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Les uns avec les autres

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En rupture avec le modèle des sociétés traditionnelles « holistes », c'est-à-dire fondées sur le tout comme principe de base, la Révolution française a inventé une société centrée sur les individus. Ces derniers sont alors uniquement considérés sous l'angle de leur double appartenance à la commune humanité et à la nation - hommes et citoyens -, et doivent (idéalement) cantonner à la sphère du privé les autres dimensions de leur identité. C'est cet universalisme abstrait qui est en crise depuis le milieu du XXe siècle, marqué par une deuxième étape du processus d'individualisation avec la diffusion de la scolarisation - fondement objectif de l'individu moderne - et la reconnaissance progressive des droits des femmes et des enfants, explique l'auteur. Dès lors, les sociétés démocratiques occidentales de la « seconde modernité » ont à composer avec les individus « complets » tels qu'ils se revendiquent aujourd'hui, désireux d'affirmer leurs différences personnelles et « dont le rêve est de rester libres, de leurs mouvements, de leurs corps, de leurs amours, de leurs liens, et donc de ne pas être enfermés dans des rôles, des places, des attentes ».

Comment être « libres ensemble »  ? Intitulé d'un précédent ouvrage du sociologue consacré à l'analyse des relations familiales (Nathan, 2000), cette question est également au cœur de la problématique ici traitée qui envisage, au plan social, la façon de construire un « nous » respectueux des « je » qui le composent. Pour ainsi concilier un individualisme plus concret et la formation du lien social, il faut que ce dernier réussisse à surmonter différentes formes de crises : crises de la transmission et de la stabilité puisque les individus cherchent à se démarquer des générations précédentes pour affirmer un soi personnel combinant liberté et multiplicité d'appartenances choisies, c'est-à-dire aussi susceptibles d'être rompues au gré de la demande individuelle ; crise des normes et des repères, résultant non de leur absence mais de leur hétérogénéité et des tensions existant, notamment, entre reconnaissance de l'altérité et principe de l'égalité de traitement d'une part, entre affects et raison, intérêts personnels et intérêt général d'autre part.

Récusant toute nostalgie qui renverrait au « ciel ensoleillé des sociétés traditionnelles, plus stables et plus intégrantes », François de Singly reconnaît que le lien social est aujourd'hui tissé de fils moins solides que les fils antérieurs. Mais il en comprend nettement plus. Parmi ceux-ci, « le fil affectif vaut largement, et peut-être plus que les autres, pour créer le sentiment du “commun” », estime le sociologue. C'est pourquoi, nourrissant ses développements d'exemples en particulier puisés dans la littérature, le cinéma et les médias, il nous invite à aller voir du côté de voies expérimentées dans le secret de la vie privée pour dessiner un nouvel idéal de liens sociétaires qui, ne négligeant pas la proximité et la chaleur entre les humains, sachent unir sans trop serrer.

Les uns avec les autres. Quand l'individualisme crée du lien  -François de Singly - Ed. Armand Colin -23  .

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