Pour la première fois cette année, les plaintes concernant un conflit avec l'école sont remontées à la deuxième place des motifs de saisine de la défenseure des enfants, derrière celles relatives à des discordes liées aux divorces et à l'exercice de l'autorité parentale (28 %). Elles représentent 7,5 % des dossiers individuels, contre 5 % l'an dernier. La troisième raison (6,5 % des dossiers) tient aux questions de santé et de handicap, souvent à la difficulté de trouver une place en établissement médico-social adapté. Deux éléments qui ont dû peser dans le choix de l'institution qui consacre l'essentiel de son rapport 2003 à l'éducation, notamment celle des enfants handicapés (1).
Sur ce point, sans ajouter de données nouvelles au diagnostic, elle juge que « l'état des lieux choque ». Rappelant la non-scolarisation de quelques milliers d'enfants, Claire Brisset dénonce aussi le fait que beaucoup d'autres « se retrouvent durablement entre eux, et parfois durant toute leur vie, à l'écart de la société ». C'est en effet une spécificité française que plus de la moitié des jeunes handicapés « sont encore pris en charge, y compris sur le plan scolaire, par des établissements médico-sociaux alors que la loi pose comme principe la socialisation en milieu ordinaire ». Dans ce domaine, « l'offre crée souvent la demande » ou l'orientation, ajoute le rapport qui suggère, « tout en prenant la mesure de l'histoire et des difficultés pour rapprocher les deux systèmes d'éducation qui s'ignorent depuis des décennies », de créer un seul réseau d'établissements, avant « d'envisager à terme la fusion des deux systèmes ».
Dans l'immédiat, la défenseure des enfants formule deux propositions. L'une vise à lancer un plan d'urgence pour l'accueil des enfants handicapés privés de prise en charge adaptée, ce qui va dans le sens des annonces des pouvoirs publics, mais relève « d'un très grand effort financier », précise-t-elle. Par ailleurs, pour éviter le « désert éducatif », elle insiste pour que tous les établissements spécialisés soient dotés d'enseignants spécialement formés.
Parmi les autres sujets abordés figure l'accueil des enfants entre 2 et 3 ans en maternelle. Il devrait « cesser de se développer dans les conditions actuelles », la formule étant « inefficace voire nocive » à cet âge. « La volonté est d'égaliser les chances face à l'école. Le risque est de provoquer l'inverse », estime la défenseure en faisant sien le jugement de spécialistes.
Pour les élèves « décrocheurs » et en rupture scolaire, le rapport propose la mise en place d'un établissement secondaire par académie, les accueillant hors sectorisation, avec des équipes éducatives volontaires, et une pédagogie innovante et adaptée. Il demande aussi une relance des internats susceptibles de recevoir des élèves géographiquement éloignés, mais aussi des jeunes « socialement vulnérables » qui pourraient y trouver « un climat propice et serein » pour poursuivre leurs études. Cela constituerait « un outil puissant pour réduire les inégalités scolaires et sociales », insiste-t-il.
Au chapitre des violences scolaires, la défenseure déplore que le modèle de l'institution judiciaire imprègne trop souvent les pratiques disciplinaires. Cela est certes nécessaire quand il y a crime ou délit, approuve-t-elle, mais les punitions et sanctions doivent être régulées selon des procédures originales. Dans ce domaine, elle suggère de valoriser les bonnes pratiques déjà mises en œuvre ici et là.
Pour 2004, Claire Brisset prévoit de travailler sur l'adolescence (qui sera le thème de la conférence de la famille), sur les mineurs confrontés au monde de la prison et sur l'action des départements, particulièrement l'aide sociale à l'enfance.
(1) 800 nouveaux dossiers individuels ont été enregistrés cette année et 1 200 traités. Ils ont concerné 3 300 enfants, dont 1 800 pour des requêtes collectives (en hausse), et 1 500 pour des questions touchant à des individus ou des fratries (+ 16 %). Défenseur des enfants, rapport annuel, année 2003 - Disponible à La Documentation française ou sur