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La réforme annoncée de l'immigration contredit le code de l'action sociale, s'insurgent l'ANAS et la CPO

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Le projet de loi sur l'immigration ne remet pas seulement en cause les droits reconnus aux étrangers, mais aussi les fondements du travail social. C'est ce que clame l'Association nationale des assistants de service social  (ANAS)   (1), qui s'est jointe, le 6 octobre, à une soirée de protestation contre la réforme, à l'initiative de six organisations, dont le Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI)   (2) et la Ligue des droits de l'Homme.

Une conception limitative de l'aide

Ce projet « ne respecte pas les missions du service social en France », s'inquiète l'ANAS, rappelant que le texte entré en discussion au Sénat précise que « toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l'entrée, la circulation ou le séjour irréguliers, d'un étranger en France sera punie d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 30 000   ». Le ministre de l'Intérieur avait tenté au mois de mai de désamorcer la polémique sur la création de ce «  délit de solidarité  » dénoncé par les organisations de défense des droits des étrangers, en arguant du seul but de démanteler les réseaux organisés d'immigration clandestine (3). Sans convaincre. «  Cet article, interprété de façon restrictive, peut conduire les services administratifs et judiciaires à considérer que l'aide apportée par un travailleur social, en vue, par exemple, de loger une famille sans papiers, est un délit pouvant être sanctionné par la loi... », analyse à son tour l'ANAS. Inquiétude partagée par la Conférence permanente des organisations professionnelles du social (CPO)   (4)  : «  Est-on conscient de l'incohérence et de l'absurdité d'imaginer un accompagnement restrictif aux personnes en difficulté sociale en fonction des seules étiquettes “en règle” ou “sans papiers” ? », soulève l'organisation, se faisant l'écho des professionnels, qui «  refusent que la solidarité avec les plus démunis puisse être considérée comme un délit ».

Les deux associations s'alarment plus globalement du démantèlement des missions du service social auprès des étrangers. «  La disparition programmée du service social d'aide aux émigrants interroge sur l'emprise du ministère de l'Intérieur en matière d'immigration au détriment d'un traitement social d'accompagnement, d'aide et de conseil aux étrangers sous la houlette du ministère des Affaires étrangères  », pointe la CPO.

Surtout, analyse l'ANAS, le projet du gouvernement entre en contradiction avec ce pilier juridique de la profession qu'est le code de l'action sociale et de la famille. Lequel prévoit des prestations d'aide sociale à l'enfance, une aide sociale en cas d'admission dans un centre d'hébergement et de réinsertion sociale, ainsi qu'une aide médicale d'Etat par ailleurs sérieusement écornée dans le cadre du projet de loi finances (5). « A ce titre, [le projet de loi sur l'immigration] contrevient à la réglementation visant à la protection de l'enfance et des mineurs. » Un amendement au texte, adopté en première lecture à l'Assemblée nationale, durcit de surcroît les conditions d'accès à la nationalité française des mineurs étrangers isolés de plus de 13 ans accueillis par l'aide sociale à l'enfance. Ces enfants ne pourraient plus acquérir systématiquement, jusqu'à leur majorité, la nationalité française par déclaration, ils devraient avoir été pris en charge pendant cinq ans. « Ce qui, concrètement, conduit à rendre inapplicable cette disposition », dénonce le GISTI, qui a écrit, avec une quinzaine d'autres organisations, aux sénateurs pour leur demander de ne pas voter cette disposition. Nicolas Sarkozy, qui a d'ores et déjà annoncé vouloir assouplir un autre amendement contesté - instaurant une amende de 3 750  €, en sus d'une expulsion du territoire, pour les travailleurs illégaux sans papiers -, ne s'est d'ailleurs pas encore prononcé sur ce point.

Enfin, condamne l'ANAS, le projet de loi constitue une entorse à la déontologie professionnelle des travailleurs sociaux, fondée sur les principes de non- discrimination, de confidentialité et du secret professionnel. Précisant que le projet de loi prévoit des « vérifications sociales » par l'Office des migrations internationales, à la demande de l'autorité chargée de valider les attestations d'accueil des étrangers, elle craint que la fonction d'aide soit mêlée à celle de contrôle.

Notes

(1)  ANAS : 15, rue de Bruxelles - 75009 Paris - Tél. 01 45 26 33 79.

(2)  GISTI : 3, villa Marcès - 75011 Paris - Tél. 01 43 14 84 84.

(3)  Voir ASH n° 2318 du 4-07-03.

(4)  CPO : BP 145 - 6, rue Anne-Marie-Javouhey - 61005 Alençon - Tél. 02 33 80 65 40.

(5)  Voir ASH n° 2327 du 3-10-03.

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