et AGIRC (voir encadré).
Les assurés doivent remplir trois conditions cumulatives pour accéder au dispositif : justifier d'une durée d'assurance d'au moins 168 trimestres, dont une partie ayant donné lieu à cotisations à leur charge, et d'un début d'activité avant l'âge de 16 ou 17 ans.
Pour partir en retraite avant 60 ans, les assurés doivent totaliser 168 trimestres tous régimes confondus (code de la sécurité sociale [CSS], art. D. 351-1-1). Cette durée prend en compte tous les trimestres retenus pour le calcul du taux de la pension (circulaire CNAV du 18 novembre 2003 et tableau) :périodes cotisées, reconnues équivalentes, assimilées, majorations de durées d'assurance et toute autre période validée au régime général.
Code de la sécurité sociale, art. L. 351-1 à L. 357-21, R. 351-1 à R. 356-12, D. 351-1 à D. 357-28.
Code de la sécurité sociale, art. L. 351-1-1 issu de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003, art. 23, J.O. du 22-08-03.
Code de la sécurité sociale, art. D. 351-1-1 à D. 351-1-3 issus du décret n° 2003-1036 du 30 octobre 2003, J.O. du 31-10-03.
Circulaires CNAV n° 2003/46 du 18 novembre 2003 et n° 2003/48 du 21 novembre 2003.
Circulaire ARRCO/AGIRC du 1er décembre 2003.
A noter : le dispositif a été imaginé par le législateur pour s'appliquer jusqu'en 2008. Rappelons qu'au-delà, la durée d'assurance (au maximum de 160 trimestres) doit progresser pour être portée à 164 trimestres (41 ans) en 2012.
Sont retenues :
les périodes de cotisations à l'assurance obligatoire et volontaire ;
les rachats de cotisations (y compris ceux prévus par la loi Fillon sur les retraites, selon des conditions à définir par décret) ;
les périodes cotisées aux autres régimes obligatoires.
Les périodes reconnues équivalentes sont retenues. Pour mémoire, il s'agit :
des périodes d'activité professionnelle antérieure au 1er avril 1983 qui peuvent ou auraient pu donner lieu à rachat de cotisations ;
de celles non salariées accomplies, de façon régulière et habituelle, avant le 1er janvier 1976 sur une exploitation agricole ou assimilée, entre le 18eet le 21e anniversaire des intéressés ;
des périodes antérieures au 1er avril 1983 au cours desquelles les membres de la famille du chef d'entreprise, âgés d'au moins 18 ans sans bénéficier d'un régime obligatoire d'assurance vieillesse, ont participé de façon régulière et habituelle à l'exercice d'une activité professionnelle non salariée artisanale, industrielle ou commerciale.
Sont également prises en compte, dans des conditions spécifiques, certaines périodes, dites « assimilées », durant lesquelles l'intéressé n'a pas exercé d'activité salariée, et sous réserve qu'il ait eu auparavant la qualité d'assuré social (sauf périodes de service national). Il s'agit des périodes de maladie, maternité, invalidité, d'accident du travail entraînant une incapacité temporaire ou permanente, de rééducation professionnelle, de chômage et assimilé, de guerre, de détention provisoire, de service national, d'affiliation au régime institué en faveur des rapatriés, de versement de l'indemnité de soin aux tuberculeux.
Sont également concernées les périodes de perception de l'allocation de chômeurs âgés (3), l'allocation équivalent retraite, l'allocation de préparation à la retraite, l'allocation de congé solidarité, l'allocation de cessation d'activité de certains travailleurs salariés, l'allocation de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante, l'allocation de solidarité spécifique, l'allocation spéciale du Fonds national pour l'emploi.
Rappelons aussi que la loi du 21 août 2003 permet la validation des droits vieillesse des salariés en congé de reclassement pour la période où ils perçoivent une rémunération non soumise à cotisations sociales (4).
Est décomptée dans la durée d'assurance au régime général la majoration de durée d'assurance pour enfant ou pour congé parental. La majoration introduite par la loi du 21 août 2003 au profit des salariés ayant élevé un enfant lourdement handicapé sera également prise en compte une fois son décret d'application paru.
Il convient aussi d'inclure dans la durée d'assurance :
les périodes validées en période de congé formation ;
celles des stages de la fonction publique prises en charge par l'Etat ;
celles cotisées à l'assurance volontaire des parents au foyer ;
les cotisations à la charge de l'assuré, même prises en charge par un tiers (aide de l'Etat, par exemple) ;
les périodes d'assurance non cotisées aux autres régimes ;
les périodes effectuées à l'étranger conformément aux accords internationaux tels qu'appliqués ;
les périodes validées gratuitement dans le cadre de la loi du 26 décembre 1964 en faveur des Français ayant résidé en Algérie ;
le cas échéant, les périodes présumées validées, en l'absence de document comptable attestant du précompte de cotisations, sur preuves concordantes.
La personne doit justifier, sur ces 168 trimestres, d'une durée d'assurance - variable selon l'âge de départ en retraite - appréciée tous régimes de base confondus, et ayant donné lieu à cotisations à sa charge. Sont néanmoins réputées cotisées, sous certaines conditions, les périodes de service national et d'incapacité temporaire (maladie, maternité, accident du travail) (voir ci-dessous) (CSS, art. D. 351-1-1 et D. 351-1-2).
La détermination de cette durée réputée cotisée doit s'effectuer en limitant le nombre de trimestres retenus par année civile à un maximum de 4 trimestres tous régimes de base confondus (CSS, art. D. 171-11-1).
La CNAV a précisé qu'un assuré peut bénéficier de 4 trimestres réputés cotisés au titre du service national et de 4 autres au titre de la maladie, la maternité, ou d'un accident du travail soit, au maximum, 8 trimestres au total (circulaire CNAV du 18 novembre 2003).
Le demandeur doit justifier de (CSS, art. D. 351-1-1,1° à 3°) :
168 trimestres (42 ans) cotisés pour un départ à 56 ou 57 ans ;
164 trimestres (41 ans) cotisés pour un départ à 58 ans ;
et 160 trimestres (40 ans) cotisés pour un départ à 59 ans.
Sont retenus dans la durée d'assurance cotisée (voir aussi tableau) :
les périodes de cotisations à l'assurance obligatoire et volontaire ;
les rachats de cotisations ;
et les périodes ayant donné lieu à validation gratuite.
En revanche, en sont exclues :
les périodes d'assurance vieillesse des parents au foyer dont les cotisations sont à la charge des caisses d'allocations familiales ;
les périodes assimilées, excepté celles de service national et d'incapacité temporaire sous certaines conditions (voir ci-après) ;
les périodes reconnues équivalentes ;
les majorations de durée d'assurance pour enfant ou pour congé parental (5).
Comme pour l'ouverture du droit à la retraite, les périodes de service national, quel que soit sa nature, sont retenues de date à date par périodes de 90 jours en totalisant tous les jours de service validables. Le résultat est arrondi au chiffre entier supérieur.
Les trimestres assimilés sont validés dans l'année civile où expire chaque période de 90 jours (consécutifs ou non). En cas de chevauchement sur 2 années civiles, le trimestre supplémentaire qui correspond à la dernière fraction de période est affecté soit à la fin de la période validée, soit au début de cette même période. La solution la plus favorable est retenue.
Pour le calcul de la retraite anticipée, l'ensemble de ces périodes est retenu dans la limite de 4 trimestres sur la totalité de la carrière. Le nombre de trimestres cotisés ne peut excéder 4 pour une même année civile. Ces trimestres peuvent être affectés à toute année civile comportant du service national.
Exemple (source CNAV) : un assuré a accompli son service national du 1er décembre 1965 au 30 novembre 1966. Périodes assimilées : 365 jours ÷ 90 =4,05 périodes assimilées arrondies à 5. Sont affectés au compte de l'assuré :
- en 1965 : 3 trimestres cotisés et une période assimilée service militaire ;
- en 1966 : 4 périodes assimilées militaires ;
- en 1967 : 4 trimestres cotisés.
Dans le cadre de la retraite avant 60 ans, seront retenues comme périodes réputées cotisées 1 trimestre en 1965 et 3 en 1966. Le dernier trimestre de 1966 n'est pas retenu comme période « réputée cotisée » du fait de la prise en compte du service national dans la durée cotisée dans la limite de 4 trimestres.
Sont validés :
le trimestre au cours duquel l'assuré a bénéficié de son 60e jour d'indemnisation au titre de l'assurance maladie ;
le trimestre civil au cours duquel est survenu l'accou- chement ;
celui au cours duquel l'assuré a bénéficié de son 60e jour d'indemnisation au titre de l'incapacité temporaire des accidents du travail.
En revanche, les rentes accident du travail perçues pour une incapacité permanente d'au moins 66 % sont exclues des périodes validées pour le départ anticipé en retraite, car seules sont prises en compte les périodes d'incapacité temporaire de travail.
Le nombre de trimestres cotisés ne peut pas excéder 4 pour une même année civile.
Exemple (source CNAV) : un salarié a, au cours de sa carrière, validé :
- en 1970 : 4 trimestres d'assurance cotisés ;
- en 1971 : 2 trimestres d'assurance cotisés et 3 assimilés maladie ;
- en 1972 : 3 trimestres d'assurance cotisés et 1 assimilé maternité ;
- en 1973 : 4 trimestres cotisés ;
- en 1974 : 4 trimestres assimilés maladie. Doivent être retenus en périodes réputées cotisées, pour un départ anticipé :
- 2 trimestres assimilés maladie en 1971 ;
- le trimestre assimilé maternité en 1972 ;
- et 1 trimestre assimilé maladie en 1974. Soit 4 trimestres réputés cotisés maladie, maternité, accident du travail au total.
Si un assuré bénéficie, sur une même année civile, de trimestres assimilés service national et de trimestres assimilés maladie, maternité ou incapacité temporaire d'accident du travail, les trimestres de service national sont pris en priorité (circulaire CNAV du 18 novembre 2003).
Exemple (source CNAV) : au compte d'un assuré sont reportés :
- en 1964 : 2 trimestres d'assurance cotisés et 2 assimilés maladie ;
- en 1965 : 2 trimestres assimilés maladie, 2 assimilés service national et 2 trimestres cotisés ;
- en 1966 : 3 trimestres assimilés service national et 1 cotisé. Sont retenus en périodes réputées cotisées :
- 2 trimestres assimilés maladie en 1964 ;
- 2 trimestres assimilés service national en 1965 ;
- et 2 trimestres assimilés service national en 1966.
A noter : les périodes assimilées reportées au compte de l'assuré avant 1971 ne peuvent pas être différenciées. Sauf information contraire au dossier, elles sont considérées comme entrant dans la catégorie des périodes assimilées de maladie, maternité, accident du travail.
Les périodes de carrière couvertes par le droit communautaire ou une convention bilatérale sont concernées, mais seules sont prises en compte celles d'assurance, d'emploi ou de résidence. Si la distinction entre périodes d'assurance et périodes assimilées n'apparaît pas sur les formulaires, l'ensemble des périodes mentionnées doivent être retenues en tant que périodes cotisées (circulaire CNAV du 18 novembre 2003).
Les intéressés doivent avoir validé au moins 5 trimestres avant la fin de l'année civile du 16e anniversaire pour un départ à 56,57 ou 58 ans (à défaut, pour ceux nés au dernier trimestre, 4 trimestres validés dans l'année civile des 16 ans). Pour un départ à 59 ans, les assurés doivent avoir validé au moins 5 trimestres avant la fin de l'année civile du 17e anniversaire (à défaut, pour ceux nés au dernier trimestre, 4 trimestres validés dans l'année civile des 17 ans) (CSS, art. D. 351-1-3).
A noter : ceux qui remplissent les conditions de départ à un moment donné (par exemple à 56 ans) n'auront plus à en justifier par la suite (à 57,58 ou 59 ans). Le fait que, le cas échéant, ils se soient vu attribuer une pension d'un autre régime importe peu.
Sont décomptés dans cette durée d'assurance les périodes de cotisations à l'assurance obligatoire ou volontaire, les rachats de cotisations, ainsi que les périodes assimilées à des périodes d'assurance retenues dans un ou plusieurs régimes. Sont également prises en compte les périodes accomplies à l'étranger.
Signalons que les personnes qui ont été apprenties avant 1972 alors qu'elles n'étaient pas rémunérées peuvent accéder au dispositif de régularisation des cotisations arriérées. Celles-ci sont alors retenues pour l'ouverture du droit à la retraite et pour le calcul de cette prestation.
Exemples (source CNAV) :
- Une assurée, mère de 2 enfants, est née le 28 février 1945 et a commencé à travailler à 14 ans en juin 1959, année pour laquelle elle valide 3 trimestres. Son relevé de carrière présente 179 trimestres acquis par cotisations et 16 de majoration pour enfant. Au 1erjanvier 2004, elle aura 58 ans et 11 mois. Elle doit réunir 168 trimestres dont 164 cotisés. Tel est bien son cas (elle en a 195 au total, dont 179 cotisés). Elle doit en outre justifier de 5 trimestres avant la fin de l'année civile de ses 16 ans, soit le 31 décembre 1961. Tel est également le cas puisqu'elle a validé 3 trimestres en 1959,4 en 1960 et 4 en 1961 (11 au total). L'intéressée peut donc bénéficier du dispositif à 58 ans et 11 mois.
-Un assuré, né le 15 décembre 1947, a commencé à travailler à 16 ans, en septembre 1964, année pour laquelle il valide 4 trimestres. Son relevé de carrière fait état de 160 trimestres acquis uniquement par cotisations. Au 1er janvier 2004, il aura 56 ans et n'aura que 160 trimestres validés et cotisés (il lui en faut 168). Son départ n'est pas envisageable avant le 1er janvier 2006, date à laquelle il aura 58 ans et réunira 168 trimestres d'assurance validés, dont 164 cotisés, s'il a continué à travailler. Pour un départ à 58 ans, il doit valider 5 trimestres avant la fin de l'année civile de ses 16 ans (le 31décembre 1963) ou, puisqu'il est né en décembre, 4 avant la fin de l'année civile de ses 16 ans. Or tel n'est pas son cas, puisqu'il a commencé à travailler en septembre 1964, année civile de ses 17 ans. Il ne pourra donc partir qu'au 1er janvier 2007, à 59 ans. Il ne remplira pas la condition des 5 trimestres avant la fin de l'année civile de ses 17 ans (1964), mais celle des 4 trimestres validés dans l'année civile des 17 ans, prévue pour les personnes nées au dernier trimestre.
Le calcul de la pension se fait conformément aux règles de droit commun. Celles-ci ont été partiellement modifiées par la loi Fillon sur les retraites du 21 août à effet au 1er janvier.
Pour mémoire, la pension de retraite se calcule selon la formule suivante :
« SAM » est le salaire annuel moyen ; « T » le taux ; « D » la durée d'assurance au régime général « d » la durée maximale d'assurance au régime général prise en compte.
A partir du 1er janvier 2004, le salaire annuel moyen (SAM) est calculé, compte tenu de l'année de naissance de l'assuré, sur (circulaire CNAV du 18 novembre 2003) :
25 années pour les assurés nés en 1948, qui auront donc 56 ans en 2004 (à confirmer par décret) ;
24 années pour ceux nés en 1947 (qui auront 57 ans en 2004) ;
23 années pour ceux nés en 1946 (qui auront 58 ans en 2004) ;
22 années pour ceux nés en 1945 (qui auront 59 ans en 2004) ;
et 21 années pour ceux nés en 1944 (qui auront 60 ans en 2004).
Dans sa circulaire du 18 novembre 2003, la CNAV examine la situation des chômeurs, des invalides, des inaptes au travail et des titulaires d'une pension de réversion ou de veuvage au regard de la retraite anticipée.
Les chômeurs
L'allocation de chômage cesse d'être versée aux allocataires de plus de 60 ans justifiant de la durée d'assurance requise pour la retraite à taux plein (160 trimestres) et, en tout état de cause, à partir de 65 ans.
Un chômeur peut, s'il en remplit les conditions requises, demander sa retraite avant 60 ans. Les Assedic, qui doivent en être informées, ne peuvent, insiste la CNAV, ni mettre fin prématurément au versement des allocations, ni provoquer une demande de retraite avant 60 ans. En d'autres termes, il appartient à l'intéressé de regarder son intérêt : prendre sa retraite ou conserver le bénéfice des prestations chômage jusqu'à leur terme.
Rappelons, par ailleurs, que les demandeurs d'emploi qui totalisent 160 trimestres avant 60 ans peuvent, sous conditions de ressources, prétendre à l'allocation équivalent-retraite qui garantit un revenu de 890 €/mois (6) .
Les assurés inaptes au travail
Puisque la pension au titre de l'inaptitude ne peut pas être demandée avant 60 ans (CSS, art. R. 351-2) , les pensions sont liquidées, avant cet âge, à titre normal. L'assuré pourra, par la suite, être médicalement reconnu inapte entre 60 et 65 ans pour préserver ses droits à la majoration pour tierce personne : en effet, l'examen de l'inaptitude peut s'effectuer dès lors que l'assuré y a intérêt, sans entraîner la révision de la pension.
Les invalides
La pension d'invalidité prend automatiquement fin à 60 ans pour être remplacée, à partir de cet âge, par une pension de vieillesse allouée en cas d'inaptitude au travail (CSS, art. L. 341-15) . Ce qui n'empêche pas l'assuré titulaire d'une pension d'invalidité de demander à bénéficier de sa retraite avant 60 ans. La caisse d'assurance maladie qui sert la pension d'invalidité doit être informée de cette attribution.
Les titulaires de pension de réversion, de veuf ou de veuve
Les règles de cumul entre une pension de retraite et un droit dérivé sont applicables en cas d'attribution d'une retraite avant 60 ans. Pour mémoire, celles-ci ont été revues par la loi Fillon sur les retraites pour les pensions prenant effet au 1er septembre 2003 : la majoration de 10 % pour enfants élevés est exclue des règles de cumul (7) .
Rappelons que, toujours dans le cadre de la réforme de la retraites, les règles d'appréciation des ressources des titulaires de pension de réversion seront entièrement réformées au 1er juillet 2004. Elles entraîneront une modification des conditions d'appréciation des règles de cumul entre une pension de retraite et un droit dérivé.
Dans le cadre du dispositif, les intéressés bénéficient nécessairement du taux plein (50 %). En effet, ils doivent doit totaliser 168 trimestres pour partir en retraite anticipée alors que, pour obtenir le taux plein, 160 trimestres suffisent.
La durée d'assurance est, conformément à la loi du 21 août, allongée de 2 trimestres par an à partir du 1er janvier 2004 (8).
Ainsi, le prorata applicable à la durée d'assurance nécessaire pour obtenir une pension entière est de (circulaire CNAV du 18 novembre 2003) :
160/160e trimestres pour les assurés nés en 1948 (à confirmer par décret) ;
158/158e trimestres pour ceux nés en 1947 ;
156/156e trimestres pour ceux nés en 1946 ;
154//154e trimestres pour ceux nés en 1945 ;
152/152e trimestres pour ceux nés en 1944.
Si le montant de la pension est faible, il peut être porté au montant du minimum contributif, versé aux assurés bénéficiant du taux plein. En application de la loi du 21 août sur les retraites, la durée maximale prise en compte pour le calcul de ce minimum est, à partir du 1er janvier 2004, allongée progressivement pour passer, à terme, à 160 trimestres. Le minimum contributif est proratisé dans les mêmes conditions (soit sur 158 trimestres pour les assurés nés en 1947,156 pour ceux nés en 1946...). Par ailleurs, de nouvelles modalités de calcul sont prévues pour les assurés ayant appartenu à plusieurs régimes de retraite de base obligatoires et dont la durée totale d'assurance est supérieure à la durée nécessaire pour l'obtention du taux plein (160 trimestres en 2004). Le montant du minimum contributif entier doit être proratisé par le rapport :
Le montant de base de la pension de vieillesse avant 60 ans doit être comparé au montant maximum à servir. Pour mémoire, ce dernier est de 50 % du plafond annuel des cotisations de sécurité sociale au 1er janvier (14 856 € en 2004).
Le ministère des Affaires sociales a informé la CNAV que la majoration de 10 % pour 3 enfants élevés peut être attribuée en complément de la retraite avant 60 ans, de même que la majoration pour conjoint à charge (50,81 € par mois au 1er janvier 2003). En revanche, tel n'est pas le cas de la majoration pour tierce personne qui ne peut être versée qu'aux titulaires d'une pension d'inaptitude au travail, non concernés par le dispositif (voir encadré ci-dessous) (circulaire CNAV du 18 novembre 2003).
Les partenaires sociaux sont convenus, par accord du 13 novembre 2003, de financer, dans le cadre de l'AGFF, le dispositif de retraite anticipée. Une circulaire ARRCO/AGIRC du 1er décembre 2003 a précisé les modalités d'application du dispositif.
Pour les retraites complémentaires prenant effet au 1er janvier 2004, les allocations sont liquidées à taux plein sur les tranches A et B des rémunérations (10) sous réserve de la liquidation de la retraite de base sans abattement dans les conditions du décret du 30 octobre 2003. Aussi l'ARRCO et l'AGIRC invitent-elles les personnes intéressées à contacter d'abord la caisse nationale de l'assurance vieillesse (CNAV) (au 0 825 809 789, 0,15 € TTC/mn). Les caisses de retraite complémentaire, dans l'attente d'instructions plus précises sur les modalités de traitement des dossiers de retraite anticipée, peuvent, quant à elles, « engager le processus d'évaluation et/ou de liquidation » des pensions des personnes qui auront déclaré avoir effectué une telle démarche et obtenu une attestation positive de la CNAV.
L'allocation supplémentaire (ex FNS) est, sous condition de ressources, servie aux titulaires d'un avantage de vieillesse à 65 ans en principe, 60 en cas d'inaptitude. Elle est également versée sans condition d'âge du demandeur s'il est atteint d'une invalidité générale réduisant sa capacité d'au moins 2/3. Sont considérées comme invalides pour l'attribution de l'allocation supplémentaire les personnes titulaires d'une pension d'invalidité ou d'une pension de vieillesse de veuf ou de veuve. Ces dernières pourront donc demander le bénéfice de l'allocation supplémentaire en complément de la retraite avant 60 ans (circulaire CNAV du 18 novembre 2003).
La majoration visée à l'article L. 814-2 du code de la sécurité sociale - destinée à porter au montant de l'allocation aux vieux travailleurs salariés les avantages attribués en vertu d'un régime de vieillesse - ne peut être servie qu'à partir de 65 ou 60 ans, mais pas en-deçà. Dans le cadre du dispositif de retraite anticipée, cette majoration ne peut donc pas être attribuée.
La pension est servie sur demande de l'assuré et à condition qu'il cesse son activité professionnelle (sauf situation de cumul-emploi autorisé).
La liquidation d'une retraite n'est pas automatique, l'intéressé doit la demander. Dans le cadre du dispositif de retraite anticipée, il doit, au préalable, faire le point sur sa situation avec sa caisse. Celle-ci vérifie si l'assuré remplit bien les conditions d'accès. Si tel est bien le cas, la demande de retraite « avant 60 ans » lui sera délivrée (circulaire CNAV du 18 novembre 2003). Ce document est un imprimé unique de demande de retraite commun au régime général, et à ceux des agricoles, des artisans et des commerçants (circulaire CNAV du 18 novembre 2003). Ceux-ci se sont d'ailleurs engagés, par convention du 18 juillet 2003, à reconnaître la valeur probante des informations relatives à la carrière des assurés échangées par voie électronique (périodes prises en compte, durée d'assurance...). Le ministère des Affaires sociales a confirmé que cette mesure entrait dans le cadre du dispositif de retraite anticipée et « qu'il n'y a pas lieu d'exiger la production de pièces justificatives supplémentaires pour leur prise en compte dans la phase de liquidation des droits » (circulaire CNAV du 21 novembre 2003).
Pour percevoir sa pension, l'intéressé doit, sauf cumul autorisé entre une retraite et une activité professionnelle (ex : activité artistique...), cesser cette dernière. Pour mémoire, la loi du 21 août a assoupli les règles du « cumul emploi-retraite » à effet au 1er janvier 2004 (11). Comme le rappelle la CNAV dans sa circulaire du 18 novembre 2003, la cessation d'activité ne doit plus concerner que l'activité générant l'affiliation au régime auprès duquel la retraite est demandée. Aussi l'assuré doit-il cesser son activité chez le dernier employeur pour le service de la pension, mais cette cessation ne s'applique qu'à l'activité du régime concerné.
Il peut aussi reprendre une activité si les revenus qu'elle procure ajoutés aux pensions de retraite de base et complémentaire sont inférieurs au dernier salaire. Si elle est reprise chez le dernier employeur, ce ne peut être qu'après un délai de 6 mois au moins suivant la date d'entrée en jouissance de la pension. Un décret, à paraître, doit préciser les éléments à prendre en compte pour déterminer le dernier salaire d'activité ainsi que les dispositifs de contrôle.
Si la date d'effet de la retraite rétroagit par rapport à la date de dépôt de demande de retraite, la caisse vérifiera la condition de cessation d'activité afin d'éviter toute situation de cumul emploi-retraite non autorisée. Si l'assuré n'avait pas cessé son activité du régime concerné avant cette date, la date d'effet de la pension devra être différée en conséquence.
A noter : pour les pensions prenant effet à partir du 1er janvier 2004, une déclaration sur l'honneur de l'assuré justifiant de la rupture de tout lien avec son employeur est suffisante pour attester de sa cessation d'activité. Elle peut être effectuée en utilisant le formulaire « déclaration sur l'honneur de cessation d'activité salariée » ou sur un document contenant les mêmes informations.
La date d'effet de la pension avant 60 ans est, selon les règles habituelles, choisie par l'assuré et fixée au premier jour du mois. Elle ne peut être antérieure :
à la date à laquelle les conditions d'ouverture du droit à retraite anticipée sont remplies ;
au premier jour du mois qui suit le 56e anniversaire du demandeur ;
au 1er janvier 2004.
Si la demande est déposée le premier jour d'un mois, la date d'effet peut être ce jour là, sur demande de l'intéressé. Si ce dernier n'indique aucune date, elle est fixée le premier jour du mois qui suit la date de réception de la demande, étant précisé qu'une personne née le premier jour d'un mois peut obtenir une date d'effet de pension anticipée le jour de son anniversaire. Enfin, la date de demande d'attestation pour un départ avant 60 ans pourra être retenue pour fixer la date d'effet de la pension, si la demande réglementaire de retraite a été reçue ou déposée dans le délai de 3 mois qui suit la date à laquelle a été établi le document de situation de l'assuré vis-à-vis de la retraite avant 60 ans.
Catherine Sebbah
(1) Il l'est également aux travailleurs indépendants et agricoles, avec quelques adaptations.
(2) Voir ASH n° 2323 du 5-09-03.
(3) Cette allocation n'a plus d'objet depuis la mise en place, le 8 avril 2002, de l'allocation équivalent retraite.
(4) Voir ASH n° 2323 du 5-09-03.
(5) La majoration de durée d'assurance au profit des salariés ayant élevé un enfant lourdement handicapé sera précisée par décret.
(6) Voir ASH n° 2275 du 6-09-02.
(7) Voir ASH n° 2323 du 14-11-03.
(8) Voir ASH n° 2323 du 5-09-03.
(9) La durée d'assurance est progressivement allongée : 158 trimestres pour les assurés nés en 1947,156 pour ceux nés en 1946.
(10) Pour mémoire, la tranche A va jusqu'au plafond mensuel de la sécurité sociale (2 476 €) et la tranche B est comprise entre ce plafond et 4 fois ce plafond (9 904 €).
(11) Voir ASH n° 2323 du 5-09-03.