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Plus de la moitié des délinquants ne récidivent pas

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Deux magistrats publient une étude qui démontre l'efficacité de la réponse éducative à la délinquance des mineurs. Tout en proposant des pistes, comme l'amélioration du repérage des mineurs en difficulté, au titre de la protection de l'enfance.

La justice des mineurs est-elle défaillante ? Deux magistrats ont lancé une étude (1) dont les résultats s'avèrent être un plaidoyer en faveur des mesures éducatives telles qu'elles existaient avant la réforme de l'ordonnance de 1945. François Touret de Coucy, ancien juge des enfants au tribunal de Caen, et Robert Bidart, juge des enfants au tribunal de Pau, respectivement secrétaire général et vice-président de l'Association française des magistrats de la jeunesse et de la famille, ont mené dans leurs juridictions une étude statistique sur le parcours des mineurs suivis au pénal pendant les quatre ans qui ont suivi leur majorité. Les « historiques nominatifs » ont été exploités pour tous les jeunes ayant atteint l'âge de 18 ans en 1997 (304 jeunes à Caen, 91 à Pau), depuis 1992 jusqu'en 2001. Objectif : confirmer la conviction des professionnels sur l'efficacité de la justice des mineurs par des éléments objectifs. « Très peu de chiffres existaient, explique François Touret de Coucy. Il s'agissait pour nous de sortir des expériences individuelles et des éléments subjectifs, mais aussi de se risquer à une évaluation de notre propre travail. »

L'étude a d'autant plus d'intérêt qu'elle porte sur une période antérieure à la mise en place des nouvelles mesures créées par la réforme de la justice des mineurs. Premier constat, qui bat en brèche les idées reçues sur la récidive : six à sept mineurs sur dix n'ont eu qu'une seule affaire pénale et plus de la moitié ne récidivent jamais. « Ce qui prouve qu'en général, les réponses éducatives classiques suffisent », commente François Touret de Coucy.

Autre conclusion, qui va notamment à l'encontre du rapport sénatorial sur la délinquance des mineurs (2) remis en juillet 2002 : la notion d' « impunité » des mineurs ne se vérifie pas. La plupart des multi-récidivistes (86 %) sont incarcérés et purgent leur peine. En revanche, la détention « n'a constitué ni un coup d'arrêt à la délinquance, ni l'évitement de condamnations fermes entre 18 et 22 ans ». Parmi tous les jeunes ayant fait un séjour en prison, un seul n'y est plus retourné.

L'étude pointe aussi que le repérage social des enfants en difficulté, au titre de la protection de l'enfance, ne joue pas suffisamment son rôle d'alerte :dans les deux juridictions, les résultats révèlent que ceux qui accumulent les affaires pénales sont également (73 % à Caen, 50 % à Pau) des mineurs en danger, pris en charge dans le cadre de l'assistance éducative. Or, pour bon nombre des « multi-réitérants » (56,7 % à Caen), l'ouverture d'une mesure de protection n'est intervenue, au mieux, qu'après la saisine pénale. «  Ce qui montre que le suivi des mineurs pourrait être amélioré en commençant plus en amont, avant qu'ils ne multiplient les infractions, souligne François Touret de Coucy. 73 % des familles de réitérants sont en outre connues au pénal. La situation familiale est donc un clignotant qui pourrait être vérifié dans les données figurant au parquet, et par des enquêtes sociales plus poussées. Cela permettrait d'adapter les mesures prononcées en fonction de la caractérisation sociale du mineur, au lieu de suivre tout le monde de la même façon. »

Néanmoins, si son échantillon est suffisamment large pour être représentatif, l'étude souffre de certaines limites. Elle ne prend en compte ni l'âge des mineurs, ni la gravité des infractions ou la nature des peines prononcées. « Par manque de moyens, justifie François Touret de Coucy. Mais aussi parce qu'en multipliant les détails, on finit par perdre la pertinence statistique. »

Le souhait des auteurs : que toutes les juridictions pour mineurs s'attellent à ce travail d'évaluation. « C'est un bon moyen de jouer la transparence, à l'heure où l'administration centrale de la protection judiciaire de la jeunesse est attaquée sur ses failles. »

Maryannick Le Bris

Notes

(1)  Anciens mineurs délinquants : bilan à l'âge de 22 ans - Jessie Lalouelle, Sandra Larrouy, François Touret de Coucy, Robert Bidart - Septembre 2003 - Association nationale des magistrats de la jeunesse et de la famille : Palais de Justice - Boulevard du Palais - 75001 Paris - Tél. 01 44 32 65 13.

(2)  Voir ASH n° 2270 du 5-07-02.

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