Comment l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) a-t-elle été mise en place dans les départements ? La direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques est allée le voir de près dans six collectivités (1). Les mêmes (2) que celles où elle s'était rendue il y a trois ans pour observer la mise en œuvre de la prestation spécifique dépendance (PSD), choisies pour leur diversité, mais qui ne sont - diplomatiquement ? -désignées que par une lettre, ce qui ne facilite pas la lecture.
De fait, les départements apparaissent de tailles différentes, le nombre de dossiers d'APA gérés à la fin 2002 s'étageant de 2 200 à 15 700. L'impact du passage de la PSD à l'APA (qui s'est traduit par un quadruplement des dossiers en un an en moyenne nationale) apparaît encore plus variable. Dans le département le moins bousculé, la réforme n'a pas doublé le nombre des bénéficiaires tandis qu'il a été ailleurs multiplié par 3,4 ou 6, et même par 8,8 dans le département le plus chahuté ! Hélas, l'étude n'élucide pas la raison de variations aussi surprenantes pour un droit établi au plan national. Différences démographiques ? ou effet de la générosité (et de l'avarice) antérieure pour la PSD ?
Tous les départements ont recruté pour faire face, mais dans des proportions extraordinairement diverses là encore. Cela va de un agent pour 33 dossiers supplémentaires à un pour 900 ! Dans trois cas, les embauches ont porté sur une petite moitié d'agents administratifs, une grosse moitié d'équipes médico-sociales. Mais une collectivité a « fait fort » en recrutant seulement quatre administratifs pour cinq médecins et onze travailleurs sociaux ! Tandis qu'une autre s'est distinguée en embauchant surtout des infirmiers pour réaliser les évaluations à domicile.
Le démarrage de l'APA a été laborieux dans cinq départements, avec des délais d'examen des demandes de cinq à six mois en moyenne (au lieu des deux mois autorisés) et chaotique dans le sixième, où les délais ont atteint un an et « où la situation n'est pas encore stabilisée ».
Malgré le saut quantitatif, chaque département a gardé sa façon de procéder pour l'évaluation de la perte d'autonomie et la détermination du plan d'aide. Ici un médecin et un travailleur social interviennent lors de deux visites successives, ailleurs le travailleur social et l'infirmier font la visite ensemble, ailleurs encore c'est le travailleur social qui fait la visite seul, un médecin n'intervenant que pour la supervision du dossier. La visite est souvent aussi l'occasion d'informer la personne âgée sur ses droits, et de discuter, voire de négocier le plan d'aide avec la famille (prévenue par l'équipe dans trois cas sur six).
Malgré la possibilité de financement d'une large palette de services, l'essentiel des plans reste encore affecté à l'aide à domicile. Souvent par réalisme, note l'étude, étant donné le coût élevé des interventions techniques sur le logement. Et parce que le plafonnement associé à chacun des groupes iso-ressources (GIR) a supprimé la souplesse d'intervention qu'autorisait la PSD. Certaines personnes en GIR 4 auraient besoin de plus de temps d'intervention, tandis que certains GIR 1 pourraient être moins dotés..., regrettent les équipes médico-sociales.
La même remarque est formulée par les associations d'aide à domicile, qui sont d'ailleurs souvent consultées lors de la définition et de l'adaptation des plans d'aide, du moins dans les secteurs où les relations de confiance sont bien établies, notamment du fait de coordinations gérontologiques anciennes. Les six départements déclarent privilégier l'intervention des prestataires. C'est systématique dans l'un d'eux, variable dans trois autres, et jugé irréaliste faute d'offre suffisante dans le dernier cas de figure.
Pour répondre à la demande, les associations ont augmenté leur volume d'heures, souvent en passant du temps partiel (subi) au temps plein. Et, au moins dans deux cas sur six, en embauchant, un seul conseil général favorisant clairement cette possibilité de créer des emplois. Dans les six départements, des actions de formation ont été engagées.
Le suivi du plan d'aide « reste encore une pratique informelle ». Une certitude cependant : les services départementaux ne pourront y pourvoir seuls. La plupart comptent, là encore, sur les relations entretenues entre les équipes médico-sociales, les associations d'aide à domicile et les centres locaux d'information et de coordination gérontologiques (CLIC).
M.-J. M.
(1) « La mise en œuvre de l'allocation personnalisée d'autonomie dans six départements » - Etudes et résultats n° 264 - Octobre 2003.
(2) Le Bas-Rhin, l'Essonne, l'Hérault, l'Ille-et-Vilaine, l'Indre et le Nord. Voir ASH n° 2169 du 2-06-00.