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Lutte contre les exclusions : le rapport de l'IGAS nourrira l'évaluation de la loi promise par Jacques Chirac

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Les parlementaires ont entre les mains, depuis le début du mois, le deuxième bilan de l'application de la loi relative à la lutte contre les exclusions effectué par l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) et que leur a transmis le gouvernement comme le prévoit la loi tous les deux ans. Mais, pas plus qu'à l'occasion du premier rapport d'évaluation (qui lui n'avait même pas été transmis au Parlement), celui-ci n'a prévu de débat sur le sujet. Le public pourra tout au plus le consulter prochainement sur le site de La Documentation française (1). Les associations, qui réclamaient l'ouverture d'un débat au Parlement autour de la lutte contre l'exclusion, devront donc encore attendre...

Attendre la prochaine échéance, celle qu'a fixée Jacques Chirac, le 17 octobre, lors de la journée mondiale du refus de la misère, pour une grande évaluation de la loi relative à la lutte contre les exclusions. Et dont la méthode de travail a été présentée le 17 décembre au Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion  (CNLE). Lancée à la fin janvier 2004, cette évaluation devrait être achevée au printemps pour être présentée au Comité interministériel de lutte contre les exclusions qui sera réuni pour la première fois. Confiée à un comité de pilotage (élargi aux acteurs publics, associatifs, organismes de sécurité sociale...) présidé par Dominique Versini, elle se nourrira du travail d'analyse de l'ensemble des travaux sur l'exclusion que devrait réaliser l'IGAS. Plus original, des groupes de parole constitués d'intervenants sociaux et de personnes en situation de pauvreté seront également institués, dès janvier, dans huit départements pilotes, pour organiser des forums de discussion. Ils devraient produire un document final fin avril qui servira également à l'évaluation.

Adapter le PAP aux publics fragiles

Achevé en mars 2003, le bilan tant attendu de l'IGAS n'aura donc été publié que... neuf mois plus tard. Et encore, l'état des lieux complet de la loi figure dans le rapport intermédiaire bouclé en novembre 2002 et joint en annexe. Le document final s'est surtout attaché à conduire des investigations supplémentaires sur quatre thèmes : l'organisation de la veille sociale et la réponse à l'urgence sociale ; les permanences d'accès aux soins de santé  (PASS)  ; les incidences du projet d'action personnalisé pour un nouveau départ sur les publics les plus en difficulté ; la lutte contre le saturnisme infantile. D'une actualité quelque peu décalée puisqu'il a nourri certaines des mesures du troisième plan de lutte contre les exclusions présenté le 25 mars par Dominique Versini (2), ce document permet néanmoins de mesurer les efforts menés par les pouvoirs publics et ceux... qui restent à engager.

C'est sans doute sur le projet d'action personnalisé pour un nouveau départ (PAP-ND) que le texte apporte l'éclairage le plus intéressant. Il complète en effet les bilans effectués par l'Unedic et la DARES (3) en examinant les incidences du dispositif sur les publics les plus éloignés de l'emploi. S'il est jugé « globalement cohérent » à leur égard, l'évolution à la hausse des radiations du fichier de l'ANPE suscite néanmoins des interrogations sur l'exposition à la sanction des plus fragiles, même s'il faut les analyser avec prudence. En effet, d'après les chiffres de l'ANPE, 95 % d'entre elles sont dues à une non-réponse à convocation ou à visite médicale et 5 % à un refus d'emploi ou de formation... Dans près de quatre cas sur dix, les personnes radiées pour défaut de réponse à convocation ont repris un emploi. A cela s'ajoutent des difficultés liées à la prise en charge de ces publics dont une grande partie ne semble pas avoir intégré les obligations pour PAP-ND. D'où la nécessité, relève l'IGAS, pour l'agence de faire des efforts d´information sur les risques du non-respect des modalités d'actualisation du PAP.

Outre une évaluation précise de l'impact du dispositif sur les personnes les plus en difficulté, la mission réclame des aménagements en leur faveur pour limiter les ruptures : en plus d'une identification préalable de ces publics (comme cela se fait pour les allocataires du RMI), elle recommande une adaptation de l'entretien et de l'élaboration du PAP et un suivi renforcé. En tout cas, elle estime prématuré, faute d'une évaluation précise, de conclure que ce dispositif n'est pas adapté aux publics fragiles. Pour autant, « les risques de faire prévaloir la logique de contrôle sur celle de l'accompagnement permettant une amélioration de l'employabilité subsistent fortement pour ces catégories de demandeurs ».

Mieux utiliser les CASU

Concernant l'urgence sociale, les failles du dispositif de veille sociale sont connues et on attend maintenant les mesures concrètes promises par Dominique Versini à la suite de son audit (4). On retiendra donc surtout « le bilan nuancé » des commissions d'action sociale d'urgence (CASU) qui, comme l'avait déjà indiqué l'IGAS en 2000, apparaissent plus comme des instances de «  coordination des aides individuelles que de supervision des aides d'urgence ». Les difficultés de fonctionnement tiennent à la lourdeur de ces instances et au fait que certains acteurs n'y participent pas faute de moyens humains et financiers (centres communaux d'action sociale des petites communes par exemple) ou de volonté. Néanmoins, l'IGAS estime que la logique ne doit pas être abandonnée : la CASU est souvent devenue un lieu d'échange et de réflexions communes. Cette instance, qui a fréquemment permis de rassembler des données très intéressantes, doit être utilisée « dans une optique de veille sociale  » et de réflexion stratégique. Avec un animateur, l'Etat, qui, selon le rapport, reste le mieux placé pour assurer la coordination, quelles que soient les options prises en matière de décentralisation.

Le document consacre également toute une partie aux permanences d'accès aux soins de santé (PASS) pour lesquelles Dominique Versini a d'ailleurs annoncé plusieurs mesures, notamment l'amélioration de l'accès aux soins bucco-dentaires. L'IGAS insiste en particulier sur la nécessité de disposer aujourd'hui d'un système d'information fiable et homogène de l'activité des PASS, qui n'existe pas aujourd'hui, et de renforcer la coordination avec le secteur social et la psychiatrie. Elle estime notamment que leur fonctionnement pourrait être amélioré par leur inscription dans le dispositif de veille sociale.

Enfin, le rapport revient sur l'insuffisance du dépistage et de la mobilisation des acteurs dans la lutte contre le saturnisme infantile. Dominique Versini a promis de relancer le programme d'action dans le cadre du plan de lutte contre les exclusions et des mesures devraient être votées dans le cadre de la prochaine loi de santé publique. L'IGAS insiste en particulier sur la nécessité d'assurer la gratuité du dépistage (pris en charge partiellement par l'assurance maladie) et du traitement.

I. S.

Notes

(1)  wwww.ladocfrancaise.gouv.fr

(2)  Voir ASH n°2304 du 28-03-03.

(3)  Voir ASH n° 2319 du 11-07-03 et n° 2335 du 28-11-0 3.

(4)  Voir ASH n° 2328 du 10-10-03.

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