Quels liens les personnes sans domicile entretiennent-elles avec les professionnels du social et de la santé et les institutions (1) ? L'enquête menée au début de 2001 par l'INSEE sur les publics en grande précarité fréquentant les services d'hébergement et de restauration gratuite continue de livrer ses résultats (2).
Il apparaît que 3 % des personnes déclarent n'avoir fait, dans les 12 derniers mois, aucune démarche auprès d'une institution sociale. A l'inverse, 70 % affirment en avoir accompli au moins une, 85 % avoir vu au moins un médecin et 82 % au moins un travailleur social. Si la consultation du corps médical apparaît, du moins en nombre, à peu près équivalente à celle du reste de la population, ce n'est pas le cas pour la fréquentation des travailleurs sociaux, qui est beaucoup plus intensive. Dans la population générale, seuls 7 % des plus de 18 ans ont rencontré un travailleur social dans l'année. Cette proportion monte à 14 % dans les zones urbaines sensibles. Logique, dira-t-on. Mais parmi ces personnes sans domicile, la proportion de celles accompagnées par un travailleur social décroît en fonction de la précarité de l'hébergement : elle est de 88 % chez les personnes en logement aidé, de 79 %parmi celles qui sont hébergées en centre et de 65 % seulement parmi celles ayant dormi dans la rue ou sous un abri de fortune au cours du mois précédent. Les femmes ont plus souvent eu rendez-vous avec un travailleur social que les hommes, les jeunes plus que les aînés, les Français plus que les étrangers.
Huit personnes sur dix ayant vu un travailleur social s'en disent très (45 %) ou plutôt (36 %) satisfaites. Ce jugement est légèrement plus positif que celui exprimé à l'égard des institutions (74 % de satisfaits quand même).
Tandis que les revenus procurés par le travail restent la ressource principale de trois sans-domicile sur dix, six sur dix déclarent avoir perçu au moins une prestation sociale le mois précédent. Mais là-encore, les personnes à l'abri le plus précaire sont celles qui bénéficient le moins souvent des prestations. L'étude estime que, parmi les sans-domicile éligibles au revenu minimum d'insertion, de 5 à 15 % n'y ont pas recours. Sans doute les mêmes qui n'ont pas de contact avec les travailleurs sociaux.
Pour sa part, la caisse nationale des allocations familiales s'est penchée, à partir de cette même enquête, sur le sort de la moitié des sans-domicile qui bénéficient de ses prestations (3). Parmi ces derniers, près de huit sur dix perçoivent l'un des minima sociaux : la moitié le revenu minimum d'insertion, 13 % l'allocation de parent isolé et 17 % l'allocation aux adultes handicapés. 27 % touchent des prestations familiales. Mais dans plus de six cas sur dix les allocataires sans domicile sont aussi sans enfant, une proportion nettement plus élevée que parmi l'ensemble des allocataires.
Les sans-domicile se distinguent également par leur mode de contact avec l'institution. Ils ont beaucoup moins que les autres usagers recours au courrier et moins encore au téléphone. Par contre, 81 % d'entre eux se déplacent au guichet.
(1) « Les contacts avec les intervenants sociaux des sans-domicile usagers des services d'hébergement et de distribution de repas chauds » - DREES - Etudes et Résultats n° 277 - Décembre 2003.
(2) Sur l'objet de cette enquête, voir ASH n° 2197 du 12-01-01 et sur ses premiers résultats en matière de logement voir le n° 2248 du 1-02-02, de santé voir le n° 2307 du 18-04-03 et d'emploi voir le n° 2327 du 3-10-03.
(3) L'e-ssentiel n° 20 - Décembre 2003.