Recevoir la newsletter

Un décret budgétaire et comptable au goût amer

Article réservé aux abonnés

« 

 M auvais coup pour le secteur », selon Philippe Calmette, directeur du Syndicat national des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales gestionnaires d'établissements et de services spécialisés  (Snapei). Texte qui confère aux associations gestionnaires un « statut d'“incapable majeur” », selon Mokrane Aït-Ali, vice-président de l'Union nationale des associations de sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes  (Unasea)... Le jugement porté dans le secteur social et médico-social sur le décret budgétaire et comptable paru le 24 octobre (1) apparaît globalement très sévère.

Principal grief : le texte laisse transparaître « une volonté de maîtriser fortement les financements des établissements et services, qui n'est pas contestée sur le principe, mais qui est jugée par trop prégnante dans le nouveau décret », pointe l'Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (Uniopss). « Les pouvoirs de contrôle des autorités de tarification sont renforcés et la logique dans laquelle le juge de la tarification raisonnera désormais est profondément modifiée, puisqu'il devra tenir compte de la primauté des enveloppes régionales limitatives », souligne de son côté le Syndicat national au service des associations du secteur social et médico-social  (Snasea)   (2). Jean-Paul Péneau, directeur général de la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale  (FNARS) résume ainsi la situation : « L'Etat a désormais, pour refuser de financer, la possibilité de s'abriter derrière l'insuffisance des moyens, quels que soient les besoins, les schémas... » « L'administration centrale dit du décret qu'il est l'instrument d'un dialogue renouvelé avec des gestionnaires responsabilisés. Mais une chose est de responsabiliser les gestionnaires quand il y a des marges budgétaires, une autre est de leur laisser la responsabilité de gérer la pénurie. D'où notre malaise », commente Laurent Cocquebert, directeur général de Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentale (Unapei).

Le « malaise » est d'autant plus grand, comme l'explique le directeur du Snapei, que « la procédure de concertation autour de ce décret était plutôt bien menée et laissait augurer de la prise en compte des observations des associations. Or la mouture définitive après passage en conseil d'Etat est très éloignée de nos propositions. » Jean-Paul Péneau renchérit : « Les versions précédentes faisaient la balance, laissant une marge de négociation avec les financeurs et des possibilités de recours... Là, tout est bouclé. »

A tel point que Philippe Calmette prévoit la survenue rapide « d'énormes difficultés budgétaires pour de nombreuses associations » et un effet pervers redoutable : « la sélection à l'entrée, car quand les budgets sont insuffisants, on refuse les cas les plus lourds et coûteux ». Pour mettre fin à cette « mécanique infernale », le Snapei - qui entend déposer un recours contre ce décret - renouvelle donc son souhait de voir les enveloppes globales supprimées et instaurée une tarification, plus juste, en fonction du handicap et de la dépendance de la personne accueillie (3).

Mais, au-delà des seules questions financières, c'est l'esprit même du décret qui trouble les associations. Pour le Snasea, ce texte « présente une vision profondément déséquilibrée entre des engagements qui devaient être réciproques dans la relation gestionnaire d'établissements- pouvoirs publics ». Philippe Calmette juge quant à lui inacceptable « la subordination et la dépendance des associations par rapport à une administration qui ne s'impose aucune règle » « C'est un texte de suspicion », résume-t-il, rejoint sur ce point par le directeur de la FNARS : « Des centaines d'heures de travail pour aboutir à un texte basé sur la méfiance, qui donne parfois aux associations le sentiment d'être globalement incompétentes et fraudeuses ! ». « Ce décret [sonne] la fin de notre espoir de voir modernisés nos rapports avec les autorités de contrôle », regrette Mokrane Aït-Ali.

Certains points sont cependant jugés positifs. La création des groupes fonctionnels de dépenses, qui laissent une plus grande marge de manœuvre aux gestionnaires. Ou encore, comme le note l'Uniopss, l'instauration d'un dispositif de pluriannualité des financements et celle d'une tarification pour les services d'aide à domicile non médicalisés... L'Unapei se félicite quant à elle du « travail intéressant » mené avec l'administration centrale pour produire, en vue de la campagne budgétaire 2005, des indicateurs de tarification permettant une réelle comparaison des coûts entre établissements ou services fournissant des prestations similaires.

Mais ce sont les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) qui ont le plus de raisons de se réjouir. Le texte les autorise en effet à affecter une partie de leur dotation globale aux activités d'insertion par l'économique qu'ils mettent en œuvre et aux actions d'accès au logement pour leurs résidents. « C'est une victoire historique, applaudit Jean-Paul Péneau. Enfin l'Etat reconnaît que des personnes faisant appel à l'aide sociale peuvent être locataires, et non seulement hébergées, recevoir un salaire et non seulement un pécule. » Un progrès du droit des usagers de CHRS auquel la loi contre les exclusions avait ouvert la voie mais que le décret du 3 juillet 2001 relatif à ces structures avait rendu impossible (4).

C.  G.

Notes

(1)  Voir ASH n° 2331 du 31-10-03.

(2)  Qui avait déjà fait part de ses craintes avant la parution du décret - Voir ASH n° 2328 du 10-10-03.

(3)  Voir ASH n° 2326 du 26-09-03.

(4)  La FNARS avait d'ailleurs déposé, sans succès, un recours en Conseil d'Etat contre ce texte - Voir ASH n° 2222 du 6-07-01 et n° 2227 du 7-09-01.

LE SOCIAL EN ACTION

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur