Recevoir la newsletter

Le Samu social pointe les limites des réponses à l'urgence

Article réservé aux abonnés

« 

 En 1993, le gouvernement craignait qu'en créant le Samu social, on ne révèle des problèmes que l'on ne pourrait jamais résoudre », se souvenait Xavier Emmanuelli le 24 novembre, en célébrant les dix ans du Samu social de Paris, dont il est le fondateur et le président. « En effet, il n'y aura jamais d'adéquation entre le nombre de demandes de prise en charge et le nombre de places d'hébergement d'urgence. » En cinq ans, le Samu social, qui régule un tiers des places d'hébergement de la capitale via le 115, a vu le flux d'appels multiplié par 3, 5, pour atteindre 710 735 en 2002. Or le nombre de nuitées gérées par le dispositif en centres d'hébergement d'urgence est resté quasiment stable : 231 215 nuitées ont été attribuées à Paris en 1999 et 252 349 en 2002. Au total, plus de la moitié des nuitées (347 316) doivent aujourd'hui être offertes en hôtel. Et, entre 1998 et 2002, le nombre de personnes n'ayant pu décrocher un hébergement à la suite de leur appel, par manque de place ou parce qu'elles ont été orientées vers une autre solution, a doublé pour passer de 2 065 à 4 430 (1).

D'un point de vue plus qualitatif, le président du Samu social remarque « que la grande exclusion reste à chiffre constant », la capitale comptant selon lui entre 9 500 et 11 000 « clochards traditionnels », alors que la précarité augmente (en 2002, 31 340 personnes ont appelé le 115). Elle touche de plus en plus de femmes seules (20 % en 2002) et de familles (20 %, dont 4 % avec enfants), pour lesquelles il n'existe justement pas de lieux d'hébergement spécifiques.

« Ces dix ans d'action montrent que la situation sanitaire s'est améliorée, grâce àla loi contre les exclusions, et à l'accès aux soins, qui a été facilité par l'aide médicale d'Etat et la couverture maladie universelle », estime par ailleurs Xavier Emmanuelli. Avec un bémol, nuance-t-il, pour les pathologies chroniques et les maladies psychiatriques. « Depuis la fermeture des lits psychiatriques cette dernière décennie, beaucoup de malades sont jetés à la rue, ce qui est un scandale, s'insurge Sylvie Zucca Quesemand, médecin psychiatre responsable du réseau Souffrance psychique précarité, mis en place par le Samu social en 1998. 30 % environ des personnes qui vivent à la rue relèvent de pathologies mentales avérées. Faute de traitement, on trouve chez elles des formes historiques de troubles psychiatriques, que l'on ne voit plus ailleurs. »

Autre constat : si les institutions ont à prendre en charge de plus en plus de personnes précaires, elles peinent aussi à les sortir du stade du premier secours. « Il n'y pas de solution pour l'après-urgence », dénonce Xavier Emmanuelli, qui plaide pour une prise en charge en trois temps, « l'urgence, la sortie de l'urgence et l'insertion », que la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion a d'ailleurs repris à son compte dans le cadre de son projet de «  mise en cohérence de l'ensemble du dispositif accueil et réinsertion sociale », annoncé récemment à la suite d'un rapport qui lui a été remis sur le sujet (2).

Conséquence : certaines populations se trouvent de façon « chronique » à la rue. Le nombre moyen de nuits d'hébergement par personne a été multiplié par six en cinq ans. En 2002, 1 003 personnes ont dû être hébergées plus d'une nuit sur deux... « Les migrants restent notamment en panne, car il n'y a pas pour eux de processus d'insertion dans le dispositif de droit commun », déplore Xavier Emmanuelli. C'est le cas des familles déboutées du droit d'asile, mais aussi des mineurs isolés. Entre décembre 2002 et avril 2003,243 enfants ont été rencontrés par les trois structures participant au dispositif expérimental de prise en charge (le Samu social international, Enfants du monde-droits de l'Homme et Aux captifs la libération), lancé par Dominique Versini l'année dernière. Parmi eux, 71 % étaient âgés de 15 à 17 ans et 24 ont été déclarés majeurs à l'issue de l'examen osseux. Comment ont-ils été par la suite orientés ? « Le Samu social, qui est une structure de l'urgence, n'est pas en mesure de le dire », répond Xavier Emmanuelli. Avant d'ajouter que le dispositif va faire l'objet d'une évaluation par la direction des affaires sanitaires et sociales de Paris, à la fin du mois de décembre.

Notes

(1)  Voir sur le sujet le rapport de la FNARS, ASH n° 2334 du 21-11-03.

(2)  Voir ASH n° 2328 du 10-10-03.

LE SOCIAL EN ACTION

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur