Considérant que la priorité était d'assurer une promulgation rapide de la loi, pour une mise en œuvre au 1er janvier, le Sénat a définitivement adopté, le 10 décembre, sans aucune modification, le projet de loi portant « décentralisation du revenu minimum d'insertion et création du revenu minimum d'activité », tel que l'avait amendé, à la marge, l'Assemblée nationale (1). Tour d'horizon - sous réserve de la décision du Conseil constitutionnel, saisi le 15 décembre par les parlementaires de l'opposition - de ses principales dispositions, sur lesquelles les ASH reviendront prochainement.
En premier lieu, la loi confie au président du conseil général les prérogatives antérieurement dévolues au préfet en matière de décisions individuelles relatives à l'allocataire (attribution, prorogation et suspension de l'allocation, radiation...). Il devient également seul compétent pour agréer les organismes pouvant recueillir les demandes de RMI. Dans la même logique, il est mis fin au co-pilotage du dispositif d'insertion entre l'Etat et le département.
Corrélativement , les départements héritent du financement du dispositif. Les modalités de la compensation financière - il leur sera attribué une quote-part de la taxe intérieure sur les produits pétroliers - sont fixées par la loi de finances pour 2004, qui devait, elle, être adoptée définitivement le 17 décembre. Le mécanisme mis en place tient compte des charges supplémentaires induites par la réforme de l'allocation de solidarité spécifique (ASS) (2).
Le transfert des personnels de l'Etat qui participent à la gestion du revenu minimum d'insertion s'effectuera selon les modalités définies par le projet de loi relatif aux responsabilités locales, en cours d'examen (3). Dans l'attente, ils sont mis à la disposition des conseils généraux.
Par ailleurs, la loi permet aux caisses d'allocations familiales et de la Mutualité sociale agricole de recueillir les demandes d'allocation. Surtout, elle consacre la séparation entre instruction administrative et instruction sociale des dossiers de revenu minimum d'insertion, seule la première demeurant du ressort des organismes auprès desquels la demande est déposée.
Enfin, les conditions d'élaboration, le contenu et les modalités de suivi du contrat d'insertion sont également redéfinis. De même, la loi réforme l'architecture globale des politiques d'insertion. On retiendra plus particulièrement le recentrage des commissions locales d'insertion sur leur mission générale d'élaboration, d'animation et d'évaluation de la politique d'insertion ainsi que le transfert au président du conseil général de l'examen des programmes locaux d'insertion. Quant aux crédits départementaux d'insertion (règles des 17 %), ils ne sont maintenus qu'en 2004.
Au-delà de ces points centraux, la loi aménage ou toilette une série de dispositions relatives, notamment, à la situation des ressortissants de l'Union européenne, à la domiciliation des demandeurs sans domicile fixe, à la mise en œuvre du caractère subsidiaire et à la récupération de l'allocation, à son mandatement...
Le contrat insertion-revenu minimum d'activité (CI-RMA) est un contrat de travail destiné à faciliter l'insertion sociale et professionnelle des allocataires rencontrant des difficultés particulières d'accès à l'emploi. Il peut être conclu entre un employeur du secteur marchand ou non marchand (à l'exception des particuliers employeurs, de l'Etat et du département) et un allocataire du revenu minimum d'insertion ou les personnes de son foyer. Une ancienneté minimale dans le RMI - qui doit être fixée par décret à un an -sera requise, sauf pour les ex-titulaires de l'ASS.
Pour chaque bénéficiaire, l'employeur devra, au préalable, conclure, avec le département, une convention d'une durée maximale de 18 mois fixant, notamment, des objectifs en matière d'orientation professionnelle, de tutorat, de suivi individualisé, d'accompagnement dans l'emploi, de formation professionnelle et de validation des acquis de l'expérience.
Le CI-RMA est un contrat à durée déterminée renouvelable deux fois dans la limite de 18 mois et à temps partiel, la durée minimale du travail du salarié étant fixée à 20 heures. Il peut également revêtir la forme d'un contrat de travail temporaire.
Des dispositions visent à favoriser un passage vers l'emploi ordinaire. En outre, le CI-RMA peut se cumuler avec une autre activité professionnelle rémunérée, dans certaines conditions.
Le revenu minimum d'activité, non assujetti à l'impôt sur le revenu, est au moins égal au produit du SMIC horaire par le nombre d'heures de travail effectuées. Il se décompose en fait en :
une somme forfaitaire, égale à l'aide versée par le département à l'employeur, correspondant au montant du RMI garanti à une personne isolée après abattement du forfait logement (4) ;
et un salaire différentiel à la charge de l'employeur. C'est sur ce seul complément que sont prélevées les cotisations et contributions sociales, salariales et, sauf pour les employeurs du secteur non-marchand qui en sont exonérés, patronales.
Les droits connexes au revenu minimum d'insertion (couverture maladie universelle de base et complémentaire, exonération de la taxe d'habitation...) sont maintenus au profit de chacun des membres du foyer, y compris l'allocataire, et de chacune des personnes à charge. Et, pour préserver l'attractivité financière du revenu minimum d'activité qui, selon la situation familiale de l'intéressé, peut se révéler moins avantageux que le RMI, un complément de RMI continue à être versé à l'allocataire durant tout le contrat. En cas de rupture ou de non-renouvellement du contrat insertion-revenu minimum d'activité et si le bénéficiaire n'exerce pas d'activité professionnelle rémunérée, il continue de percevoir le RMI à hauteur du montant de l'aide versée par le département à l'employeur et ce, jusqu'au réexamen de son dossier.
(1) Voir ASH n° 2335 du 28-11-03 et n°2337 du 12-12-03 - Voir également sur cette réforme, la tribune libre dans ce numéro.
(2) Voir ASH n° 2330 du 24-10-03
(3) Voir ASH n° 2328 du 10-10-03.
(4) Soit actuellement 362,30 €.