« [...] Les modifications souhaitées par les professionnels, en particulier en ce qui concerne le financement et la charge de travail, sont essentielles pour garantir une activité qui dispose enfin de moyens adaptés. Cependant, l'efficacité de la réforme, sur le fond, dépendra des orientations qui seront prises en matière de formation. Encore faudra-t-il que les différents acteurs s'entendent sur son contenu et ses objectifs, voire, pour certains, sur sa nécessité. [...]
« Sans rechercher une unité totalement utopique, la construction d'un projet de formation va nécessiter la remise en question des pratiques en cours. On rencontre aujourd'hui le plus souvent une conception très familiale de la relation tuteur-personne protégée, avec des risques possibles d'infantilisation et d'accentuation de la dépendance. Autre cas de figure : une conception plus “professionnelle” mais non élaborée, issue de pratiques induites par des expériences antérieures acquises dans d'autres secteurs d'activité (médical, social, éducatif, juridique...). Dans ce contexte, chaque acteur tente d'apporter des réponses aux difficultés rencontrées sur le terrain en adaptant ces réponses au positionnement institutionnel de son employeur.
« L'organisation d'une formation, dans ce secteur spécifique, nécessite d'inverser ces courants pour construire des référentiels professionnels, élaborés à partir de connaissances acquises dans les différentes disciplines des sciences humaines, associées à des données juridiques, économiques, sociales, etc. Il ne s'agit pas de former de “supertuteurs” sachant répondre à tout, mais de regrouper des connaissances et des compétences dispersées en matière de relations et problématiques humaines et d'apporter des bases théoriques solides.
« La formation ne peut être centrée sur le seul opérateur tutélaire, même si celle-ci lui apporterait la reconnaissance d'un travail spécifique dans le champ social. La garantie, pour la personne protégée, de recevoir des prestations de qualité, repose aussi sur un niveau de formation suffisant pour l'ensemble des personnels : cadres, administratifs...
« L'évolution de la société au cours des ces 35 dernières années, la philosophie de la prise en charge des personnes en situation de vulnérabilité dans les établissements et services du secteur médico-social, réforment progressivement les rapports qu'entretient le tuteur avec le majeur protégé. La loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale met en avant les principes de respect, de dignité de la personne, de qualité des prestations et de bonnes pratiques professionnelles. L'entrée des services de tutelles dans ce cadre juridique - question encore en suspens - les engagerait dans une démarche d'organisation centrée sur la qualité des prestations et la formation.
« Restera à susciter l'intérêt des organismes de formation pour développer non seulement ce cursus mais aussi la recherche, dans un domaine jusqu'à présent peu investi, eu égard notamment au caractère récent de cette activité [...]. L'expérience, acquise de façon souvent empirique et intuitive par l'ensemble des acteurs de la tutelle, pourrait servir de support à ce travail de recherche et de formation. Ces actions permettraient de valoriser le secteur professionnel et d'engager la recherche sur les effets de la mesure de protection : celle-ci aurait-t-elle un effet d'amorce thérapeutique ? Un nouveau champ est à explorer au croisement du droit, de l'économie, de la psychiatrie... »
(1) Voir ASH n° 2324 du 12-09-03.
(2) FNAT : 94, rue Saint-Lazare - 75009 Paris - Tél. 01 42 81 46 11.